mercredi 18 août 2010 par Le nouveau navire

Le 23 juillet dernier, la multinationale Trafigura a été condamnée par la justice hollandaise pour avoir exporté illégalement des déchets toxiques du port d`Amsterdam vers la Côte d`Ivoire. Pour la première fois depuis le début de cette affaire, la multinationale Trafigura a été reconnue coupable d`avoir dissimulé la nature toxique des déchets.

Une grande étape vers la justice vient d`être franchie. Serait-on tenté de dire, si l`on se réfère à l`accord incongru conclu entre l`Etat de Côte d`Ivoire et le géant pétrolier Trafigura. Selon cet accord scandaleux et scabreux, la multinationale Trafigura ``financerait`` le nettoyage d`Abidjan à hauteur seulement de 152 millions d`euros (100 milliards Fcfa), sans pour autant reconnaître sa responsabilité dans la pollution. En échange, l`Etat ivoirien cesserait toutes les poursuites, financières et judiciaires, lancées à l`encontre de Trafigura et de ses dirigeants incarcérés à la Maison d`arrêt et de correction d`Abidjan (qui seraient libérés de prison).

Ironie du sort ou véritable mascarade
Cet accord intervenait le jour même où la Commission internationale d`enquête sur les déchets toxiques devait publier un rapport établissant les responsabilités de tous les acteurs impliqués dans ce drame au niveau international. Aujourd`hui encore, les sites toujours pollués de déversement de ces déchets pullulent à Abidjan, sans que rien ne soit fait pour les traiter. Et, le nombre des victimes va grandissant au fil du temps, dans l`insouciance totale des autorités ivoiriennes. Fort donc de l`appui de l`Etat de Côte d`Ivoire, et toujours en niant toute responsabilité dans le déversement de ces déchets à Abidjan et banlieues, le dimanche 20 septembre 2009, Trafigura annonçait qu`il allait indemniser seulement 31.000 des plaignants, à hauteur de 1.150 euros (750.000 Fcfa) par personne. Cet accord mettait alors fin à la procédure, pourtant bien engagée, contre Trafigura au Royaume-Uni par certaines victimes par le truchement du Cabinet d`avocats londonien Leigh Day & Co. Véritable man?uvre d`animalisation des victimes ivoiriennes, qui n`auront même pas droit à prendre connaissance du contenu exact de cet autre accord bidon, conclu en leur nom. Aujourd`hui encore, une bonne partie de ces victimes attend d`être indemnisée.

Depuis, beaucoup d`eau a coulé sous le pont
Primo, le rapport Milton longtemps gardé secret par Trafigura a été finalement révélé au grand jour grâce à la vigilance d`un parlementaire britannique, et par la persistance du journal londonien ``The Guardian``. Secundo, Green Peace qui, de tout temps, fustigeait les différents arrangements de Trafigura (Ndlr, avec l`Etat de Côte d`Ivoire et avec Leigh Day & Co) a poursuivi l`affréteur devant la justice hollandaise pour ``infractions à la législation européenne sur les importations et les exportations de déchets, pollution maritime et faux en écriture commis aux Pays-Bas``. C`est cette procédure qui a abouti le 23 juillet dernier, et qui a mis en lumière les responsabilités de Trafigura dans ce drame comme s`il incombait à l`organisation de défense de la préservation de la nature, Green Peace, d`assumer le rôle régalien de protecteur de la population dévolu à l`Etat de Côte d`Ivoire !

Que peuvent alors espérer les victimes ivoiriennes de la décision de justice hollandaise?
Le responsable d`une des associations des victimes des déchets toxiques, en la personne de Ouattara Mavin président de l'UVDTAB (Union des victimes des déchets toxiques d`Abidjan et banlieues), aurait effectué le déplacement jusqu`à Amsterdam pour s`entendre dire que les victimes ivoiriennes n`étaient pas couvertes par cette action en justice. Par conséquent, elles (les victimes d`Abidjan) ne sont pas parties prenantes dans la procédure de ``Green Peace``. Quelle incidence cette décision du juge hollandais, pourtant bonne mais qui ne les concerne pas directement, peut-elle avoir sur l`indemnisation de ces centaines de milliers de victimes ivoiriennes ? Il fallait se tourner du côté de Londres, pour comprendre que tout n`est pas pour autant perdu pour les victimes d`Abidjan. En vérité, cette organisation ( UVDTAB) avait déjà, le 16 décembre 2009, intenté une action devant la ``Royal High Court of Justice`` de Londres (Ndlr, la ``Bench Division of the High Court``) contre Trafigura en réparation des préjudices subis. Les Cabinets d`avocats ``Fadiga & Co``, et ``Harding Solicitors`` qui assurent la défense de ces milliers de victimes sont à pied d`?uvre pour faire subir à Trafigura sa seconde fronde. Puisque, la décision du juge hollandais confirme au moins, pour la première fois, la responsabilité de Trafigura dans cette affaire. Sa responsabilité étant établie, il appartient à Trafigura de réparer le dommage causé à autrui par sa faute. Le Principe général du droit sur la responsabilité civile et la réparation du dommage causé est universel. C`est un élément important d`autant qu`il fragilise drastiquement Trafigura pour la suite de la procédure à Londres, a-t-on appris de source proche du dossier. De ce qui précède, l`on peut affirmer sans risque de se tromper que les Ivoiriens tiennent le bon bout dans cette affaire aussi rocambolesque que dramatique. Toutes les organisations ont mille et une raisons d`espérer en l`aboutissement de leur lutte afin que justice soit définitivement rendue.

Coulibaly N`Golo A.
aboubackr@yahoo.fr
Source : Eburnews

www.225.ci - A propos - Plan du site - Questions / Réponses © 2023