mercredi 30 mars 2011 par AFP

ABIDJAN - Les forces du président ivoirien reconnu par la communauté internationale Alassane Ouattara ont pris en trois jours un avantage écrasant sur l`armée fidèle à Laurent Gbagbo, mais l`issue de la crise post-électorale reste soumise à l`incertaine, et redoutée, bataille d`Abidjan.
Quatre mois de tension, de violences et de médiations sans succès, et
depuis lundi une offensive éclair: la crise née de la présidentielle de
novembre, qui a fait plus de 460 morts selon l`ONU, s`est subitement
accélérée, et le pouvoir de M. Gbagbo n`a jamais été aussi ébranlé.
Si l`éventualité d`une opération d`envergure des Forces républicaines
(FRCI), regroupant essentiellement les ex-rebelles qui tiennent le nord du
pays depuis 2002, avait acquis de plus en plus de consistance jusqu`à la
semaine dernière, la rapidité de leur avancée a créé une immense surprise.
"Ils préparaient ça depuis trois mois", déclare à l`AFP une source
militaire internationale. "Mais jusque-là, ils n`étaient pas prêts
politiquement", puisque l`heure était encore officiellement aux médiations
africaines, "ni militairement", ajoute-t-elle.
Une fois que courant mars la voie du dialogue a paru abandonnée et que les
FRCI se sont renforcées en hommes - elles compteraient à présent entre 5.000
et 10.000 combattants - et en armes, pour lesquelles le soutien du Burkina ou
du Nigeria est souvent évoqué, l`offensive a été lancée.
D`ouest en est, les Forces de défense et de sécurité (FDS) fidèles à M.
Gbagbo ont été mises en déroute. Et à l`exception de Duékoué, carrefour
stratégique de l`ouest, et de Daloa (centre-ouest), importante ville militaire
située en plein "pays bété", région natale du président sortant, elles ont
offert peu de résistance.
Dans la plupart des villes prises par le camp Ouattara, "les FDS ne
combattent pas vraiment", juge un diplomate africain à Abidjan. Des cas de
désertions, de redditions ou de ralliements sont aussi rapportés.
La bande sud contrôlée par le camp Gbagbo se réduisait au fil des heures,
avec en particulier la chute hautement symbolique, mercredi, de la capitale
politique Yamoussoukro.
"C`est allé beaucoup plus vite que ce que l`on pouvait imaginer", souligne
un expert militaire, qui invoque le "pourrissement" des dernières semaines,
notamment du fait de l`étouffement économique du pays.
Pour l`un de ses proches, Laurent Gbagbo n`est cependant "pas ébranlé ni
stressé".
Le "repli" militaire a été opéré car il s`agit de "ne pas dégarnir
Abidjan", explique cette source gouvernementale.
Selon elle, l`appel du camp Gbagbo à un cessez-le-feu et à des discussions
sous l`égide de l`UA est censé éviter une bataille d`Abidjan que chacun
envisage et redoute.
Elle pourrait en effet être sanglante dans une métropole qui compterait à
présent au moins quatre millions d`âmes après l`exode de centaines de milliers
d`habitants apeurés, et où les partisans des deux rivaux sont souvent voisins.
Le président sortant sait pouvoir compter sur des milliers de "jeunes
patriotes", ses ardents partisans qui ont tenu la rue au prix de violences,
notamment contre les Français, aux heures chaudes de la crise de 2002-2004, et
sur lesquels son armée compte désormais.
Mais l`issue est d`autant plus incertaine que la menace est déjà au coeur
de la capitale économique.
Le régime Gbagbo a perdu peu à peu, depuis la mi-février, la maîtrise d`une
partie d`Abidjan: les insurgés pro-Ouattara du "commando invisible", comptant
de nombreux ex-rebelles, contrôlent désormais largement les immenses quartiers
d`Abobo et d`Anyama, dans le nord.
"On espère qu`il n`y aura pas de bataille d`Abidjan, dit un diplomate
occidental. Ca voudrait dire qu`il n`y a plus d`autre option".

Par Thomas MORFIN

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