mercredi 8 août 2007 par Notre Voie

Le président du Front populaire ivoirien, l'ancien Premier ministre, Pascal Affi N'Guessan, parcourt en ce moment les hameaux du nouveau département de Prikro. Depuis cette ville, il apprécie l'absence de Bédié et Ouattara au bûcher de la paix et, aussi, livre le sens qu'il donne à la fête de l'indépendance, le 7 août prochain.
Notre Voie : Vous étiez à Bouaké au bûcher de la paix. Quel sens donnez-vous à cet événement ?
Pascal Affi N'Guessan : Le président de la République, M. Laurent Gbagbo, et le Premier ministre ont exprimé la volonté d'aller à la réunification du pays. Cette volonté a été matérialisée par le Premier ministre Guillaume Soro qui, dans son discours, a témoigné que les Forces Nouvelles sont engagées définitivement dans la restauration de l'autorité de l'Etat et de l'unité du pays. Il a invité les déplacés à regagner leur domicile. Je pense qu'il n'y a plus d'obstacle, il n'y a plus d'obstruction à la paix. C'est maintenant aux Ivoiriens d'accompagner le processus. Nous, en tant que parti politique, nous devons reprendre nos activités. Les populations ivoiriennes doivent retourner sans hésiter, sans atermoiement dans leurs localités d'origine. S'il y a cette dynamique, aucun problème, qu'il soit d'ordre militaire ou politique, ne peut freiner le processus. C'est vrai, il y a des étapes à parcourir pour que le pays retrouve sa normalité, mais je crois que les conditions sont réunies pour que nous parcourions ces étapes.
N.V. : Les deux têtes de l'opposition ivoirienne, Bédié et Ouattara, n'étaient pas à Bouaké. Votre commentaire ?
P.A.N. : Cela me conforte personnellement dans l'idée que ces personnalités sont dépassées. C'est la caractérisation et la matérialisation qu'ils sont hors-jeu, ces deux leaders de l'opposition. Ils ne représentent plus rien dans ce pays. Ils n'ont aucune perspective pour l'avenir du pays. Il faut donc explorer l'avenir sans se focaliser sur eux, sans regarder dans le rétroviseur. Il faut bâtir le pays avec ceux qui incarnent le présent et l'avenir. N.V. : Ne craignez-vous pas que leurs actions freinent le processus de paix?
P.A.N. : Oh, s'ils pouvaient, ils l'auraient déjà fait. Puisque leur absence à Bouaké était aussi de freiner le bûcher, mais vous avez vu le déferlement humain, la densité et l'émotion. La réussite même de cette cérémonie est la preuve qu'ils n'ont aucun moyen de bloquer le processus, de freiner la paix. Ils n'ont aucun pouvoir de bloquer la marche de la Côte d'Ivoire vers la paix.
N.V. : Quelles sont maintenant les priorités, selon vous, après le bûcher de la paix ?
P.A.N. : La priorité, c'est le redéploiement de l'administration sous-préfectorale, tous les services publics, les finances, la santé, l'éducation nationale, l'agriculture, le commerce, les eaux et forêts. Vous avez vu, la ville de Bouaké n'a pas encore retrouvé toute sa vitalité. Parce que les fonctionnaires ne sont pas encore partis. Il faut redéployer les 10.000 fonctionnaires déplacés, et ensuite les Forces de sécurité, puisque pour accompagner l'Etat, il faut qu'il y ait l'autorité publique, dont la gendarmerie et la police. Tout cela me paraît immédiatement nécessaire. Les discussions sont en cours pour les questions des grades et la réinsertion des combattants qui sont des questions qui sont en train de trouver une solution. Ces questions sont traitées parallèlement au redéploiement de l'administration. N.V. : Le Rassemblement des républicains (RDR) menace de semer des troubles relativement à la suppression du poste du haut représentant des Nations unies pour les élections. Comment appréhendez-vous ces menaces du parti d'Alassane Ouattara ?
P.A.N. : Les troubles à l'ordre public sont sanctionnés par la loi. Les obstructions au processus de paix sont sanctionnées par les Nations unies. Il appartiendra aux autorités concernées de prendre leurs responsabilités. N.V. : Ces derniers temps, on assiste au ralliement des militants de l'opposition au Front populaire ivoirien. Comment entendez-vous les gérer ?
P.A.N. : Nous allons les gérer comme nous gérons nos militants. Les recevoir dans nos structures de base, leur donner les connaissances sur la doctrine et l'organisation de notre parti. Et leur aménager les conditions les meilleures de participation à la vie du parti. C'est ce que nous allons faire et nous espérons qu'avec tout cet appui qui vient, de nombreux cadres ivoiriens qui, un moment, ont cru à la pertinence des projets présentés par nos adversaires de l'opposition, mais qui se sont rendus compte dans la pratique qu'ils s'étaient fourvoyés et qu'on leur a vendu des illusions et que l'avenir ne peut se trouver de l'autre côté vont rallier le FPI. Nous allons donc capitaliser cet appui pour remporter sans bavure les prochaines élections et pouvoir bâtir la politique de Refondation. N.V. : Comment ces ralliements ont été négociés? Puisque l'opposition parle de l'argent qui aurait été distribué à grande échelle à ces cadres ?
P.A.N. : Il faut inscrire cela dans la dynamique de l'évolution du combat entre le Front populaire et l'opposition. Cela arrive en ce moment parce qu'il a fallu une période de maturation de ce processus. Ce n'est pas une génération spontanée, ce n'est pas le fruit d'un achat de consciences. Cela aurait pu se faire en 2005, 2006. Ce n'est pas parce que Laurent Gbagbo et le FPI sont devenus particulièrement riches en 2007 pour faire ce qu'ils n'ont pu faire en 2005 ou en 2006. C'est parce que le processus est venu à partir d'une idée. Le processus qui a consisté pour ces cadres à observer, à espérer et à évaluer pour enfin se déterminer. Pendant longtemps, ces cadres ont fait confiance à des leaders politiques qui ont fait la profession des doctrines, des valeurs qu'ils voulaient incarner au sein de leur formation politique. Pendant longtemps, ces cadres ont été bernés on les a bercés d'illusions et, chemin faisant, ils ont commencé à avoir un regard critique du parcours politique de leurs leaders et ils sont arrivés à la conclusion, en 2007, qu'il fallait se réveiller. Ils refusent de se faire instrumentaliser et défendre les causes qui ne valaient pas la peine. Ils ont donc décidé, au moment où la Côte d'Ivoire aborde un virage important de son histoire avec l'Accord de Ouaga, de s'engager pour la République, pour la paix. Ils ont fait ce choix, parce qu'ils savent que ce moment est capital et interpelle chaque Ivoirien afin qu'il se détermine. N.V. : La fête de l'indépendance vous trouve à Prikro surtout au lendemain de la Flamme de la paix?. Quels sens lui-donnez-vous?
P.A.N. : La fête de l'indépendance, au lendemain de la Flamme de la paix?, doit être la fête de l'unité, la fête de l'unité retrouvée. Pour nous qui sommes à Prikro, nous allons faire la fête du 7 avril à Prikro pour prouver que chaque Ivoirien doit la faire là où il se trouve. Aller la faire à Abidjan serait perçu comme une injure par mes parents de Prikro. Nous traduisons à nos parents de Prikro que nous sommes avec eux au moment où la fête nous trouve chez eux. N.V. : N'est-ce pas un boycotte de ne pas être à Abidjan le 7 Août?
P.A.N. : Non !


Interview réalisée par Benjamin Koré

www.225.ci - A propos - Plan du site - Questions / Réponses © 2023