mardi 15 décembre 2009 par Prestige Magazine

Invitée pour le Festival Marcellin Yacé de la créativité, la digne fille de Bony Gnaoré a fait un détour à notre rédaction pour nous donner de ses nouvelles et par ricochet celles de son père. Avec sa fougue et sa puissance vitale que l`on sent dans ses compositions Dobet, malgré sa petite expérience du domaine de la musique, a su s`imposer. En témoigne sa participation, auprès de figures emblématiques de la musique africaine, à l`hommage rendue à Miriam Makeba au Cirque d`hiver qui était plein à craquer durant les trois soirs. Distinguée récemment aux Grammy Awrads. Dobet s'apprête à fouler de nouveau le sol ivoirien le 2 janvier prochain. Elle sera en scène à la 10è édition de la Nuit des Etoiles.


Quelles sont aujourd`hui vos relations avec votre père qui, depuis belle lurette, a disparu du show-biz ivoirien ?

Nous avons de très bonnes relations. J`ai toujours besoin de lui pour mes compositions. Lorsque je dois composer un son tribal, je lui fais appel. Il m`apporte beaucoup dans mes inspirations et dans ma vie. Il est en permanence avec mon mari et moi. Là, nous sommes venus pour le Festival Marcellin Yacé pour la créativité. Il me soutient énormément dans toutes mes entreprises. Mon père vit à Strasbourg, mais fait souvent l`aller et retour, pour venir voir la famille à Abidjan.


Quelles sont vos relations avec la communauté ivoirienne à Paris ?

Je côtoie certains lorsque je me rends à Paris. Mais je ne suis pas trop encrée dans cette communauté, puisque je réside dans un village, très loin de la capitale, à trois heures de route en voiture, je crois. Je cohabite, dans mon village, avec quelques Congolais et Camerounais. Nous sommes, je pense, huit Noirs au total dans ce village.


Comment la communauté ivoirienne vous accueille-t-elle lorsque vous êtes en concert, vu que vous ne la fréquentez pas assez ?

Ceux qui me connaissent viennent à mes spectacles. J`ai un public large qui est africain et européen. C`est vrai que je ne suis pas connue ici. Mais en Afrique centrale, de l`Est et de l`Ouest, j`ai mon public. Comme je danse et que je joue aussi de la percussion, j`entraîne toujours mon public.


Pourquoi avez-vous opté pour la campagne et non pour la grande ville ?

Tout simplement parce que le village m`offre la tranquillité dont j`ai besoin pour mes différentes compositions.


Comment faites-vous pour vivre ?

J`ai un producteur qui a une base solide et un réseau très efficace dans le monde. Nous avons un planning de dates que nous suivons, mon mari et moi. Soit par la route avec un camion podium, soit par avion, lorsqu`il s`agit des déplacements sur de longues distances.


Etes-vous plus portée sur les festivals que sur les concerts ?
Je suis festival et petit concert.


Là, vous étiez en Côte d`Ivoire pour le Festival Marcellin Yacé. Pourquoi êtes vous spécialement venue pour ce festival ?

J`ai essayé d`apporter le spectacle que je fais habituellement en Europe. De démontrer que quatre personnes pouvaient faire un concert, déplacer et moderniser la culture ivoirienne, pour prouver que nous pouvons vivre de notre culture et de notre art. Je voulais montrer que par le travail, l`on peut vivre de sa culture et de son art. Malheureusement, nous n`avons pas pu apporter grand-chose à ce festival. Mais je tire mon chapeau à Kady Bomou et à toute son équipe. Avec de maigres moyens, elles ont pu réussir ce festival. Je félicite Kady et toutes les femmes qui l`ont accompagnée pendant ce festival.


D`aucuns ont déploré le boycott de ce festival par certains artistes, qui pourtant, ont fait école auprès de Marcellin de son vivant ?

