jeudi 12 avril 2007 par Déclic Magazine

Plus rien ne va dans les maisons de distribution d'?uvres discographiques de Côte d'Ivoire. Ce maillon de notre culture souffre des effets drastiques de la piraterie qui frappe tous les secteurs d'activités culturelles. Et si on n'y prend garde, l'inévitable risque de se produire.



On peut dire et écrire que la situation est devenue plus qu'inquiétante pour la survie de nos maisons de distribution des Compacts Disc (CD) et cassettes. Elles traversent dans leur ensemble, des moments pénibles dus aux effets corollaires de la piraterie. Cette autre gangrène mortelle qui cause toutes les misères à la classe des créateurs ivoiriens qui oeuvrent, sans avoir en retour le fruit de leurs créations. Maillon essentiel dans la chaîne de l'industrie culturelle, les maisons de distribution dont l'importance a été mille fois démontrée par les professionnels de la culture, semblent être des victimes de taille dans cette situation d'extrême dégradation qui plonge aujourd'hui pas mal de maisons dans un désespoir inqualifiable. Des milliers de supports fabriqués et disposés en stocks ne reçoivent plus la visite des différents vendeurs, détaillants et grossistes qui se bousculaient aux portes desdites structures dans le bon vieux temps. Aujourd'hui, toutes maudissent l'initiateur de cette invention mortelle et appauvrissante qu'est la piraterie. Parce que, pour ce qu'on sait, dans ce phénomène de la distribution, plusieurs maisons se sont solidement bâties sur des fortunes colossales à partir des profits tirés dans les contrats de confection, de duplication et de distribution des supports des artistes. D'autres ont même ajouté la fonction de production, jouant ainsi le triple rôle de producteur, de duplicateur et de distributeur. C'est d'ailleurs le cumul de ces rôles dévolus à d'autres acteurs de la chaîne musicale qui fait porter le doigt accusateur sur les maisons de distribution dans ce phénomène de la piraterie difficile à juguler. Mais malgré tout ce qu'on ait raconté sur leur sort, elles avaient toujours continué à jouer leur partition jusqu'à ce que le mal devienne ces quatre dernières années, un véritable poison de la vie de nos artistes qui croupissent sous le poids des maladies et de la misère. Parce que les ?uvres créées sont disséminées dans tous les carrefours de la cité, et vendues à vil prix. Tout simplement parce qu'on peut le dire aussi, ces supports ont échappé au contrôle (si ce n'est fait par simple volonté des distributeurs à qui la tâche incombe logiquement). Le mal étant là, tous les acteurs partagent les conséquences avec l'espoir de voir l'UNATARCI et toutes les brigades de lutte contre la piraterie, s'attaquer à la racine du mal. Mais dans ces conséquences implicites, interrogeons-nous sur la question de savoir comment arrivent-elles à gérer ce temps de disette.

Un regard panoramique sur la situation de nos maisons montre que le temps n'est pas rose. Et tout se démontre par la baisse du tapage médiatique auquel elles nous ont habitués et qui est devenu depuis un certain temps un souvenir lointain. Tout simplement parce que rien ne marche dans ces maisons. C'est à peine qu'on écoule un stock de CD ou de K7. D'ailleurs détaillants et grossistes se plaignent du fait que toutes les nouveautés sont exposées au bord des rues.



A Showbiz, les majors se cherchent

Malgré l'entrée des majors internationaux tels que Olomidé, Wemba et des locaux comme Meiway, Betika, Magic System et bien d'autres, les résultats escomptés semblent ne pas être atteints en matière de chiffres d'affaires. Puisque cette maison qui fait partie des anciennes sur la place vit d'énormes difficultés que ses responsables évitent d'exposer sur la place publique. Mais il y a des signes qui ne trompent pas quand ça ne va pas. Le degressage du personnel, la réduction du taux de pressage et autres sont des signes qui indiquent bien que le Majors traversent des moments difficiles. Mais en fins stratèges, les responsables de Showbiz (Claude Bassolé et Constant Anagonou) qui n'ont pas encore dit leur dernier mot, nourrissent sûrement l'espoir de relancer cette maison qui a fait les beaux jours de la musique africaine en général et en particulier, de la Côte d'Ivoire. Pourvu que la piraterie connaisse une fin.



Ivoir Top Music : Vers la fin d'un rêve ?

Cette maison qui a fait la fierté de son DG Henri Kattié vit elle aussi le feu de la piraterie. ?'Si rien n'est fait, nous risquons de mettre la clé sous le paillasson''. Confiait sur le plateau de la télé, Djahi Constant, responsable marketing de la maison. Une façon pour lui de montrer à quel degré l'ampleur des effets a atteint cette maison qui a aussi fait les beaux jours de la musique ivoirienne malgré son jeune âge. Aujourd'hui, elle vit les mêmes conséquences sociales et économiques. Comme solution, on a réduit le personnel, les locaux ont été réduits et mis en location pour éviter les lourdes charges. Et pour rebondir, l'on attend patiemment le lancement de l'album de Soum Bill qui est le joker de Henri Kattié. Mais il faut d'abord nettoyer le terrain de la piraterie. Dans le cas contraire, ce serait la fin d'un rêve qui vise à être le Top des Tops.



Dobson : On a vite fait de danser

Elle est arrivée au moment où il y avait l'euphorie des DJ. Après un tapage médiatique autour d'elle-même et de ses artistes leaders comme Erickson le Zulu, VIP DJ, la Famille Sery, les Woody et autres, ce fut la désillusion. Même l'arrivée de la légende de la musique malienne Salif Kéita n'a pas créé le boom attendu. Et voilà, cette maison qui nourrissait de bonnes ambitions pour ses artistes, a été freinée dans son élan. Aujourd'hui, c'est à peine qu'on entend parler d'elle. Bien dommage !



CID : Le nouvel esprit peut-il sauver la situation ?

Plus qu'une maison de distribution et de production, Canal Ivoire Distribution (CID) était une des maisons qui s'étaient installées avec des idées bien claires : venir révolutionner le milieu de la distribution. Et son ouverture a créé beaucoup de départs au niveau des autres maisons qui rendaient la vie pénible aux artistes. C'est toute une machine promotionnelle qui a été déployée autour de CID et de tous les chanteurs de son écurie par son DG d'alors, Dr Emmou. Mais le vent des palabres qui a soufflé sur cette structure a créé sa scission, entraînant ainsi la naissance de deux maisons différentes. A savoir ?'CID Nouvel esprit''dirigé par M. N'Guessan qui tente redonner un souffle nouveau à sa maison, et ?'Capital Prod'' avec à sa tête Dr Emmou qui a de nouvelles ambitions pour sa société. De son côté, chacun se bat pour repositionner son entreprise mais hélas, les dures réalités de la piraterie semblent annihiler toutes les actions.

A la suite, on peut ajouter le cas de Music Pluriel, Music Plus, Equoest et bien d'autres maisons qui ont fait beaucoup de bruits dès leur arrivée. Si elles ont pu séduire le public dans leur campagne de promotion des artistes, force est de constater qu'elles présentes toutes aujourd'hui un triste visage à cause de la piraterie qui a empoisonné le marché de toute l'industrie culturelle. Leur seul espoir, c'est de voir l'Etat ou l'UNARTCI avec sa brigade, enrayer la piraterie. Sans quoi, ce sera la catastrophe. Elles sont donc obligées de souffler chaque jour le chaud et le froid ou de vivre entre le doute et l'espoir. Espérons que cette situation va connaître une fin, pour le rayonnement de la culture ivoirienne.

José Téti

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