jeudi 11 octobre 2007 par Fraternité Matin

Le leader des jeunes patriotes donne les raisons du 2e report de la fête de la résistance pour la paix à Gagnoa.

Après avoir été reportée au 12 et 13, la Fête de la résistance pour la paix a encore été reportée au 19 et 20 octobre. Qu'est-ce qui explique ce deuxième report?

Vous me donnez l'occasion de revenir sur les objectifs de cette fête. C'est une fête de la résistance pour la paix. Comprenez qu'ensemble, nous qui nous regardions hier comme des adversaires, voire des ennemis, nous allons faire bloc aujourd'hui autour d'un concept qui est la paix. Nous combattons donc pour la protéger ensemble. Nous posons des actes publics pour protéger cette paix. On a donc besoin de tout le monde pour la gagner. On n'organise pas une fête de la paix pour diviser. On n'organise pas une fête de la paix pour exclure. Ainsi, les élus, les cadres et les chefs coutumiers de la région du Fromager qui accueillent cette cérémonie, se sont réunis, nous ont appelé et ont proposé d'être impliqués davantage dans l'organisation de la fête. Ils ont indiqué qu'ils ont besoin d'un petit moment pour le faire. Ils ont dit à l'Alliance que certes son leader invite son ami Guillaume Soro, mais c'est avant tout le Premier ministre. Ils ont estimé que c'est une autorité qu'il faut donc recevoir avec tout ce que cela comporte. La deuxième raison du report est que les 12 et 13, se tient une réunion du Comité d'évaluation et d'accompagnement (CEA) à Ouagadougou, à laquelle le Premier ministre Soro sera. Or, c'est lui notre invité spécial. Il nous a donc adressé une note où il nous a demandé de revoir les dates des 12 et 13 qui avaient été retenues. Voilà pourquoi nous avons reporté la fête au 19 et 20 octobre. Quel sera le contenu de la fête?
Le 12 octobre, un match de football va opposer l'équipe des Jeunes Patriotes et des jeunes des Forces nouvelles à celle de Mama. L'équipe des Jeunes Patriotes et des jeunes des Forces nouvelles exprime la réunification de la Côte d'Ivoire. Nous allons jouer contre des jeunes de Ouragahio, Mama et autres.
L'apothéose, le samedi 13, ce sera l'arrivée du Premier ministre. Puis il prendra le déjeuner à la résidence du Chef de l'Etat à Gagnoa ou à Mama. Mais nous préférons que ce soit à Mama qui est le village du Président Gbagbo. Puis dans l'après-midi, au stade Biaka Boda, auront lieu les discours politiques. La fête finira par la danse parce que nous sommes contents. Nous sommes contents que notre pays ait retrouvé la paix. Nous sommes contents que les voisins se retrouvent aujourd'hui. Nous sommes contents de constater que rien de fondamental ne nous divisait en réalité. Nous allons danser jusqu'à l'aube. Est-ce que les jeunes des partis d'opposition comme ceux du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) sont conviés à la fête?
Tout le monde sera invité. On ne peut pas aller à la paix et exclure des personnes. D'ailleurs vous me donnez l'occasion de répondre au grand frère Alpha Blondy qui m'a interpellé dans la presse sur la question. Je ne suis pas d'accord avec cette interpellation. D'autant qu'il a mon numéro de téléphone et j'ai le sien. Je pense que s'il a des choses à me proposer ou à me reprocher, il doit m'appeler et j'irai l'écouter. Il n'a pas besoin de le faire sur la place publique. Mais je voudrais le rassurer que tout le monde sera invité à la fête. J'attends les jeunes du RHDP à Gagnoa. Mais je voudrais aussi ajouter que je n'ai aucun moyen de contraindre des invités à assister à la fête. Aucun. Je précise seulement que mon souhait est que tout le monde vienne. Mais ensemble on constatera et on fera le bilan. Soupçonnez-vous déjà des absences?
Non, pas forcément. Quand on organise une fête, surtout de ce genre, on souhaite que tous les invités y viennent. Mais certains peuvent ne pas venir. En tout état de cause, je voudrais inviter la population de la Côte d'Ivoire à traduire la paix dans son comportement de tous les jours. Je souhaite que les valeurs d'amour, de fraternité, de solidarité et de paix soient le socle pour mettre fin à cette crise et qu'on regarde l'avenir avec beaucoup plus de sérénité. Président, comment définissez-vous la plate-forme interactive d'échanges et de paix que vous avez lancée il y a une semaine?
Comme son nom l'indique, la plate-forme est un espace d'échanges, de retrouvailles autour d'une valeur qui doit rapprocher les Ivoiriens, qui doit être la culture des Ivoiriens : la paix. Ainsi, la plate-forme est un carrefour de propositions. Je parle de carrefour parce que c'est là où les différences se croisent pour se positiver. Elle est un appui pour demain, c'est la culture de la paix, la culture ivoirienne. Elle prépare donc le pays pour les générations futures parce qu'elle veut faire de la paix le socle, le sous jasement de la société ivoirienne de demain.
Une semaine après son lancement comment a-t-elle été accueillie par les Ivoiriens?
Je puis dire positivement. Positivement parce qu'en moyenne aujourd'hui, nous avons 200 à 250 inscrits par jour. C'est pour vous dire que les Ivoiriens s'y intéressent vraiment, surtout que nous n'avons commencé la bataille médiatique qu'il y a 3 ou 4 jours. Je pense que les Ivoiriens ont bien accueilli la plate-forme mais nous ne sommes pas de ceux qui versent dans l'auto-satisfecit. Nous voulons encore la booster pour qu'enfin on puisse créer cette grande famille qui regroupe ceux qui veulent la paix en Côte d'Ivoire. Comment ceux dont vous parlez s'inscrivent-ils?