Mon père, Bony Gnaoré, était avec moi pendant ce festival. Il y a aussi eu les Gos du Koteba, Bagnon, Les Reines Mères, David Tayaurault et Bomou Mamadou. Pour moi, c`était un beau monde, tout ça. Voir tous ceux qui ont participé à ma formation au village Kiyi réunis autour de moi a été la totale.

Vous êtes à votre troisième album et pourtant vous êtes peu connue du grand public ivoirien
Je ne suis pas connue en Côte d`Ivoire, tout simplement parce que mon manager et producteur a plutôt mis l`accent sur ma promotion en Europe. J`ai certes suivi ma formation à Abidjan, mais musicalement parlant, ma carrière artistique a pris son envol en Europe. Nous n`avons pas fait de promotion ici parce qu`il fallait payer pour passer sur les antennes. Chose que vous ne verrez pas en Europe. Bien au contraire ce sont les chaînes qui versent des royalties lorsqu`elles t`invitent sur leur plateau. Parce que tu contribues à l`augmentation de leur audimat, à travers le public que tu apportes sur la radio. Je me dis que je ne suis pas encore prête. Il faut que je prenne le temps de m`affirmer et avoir une carrière solide avant de revenir me faire connaître au pays. Parce que je n`ai que 27 ans. J`ai commencé la musique à l`âge de 22 ans. Bientôt je serai à Abidjan pour la nuit des Etoiles. Les gens apprendront à me connaître. Je rêve de conquérir la scène ivoirienne.

Parlez-nous de vos précédents albums...
Le premier, je l`ai réalisé avec ce que mon expérience au village Kiyi m`a apporté. J`ai chanté en différentes langues africaines. C`était un album très acoustique avec des calebasses, de la percussion, etc. Pour le deuxième, nous sommes allés en Afrique du sud et nous avons chanté en sept langues. Nous avons ouvert un pan de notre musique à la basse batterie. Et le troisième album, qui sortira au mois de février, sera fait avec beaucoup de compositions à deux.

Comment définissez-vous la coloration musicale de vos albums ?
J`ai un style inspiré de la musique traditionnelle, mais avec une base acoustique. On peut dire de la world music. Mais je ne peux pas me targuer d`en faire réellement. Car, qui dit world music parle de musique du monde. C`est une musique assez vaste. Je fais une musique d`instinct. Je m`inspire de l`univers.

N`avez-vous pas eu peur de faire un fiasco en venant à ce concert, quand l`on sait que votre musique n`est pas beaucoup appréciée par un grand public ivoirien ?
Je dirais plutôt que le public ivoirien ne connaît pas ma musique. Il y a eu feue Mossia, Lokua Kenza, Barbara Kanam (avec son premier album), Richard Bona qui ont une musique assez calme, mais qui rencontre le succès. C`est dans ce même style musical que je fonctionne. Ma musique n`est pas connue, mais je pense qu`avec une bonne promotion, les mélomanes qui aiment la musique au sens noble apprécieront certainement ce que je fais.

Connaissez-vous la mouvance musicale actuelle en Côte d`Ivoire ?
Oui, je sais que le coupé décalé fait rage depuis quatre ou cinq ans. Il y a aussi le Zouglou qui ne baisse pas les bras et qui tient depuis belle lurette.

Comment préparez-vous le rendez-vous de la nuit des étoiles ?
La Nuit des Etoiles nous permettra de voir comment le public accueillira mon troisième album qui sera, cette fois, axé sur une ouverture à la pop. On y retrouvera du Guéré, du Fon, le Shasha d`Afrique du sud, du Malinké et du Dida.

Quels sont les grands noms de la musique que vous avez déjà côtoyés ?
Il y a Abib Kouyaté, Rokia Traoré, Angélique Kidjo, Voussi Makakela, Ayo, Asha et bien d`autres. Les plus récents pour moi ce sont ceux-là. Nous avons rendu un hommage à Miriam Makeba avec Angélique Kidjo, Rokia Traoré, Asha, Ayo au Cirque d`hiver qui était plein à craquer chaque fois. Et cela a été une expérience merveilleuse pour moi.

Franck Hamylton
hamylton2003@yahoo.fr

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