lundi 17 septembre 2007 par Fraternité Matin

La crise foncière ressurgit au moment où il est question de la construction du Sénat. Le 7 septembre dernier, le Président de la République, Laurent Gbagbo, a réaffirmé clairement son désir d'accroître le nombre de chantiers en cours de réalisation dans la capitale politique et administrative, Yamoussoukro. C'était lors de la visite qu'il a effectuée sur les chantiers de l'Assemblée nationale, du Palais présidentiel et des voiries sous la direction de l'architecte et urbaniste, Pierre Fakhoury et du DG du Bureau national d'études techniques et de développement (BNETD), Ahoua Don Mello. Pour se rendre compte de l'évolution des travaux et des problèmes y afférents. Il a donné, à cet effet, des instructions fermes à ses représentants, que sont le préfet de la région des Lacs et préfet du département de Yamoussouro, Nassa Dakouri et le gouverneur du District, Apollinaire N'Dri Koffi. A savoir qu'il fallait tout mettre en ?uvre pour que tous les problèmes liés au foncier soient recensés, traités et que des propositions lui soient soumises en vue de prendre des décisions. L'urgence vient de ce que l'architecte veut réaliser, à compter de janvier 2008, un autre grand édifice, le Sénat. La première réalisation du Président Gbagbo, élu en octobre 2000, est l'Hôtel des députés, en pleine crise, dans le cadre de la coopération ivoiro-chinoise. Les clefs de cet édifice de 300 chambres et de 10 suites ont été remises aux autorités ivoiriennes. Deux autres grands chantiers sont ouverts. Il s'agit de l'Assemblée nationale dont les travaux sont réalisés à 40%, selon le DG du BNETD, et du Palais présidentiel. A cela s'ajoutent la voirie et l'assainissement. Ils sont l'?uvre de l'entreprise PFO de Pierre Fakhoury. Cependant, en même temps que ces grands projets suscitent la joie chez les populations et les cadres, parce qu'ils créent des emplois pour les jeunes et alimentent l'économie locale et nationale, ils ne manquent pas d'inquiéter. Car, tous ces travaux demandent d'importantes superficies de terre et pourraient, de ce fait, emporter des villages riverains; notamment, Kpangbassou et Bezro. Sans compter les villages qui pourraient être sollicités comme site d'accueil. Kpangbassou est d'autant plus visé qu'il doit abriter le Sénat, contre la volonté des populations qui ne souhaitent pas partir de là. Mais au contraire, rêvent de cohabiter avec la zone administrative et politique, pour mieux profiter, selon elles, des retombées de cette modernisation. M. Yao Bossou, notable de ce village et agriculteur, n'a pas caché sa colère vis-à-vis de ce projet, lorsque nous l'avons rencontré à son domicile au lendemain de la visite du Président. Mettant même en cause le Plan directeur d'urbanisme parce qu'il aurait été modifié en 1997, soutient-il, contrairement aux v?ux de Houphouet-Boigny. Alors que le gouverneur de Yamoussoukro, N'Dri Koffi Apollinaire, s'attend à recevoir leurs propositions, comme convenu lors des différentes rencontres qu'ils ont eues en 2006, c'est plutôt lui qui est accusé de vouloir les déguerpir, sans raison valable. Face à ce qu'il qualifie de crise de confiance, notre interlocuteur a formé le v?u que la chefferie et la notabilité soient reçues par le Chef de l'Etat en personne, en vue d'engager des discussions. Il rejette l'idée selon laquelle son village serait concerné par le déguerpissement.
Là où le gouverneur pensait ne traduire que le rêve du Président Félix Houphouet-Boigny formalisé par la loi n° 83-242 du 21 mars 1983, rendue applicable par le décret n° 97-177 du 19 mars 1997 et effective par la première construction. Alors que des documents existent de ce qu'il y a eu des réunions sur la problématique du déguerpissement entre le gouverneur et les villageois mais aussi entre celui-ci et des particuliers ayant construit des maisons ou acquis des lots notamment Kpangbassou extension, les villageois semblent l'ignorer.
