mercredi 10 octobre 2007 par Le Nouveau Réveil

Il faut bien croire que les multiples rencontres d'explication, de concertation et surtout l'importante séance de travail qui s'est tenue samedi dernier en présence du 1er ministre Guillaume Soro n'ont pas permis d'évacuer la colère et les frustrations dont les membres du corps préfectoral à redéployer dans les zones CNO estiment être l'objet. Certains parmi eux se désignant comme des laisser pour compte se sont confiés à nous.
Ils en ont gros sur le c?ur mais la première chose qu'ils ont tenu à faire savoir c'est qu'ils ne sont pas opposés aux audiences foraines, au redéploiement général de l'administration sur tout le territoire encore moins au processus de sortie de crise. Ce qu'ils dénoncent ce sont les "frustrations et les humiliations inacceptables" auxquels ils disent être soumis depuis l'éclatement de la crise. "Le corps préfectoral, expliquent-ils, c'est le reflet de l'Etat au plan interne, dans les localités où nous exerçons. C'est cela la noblesse de notre statut. Nous sommes un peu comme les ambassadeurs de l'Etat à l'étranger. Nous sommes astreints à résidence de manière permanente, pas de week-end, pas d'autres activités, même nos congés sont le plus souvent fractionnés par tranche de 10,15 jours pour ne pas perturber le fonctionnement régulier de l'administration" relèvent-ils.
Mais pour ces énormes sacrifices et pour cette grande responsabilité, les préfets disent ne pas avoir de l'Etat toute la considération qui sied à leur statut. Ils expliquent lorsque la guerre a été éclatée, ils étaient les premières cibles des rebelles au même titre que les agents des forces de l'ordre, ils ont été obligés de fuir, laissant tout derrière eux. A Abidjan, ils ont vécu dans l'indifférence totale de l'Etat, pas la moindre assistance financière ni psychologique. Pis le salaire qui leur était versé, soulignent-ils, ne leur permettaient pas de louer une maison décente capable de contenir tous les membres de leur famille. "On ne compte plus les couples qui se sont brisés du fait de cette situation qui nous obligeait à vivre éloignés de nos épouses et de nos enfants. Comme effet direct de la crise, l'ancien sous-préfet de Sirasso Oulaï Gouzibo Théodore, qui a été détenu en captivité par les rebelles pendant de longs mois est mort seulement une semaine après sa libération en 2005. C'est au cours d'un séminaire du corps préfectoral que la douloureuse nouvelle nous a été annoncée. Et c'est nous du corps qui avons cotisé pour ses frais funéraires. Aujourd'hui, on ne sait même pas comment vit sa famille. Pour un tel homme mort dans l'exercice de ses fonctions, on aurait dû faire de ses enfants des pupilles de la nation mais hélas" regrette-t-ils avant de citer un autre cas dramatique. Celui de l'ancien sous-préfet de Worofla Ba Robert dont le foyer a été brisé à cause de ses difficultés à joindre les deux bouts de déplacé de guerre. Le pauvre a eu une attaque cardiaque, a fait une hémiplégie et est mort. Lui aussi dans l'indifférence totale. Il en va de même pour le Secrétaire général de préfecture de Korhogo Yahiri Gui Richard décédé il y a 6 mois environ.
La goutte d'eau qui
Ce qui choque davantage les responsables du corps préfectoral, c'est la grosse dans laquelle certains ont été sans raison consignés par l'Etat. En effet parce qu'ils avaient tout perdu en fuyant la guerre, l'Etats à travers l'ex Premier ministre Charles Konan Banny, avait décidé de les aider dans le cadre du redéploiement de l'administration en mettant à leur disposition un kit de retour. Le montant de ce kit variait entre 6 millions de francs pour les préfets et 5 millions pour les sous-préfet et les secrétaires généraux de préfecture. Mais on ne sait trop pour quelle raison 75 des 169 officiers de préfecture concernés ont été extraits de la liste des ayants droit de ce kit.
Avec l'avènement de Guillaume Soro, ces laissés-pour-compte avaient légitiment espéré que cette grave injustice serait réparée, d'autant plus que l'ex chef de la rébellion affirmait avoir pris les armes pour combattre les injustices. Mais que non. Les même 75 laissés-pour-compte ont été encore oubliés. Certains parmi eux seront redéployés en zone gouvernementale sans kit, alors qu'ils n'ont même pas de tenue de commandement. C'est une ségrégation inacceptable. Pour eux, il n'y aura aucune assistance de la part de l'Etat. Ils doivent juste se débrouiller avec leurs maigres salaires, faire face touts seuls aux dettes qu'ils ont dû contracter pour survivre pendant les 5 années de disette, scolariser leurs enfants. Astreints à une obligation de réserve très stricte, les préfets et sous-préfets n'ont pas de syndicat, ils ne peuvent se mettre en grève. Qui va donc crier et pleurer pour eux ?
Akwaba Saint Clair

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