mardi 6 mai 2008 par Afrique Matin

L'art plastique a connu ses moments de gloire en Côte d'Ivoire dans les années 90, avec la libération de la parole qui a suscité l'éclosion d'une pensée créatrice plurielle. L'artiste, autrefois prisonnier d'un ordre politique dans les limites duquel il est tenu de mesurer sa création, se voit, à la faveur du multipartisme explorer les voies insondables de son activité. Oussou Justin, précurseur en Côte d'Ivoire du concept du ?'Kangourou'' est de ceux dont l'art marque la rupture avec les styles classiques basées sur des règles statiques qui rendent impossibles l'épanouissement de l'activité créatrice. "Le style classique enseigné à l'école des beaux arts étouffe le génie créateur de l'artiste" remarque-t-il. Le disant, l'homme sait de quoi il parle parce qu'il n'est pas arrivé à l'art plastique par pur enchantement. Depuis son enfance, il possédait déjà les atouts d'un artiste en devenir; ce qui fait dire à son entourage que ?'Oussou Justin est un artiste né''. Un artiste qui possédait un don unique dans le dessin et dans la sculpture. Pour parfaire et organiser toutes ses capacités innées, il accéda logiquement, suite à un test, à l'Institut National des Arts d'Abidjan. Cinq années seulement après, le voici détenteur du diplôme national des beaux arts qui normalement devait faire de lui un enseignant. Mais, très ambitieux et sûr de ses grandes capacités, il décide de prolonger sa formation pour quelques années encore. Deux années suffiront pour faire de lui un diplômé d'études supérieures d'art plastique. Diplôme qui lui ouvre la porte d'un stage de perfectionnement à l'école des arts déco de Paris en 1990. Cette date marque le départ d'une carrière richement engagée sur les sentiers du succès. Oussou Justin va parcourir, le drapeau national à la poitrine, l'Afrique et l'Europe et faire étalage d'un art plus responsable et dynamique. Après avoir conquis le public ivoirien au cours d'expositions à l'hôtel ivoire, au palais de la culture, à la galerie d'arts pluriels, au centre culturel français, le natif d'Oumé entreprend la conquête de l'Afrique. Ainsi en 1994, il participe au festival d'art Ewolé de Lomé où il rencontra le peintre sénégalais Vié Diba. Rencontre qui fut décisive dans la suite de sa carrière. Quelques années après Dak'art 2002 l'accueille. En 2007, il est invité en Afrique du Sud pour représenter la Côte d'Ivoire. Ses voyages sur l'Europe débutent en 1998 par Paris, Bruxelles et Tel'aviv en 2007. Aujourd'hui enseignant à l'UFR de l'information de la communication et des arts (UFR ICART) à l'université de Cocody, Oussou Justin se présente comme le peintre de la rupture. C'est pourquoi il est le seul à vulgariser ici en Côte d'Ivoire un concept épousé lors de sa rencontre avec Vié Diba. Il s'agit du concept du ?'kangourou'', qui représente un volet de son travail sculptural. "Ma peinture sculpturale se subdivise en deux (2) parties à savoir le travail de recherche appelé concept du ?'kangourou'' dont le créateur est le sénégalais Vié Diba et la peinture d'histoire", précisa-t-il. Pour l'artiste, le premier concept consiste à créer une symbiose entre différents matériaux pour former un tout indissociable. "Il s'agit ici de peindre la sculpture, l'enfouit dans la toile pour créer une symbiose entre les deux, et maintenir un contact permanent entre les deux entités comme c'est le cas de la mère kangourou lorsqu'elle enfouie son bébé dans sa poche ventrale". A propos de la peinture d'histoire, il est simplement question, selon le peintre de mettre en évidence des faits majeurs de l'histoire de l'humanité, tels que le coup d'Etat de 1999, la crise du 19 septembre 2002, les événements du 4 au 6 novembre 2004, l'affaire des déchets toxiques. Pour Oussou Justin, le regard artistique porté sur ces événements permet d'instruire les générations actuelles et futures sur les conséquences dramatiques de telles situations pour une véritable prise de conscience. "Naissance d'une nation", est l'ouvrage édité le 07 novembre 2007 par Oussou Justin et qui s'inscrit dans la veine de la peinture d'histoire. L'auteur a également peint les déchets toxiques sur le thème évocateur de "l'Afrique du berceau de l'humanité à la poubelle du monde : le cas des déchets toxiques en Côte d'Ivoire". En définitive, l'artiste se détermine par deux dimensions. Une première à travers laquelle il fait étalage de son génie créateur en associant intelligemment formes et couleurs (la peinture de recherche) et une deuxième, qui est un engagement "politique et social" de l'auteur pour une population en proie à toutes formes d'injustice. Aujourd'hui figure incontournable dans l'univers des arts sculpturaux, Oussou Justin, garde à l'esprit deux projets à cours terme. Une exposition le 20 mai prochain chez Anis production sur le thème "tradition et modernité" et un deuxième ouvrage cette fois sur le concept du ?'kangourou''.

Léon Saki

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