Dès lors, aucun résultat véritable n'a été obtenu depuis le début des négociations en 1996. En ce qui concerne Bezro, son chef, N'Gatta Kouassi, que nous avons également rencontré dans son village, dit attendre plutôt les propositions concrètes du gouvernement après les discours. Il déplore déjà le fait que la purge des droits portant sur les terres qui abritent l'Hôtel des députés n'a pas encore été réglée. Et voilà que l'Etat cherche encore à le déguerpir sans proposition de site. Le comble, selon lui, c'est d'y ériger un jardin?. Or, ni l'architecte ni le Chef de l'Etat ne conçoivent pas la zone administrative et politique sans ces 5 jardins (anglais, français, asiatique, arabe et africain). Un projet que Fakhoury baptise ??le musée de la nature''. Option : consensus sur le plan directeur. Un dialogue direct'' sur le Plan directeur d'urbanisme de 1997 en vue de trouver un consensus? Comme ce fut le cas de celui qui a abouti, le 4 mars dernier, à l'Accord politique de Ouagadougou. En tout cas, c'est le moins qu'on puisse souhaiter, au regard de la complexité, de la sensibilité et des enjeux qui se rattachent à ce projet millénaire, qui est devenu une réalité. C'est d'ailleurs, nous semble-t-il, le souhait de toutes les parties : les villageois qui désirent être reçus par le Président Gbagbo ou être visités par le gouverneur du District, le maire qui exige que les élus soient associés au processus, le gouverneur qui croyait avoir été compris et qui promet de reprendre son bâton de pèlerin. Pour dire qu'il ne reste plus qu'un facilitateur. Et cette mission incombe naturellement au ministre de la Réconciliation nationale et des Relations avec les institutions de qui dépend le projet. Dialoguer pour plusieurs raisons. D'abord, pour établir, d'une part, la confiance entre l'Etat et les populations riveraines qui refusent le déguerpissement et craignent une spoliation, et d'autre part, entre les autorités locales chargées du suivi des travaux. Ensuite, pour rappeler à toutes les parties certains principes. A savoir que le transfert de la capitale est désormais un processus irréversible et que cela nécessite des sacrifices. En précisant que la zone administrative et politique est le site réservé à la réalisation de tous les grands édifices publics, notamment le Palais présidentiel, le siège des institutions, les ministères et les ambassades, selon la vision du Président Houphouet-Boigny. Une zone qui représentera, durant au moins un siècle, le c?ur de l'Etat par la concentration de tous les pouvoirs: exécutif, législatif et judiciaire. Enfin, dialoguer pour qu'un compromis politique et populaire se dégage autour du Plan directeur d'urbanisme.
Rassurer les uns et les autres sur les éventuelles modifications ou non et leur impact. Comme certaines personnes le pensent, en faisant allusion à ??la ceinture verte'' ou ??le jardin''. Et dire si le Plan peut être adapté en tenant compte des contraintes actuelles. Préciser également les mesures compensatoires proposées par l'Etat. Dans pareil cas, qui peut s'attendre à une indemnisation et à partir de quelle date?
Parce qu'il est surprenant que les personnalités politiques et administratives, chargées de suivre les travaux du transfert de la capitale, n'aient pas la même lecture du plan. A l'heure de la reconstruction nationale, il faut éviter de décourager les investisseurs qui rêvent, comme les habitants de ce pays, à une nouvelle Côte d'Ivoire, moderne, prospère, belle et conquérante.
Focus/ Gnrangbé Kouacou (maire): Il faut proposer un site avant de déguerpir?. Le maire se félicite des actions menées par le Chef de l'Etat à la suite des Présidents Houphouet-Boigny et Bédié. Le Président Gbagbo est en train de faire sa part. Les populations en sont heureuses. Nous le félicitons. Mais il faut savoir qu'un pays ne se construit pas en 10, 20 ou 30 ans. Car, à cette joie que ressentent les populations de voir leur ville être érigée en capitale, se mêlent des appréhensions?, a affirmé M. Jean Kouacou Gnrangbé Kouadio, maire de Yamoussoukro, joint par téléphone. L'inquiétude vient de la grandeur des projets qui absorbent les terres. Les populations n'ont plus de terre; le Président Houphouet-Boigny ayant récupéré l'essentiel?. Et surtout après le projet de délimitation. Yamoussoukro n'a plus de terres après la délimitation des terroirs villageois. Chaque village dispose aujourd'hui de ses terres et pas en grande quantité. Je me demande donc sur quel site l'on pourra recaser Kpangbassou aujourd'hui? On ne peut pas non plus les chasser. Sur quel site vont-ils être logés et où pourront-ils cultiver? Il faut, par conséquent, apprécier le projet avec beaucoup de prudence?. Il reste réservé sur le projet de déguerpissement de Kpangbassou et de Bezro. Ce n'est pas du jour au lendemain que se fait un déguerpissement?, a-t-il fait observer. Tout en reconnaissant que la construction du Sénat est un est projet républicain?, il dément l'idée selon laquelle sa réalisation a été prévue sur le site de Kpangbassou dans le plan initial. Houphouet-Boigny n'a jamais prévu le déguerpissement de Kpangbassou. Il n'en a jamais été question?. Il considère donc que le Plan a été modifié. Et même là, le gouvernement doit pouvoir s'adapter. A supposer même qu'il ait été prévu, aujourd'hui, il faut faire face aux difficultés qui se posent. Et cela passe par l'explication du projet. Nous, élus, avons des problèmes pour convaincre les populations. Où sont les élus dans tout ça, c'est-à-dire le maire, les députés ?? Des projets antérieurs n'ont pas laissé de bons souvenirs. N'oubliez pas que le projet de déguerpissement pour la construction du barrage de Kossou n'a pas fait des heureux parce qu'il a été mal goupillé?, a-t-il ajouté. Avant de proposer: Il faut informer auparavant les populations sur le projet, leur proposer, ensuite, un site avant de penser à leur déguerpissement. Le Président Gbagbo a certes une vision, mais il ne faut pas oublier qu'on a en face des hommes qui ont leur point de vue à donner?. Le premier magistrat ne digère pas le fait qu'il ne soit pas au c?ur de l'action comme les autres acteurs. Le Président a donné des instructions au gouverneur et au préfet. Mais que fait-on du maire? Je pense qu'il faut rencontrer les populations, en associant les élus?, a-t-il dit.
Il n'exclut pas que l'Etat renonce à la construction du jardin pour permettre aux populations de vivre. Face aux lotissements et constructions qui sortent de terre, il affirme que les lots ont été acquis avant son arrivée en 2001 et que c'est maintenant que les acquéreurs ont les moyens de les mettre en valeur.
Mais il ne perd pas espoir qu'un compromis sera trouvé, grâce au ministre Dano Djédjé dont la méthode l'agrée. Je voudrais rendre hommage au ministre Dano Djédjé. Qui rencontre et implique, depuis son arrivée, tout le monde?, a soutenu le maire.
Paulin N. Zobo
Envoyé spécial à Yamoussoukro
Décret n° 97-177 du 19 mars 1997
Décret N° 97-177 du 19 mars 1997 portant approbation et déclaration d'utilité publique du périmètre du projet d'urbanisation de la ville de Yamoussoukro. Le Président de la République
Sur rapport conjoint du ministre du Logement, du Cadre de vie et de l'Environnement, du ministre des Infrastructures économiques,du ministre de l'Intérieur et de l'Intégration nationale, du ministre de l'Economie et des Finances et du ministre Résident du District autonome de Yamoussoukro. Vu la constitution; vu le décret du 29 septembre 1928 portant réglementation du domaine public et des servitudes d'utilité publique,ensemble les textes subséquents; vu le décret du 25 novembre 1930 portant réglementation de l'expropriation pour cause d' utilité publique et ensemble les textes subséquents; vu le décret N°96-PR/002 du 26 janvier 1996 portant nomination des membres du gouvernement tel que modifié par le décret n° 96-PR/10 du 10 août 1996; vu le décret N° 96-179 du 1er mars 1996 portant attributions des membres du gouvernement. Le Conseil des ministres entendu décrète :
Article 1er : est approuvé le plan directeur d'urbanisme de Yamoussoukro et est déclaré d'utilité publique, le périmètre d'aménagement de la ville de Yamoussoukro.
Article 2 : Le périmètre d'aménagement de la ville de Yamoussoukro comprend le projet d'urbanisation de la ville de Yamoussoukro d'une superficie de 27 000 hectares, l'emprise de la voie triomphale et la Zone industrielle de la ville de Yamoussoukro d'une superficie de 750 hectares.
Le projet d'urbanisation est limité: à l'Est par la route d'Abidjan et la route reliant Attiégouakro à Gourominankro, au Sud par la route de Daloa et la route d'Oumé, au Nord et à l'Ouest par la route de Daloa, l'aéroport et la route de Didiévi. L'emprise de la voie triomphale s'étend sur 60 (soixante) mètres de part et d'autre de l'axe de la route actuelle partant, de Kpangbassou à l'Est et traversant les quartiers N'Zuessi, Assabou et Morofê pour atteindre l'aéroport à l'Ouest, sur une longueur de 23 km.
La zone industrielle est située sur la route de Sinfra sur une longueur de 3 km à partir du carrefour du village d'Akpessékro et sur une largeur de 2,5 km en direction du même village.
Le périmètre d'une superficie totale de 27.750 hectares, objet de la présente déclaration d'utilité publique, est reporté et défini sur le plan annexé au présent décret. Article 3 : toutes transactions, toutes constructions nouvelles, tous travaux de nature à modifier l'état du sol sont interdits dans la zone du projet, sauf dérogations accordées par arrêté du ministre du
Logement, du Cadre de vie et de l'Environnement.
Les titres de propriété foncière portant sur les terrains situés à l'intérieur du projet, appartenant ou concédés à des tiers feront l'objet d'un retour au domaine de l'Etat moyennant indemnisation.
Article 4 : le ministre du Logement, du Cadre de vie et de l'Environnement, le ministre des Infrastructures économiques, le ministre de l'Intérieur et de l'Intégration nationale, le ministre de l'Economie et des Finances et le ministre Résident du District autonome de Yamoussoukro sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret qui sera publié au Journal Officiel de la République de Côte d'Ivoire. .
Fait à Abidjan, le 19 mars 1997
Henri Konan BEDIE
P. le Secrétaire général du Gouvernement
F.TYEOULOU-DYELA

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