Ils envoient un message de paix, au numéro qui est le matricule de la paix, c'est-à-dire le 98121. Dès qu'ils envoient un message de paix, ils apparaissent sur notre système. Ainsi, ils reçoivent en retour une réponse qui les informe de ce qu'ils sont désormais membres de la plate-forme. Nous attendons un mois pour faire le bilan à mi-parcours et les réunir pour qu'ils puissent se connaître parce que pour nous, ils doivent être les soldats de la paix. Ils doivent être les hussards de la paix. Ils vont aller de concession en concession pour prêcher la paix. Nous sommes donc en train de constituer cette équipe-là que nous allons mettre en mission bientôt. Au lancement de la plate-forme, vous avez dit qu'il y aura des comités dans les grandes localités?
Tout a fait. Nous avons pour objectif d'investir toute la Côte d'Ivoire. D'investir dans les communes, les sous-quartiers, dans les villes, les villages des comités de paix qui seraient un genre de groupes qui sont en mission de concession en concession, de cour en cour, de maison en maison, de quartier en quartier pour prêcher la paix. Pour dire aux Ivoiriens que la culture que nous devons avoir ici, qui peut permettre à notre pays de faire un bond en avant, qui peut permettre de savoir que le voisin n'est pas un ennemi, qui peut permettre que celui qui est en face peut être d'une idéologie différente de la tienne, mais c'est ton frère, c'est de la paix. Voilà l'objectif. Nous allons donc former ces groupes-là et les mettre en mission. Voyez-vous, nous avons innové en dehors de nos mouvements classiques qu'on a l'habitude de voir. Nous voulons que les Ivoiriens nous rejoignent dans cette plate-forme pour qu'ensemble nous puissions pousser le pays à aller définitivement à la paix, pour que nous puissions convaincre ceux qui hésitent encore à accepter la paix. Que disent les messages qu'on vous envoie?
La plupart de ce qui revient c'est, entre autres : Paix et amour sur mon pays ; Je veux la paix pour mon pays ; Je vous encourage pour la paix. Il y en a qui nous demandent, aussi : Croyez-vous en la sincérité des Forces nouvelles ? A ceux-là, je réponds ceci : Je veux d'abord croire en votre sincérité, ensuite par rapport à notre sincérité, les autres qui sont en face seront sincères. En fait, chacun a une préoccupation mais ça nous permet de savoir l'état d'esprit des Ivoiriens, l'appréciation qu'ils ont par rapport à ce processus de paix. Vous le savez, quand on va dans les meetings, c'est ouvert, on finit de parler, on part. Mais avec la plate-forme, ils sont seuls devant leur portable et ils s'expriment. Nous avons donc là l'occasion de savoir réellement ce que chacun pense. Déclinent-ils leur identité ou le font-ils de manière anonyme ?
Il y en a beaucoup qui déclinent leur identité. Mais qu'ils signent ou non, dès l'instant où nous avons leur numéro de téléphone portable, je pense qu'au fil du temps, ils vont se découvrir. Il y en a qui signent de leur nom en mettant leur localité.
Le 15 novembre est consacré à la paix en Côte d'Ivoire. Que peut-on attendre de la plate-forme ce jour?
Le 15 novembre, qui est la Journée nationale de la paix en Côte d'Ivoire, nous servira de prétexte pour organiser un grand déjeuner sous le parrainage de cet homme de paix, cet homme de justice, cet homme qui a tant démontré qu'il aime ce pays : le président du Conseil économique et social, le père du sursaut national, Laurent Dona-Fologo. Sous la présidence du ministre de la Réconciliation nationale, nous allons organiser ce déjeuner-là, que nous allons dénommer Le Déjeuner de la paix. Et ce jour-là, nous allons choisir parmi ceux qui se sont inscrits dans la Plate-forme (parce que nous ne pourrons pas recevoir tous ces milliers d'Ivoiriens mais nous allons peut être recevoir entre 500 et 1000 personnes) pour leur offrir ce déjeuner-là. Et au cours de ce repas, nous allons récompenser celui qui aura envoyé le plus beau message de paix. Nous en profiterons pour décerner des cartes qui donneront à certains le titre de Citoyen de la paix. Il y aura aussi une carte de membre parce que quand quelqu'un envoie un message, il devient automatiquement membre de la grande famille de la paix. Mais quand il envoie au moins 10 messages, il a une carte qui fait de lui un citoyen de la paix. Et c'est parmi les citoyens de la paix que nous allons choisir ceux que nous allons envoyer en mission. Mais ils auront droit également à rencontrer d'autres personnalités de la paix. Et nous allons les prendre comme un échantillon que nous allons former à la culture de la paix, à la culture de la non violence, à la culture du dialogue en collaboration avec une ONG de la place. Afin que ceux-là, une fois formés, puissent être comme des formateurs pour former les autres membres de la grande famille de la paix. Voilà ce que nous envisageons de faire. Quels sont les membres du jury choisis pour déceler le plus beau message?
C'est Leader's Team Associated (la société initiatrice de la Plate-forme et dont Charles Blé Goudé est le directeur général. Ndlr). Vous ne pouvez pas me dénier la capacité de différencier un message de paix d'un autre message que j'estime être un bon message de paix. On va lire les messages d'au moins 100 ou 200 personnes qui auront envoyé des messages, on pourra lire des messages et choisir le plus beau ou alors le jour même du déjeuner, on pourra les lire et le jury qui sera ceux-là, mêmes qui sont avec nous au cours du déjeuner pour que cela ne s'apparente pas à du copinage. Devant eux, on peut lire au moins 10, 15 ou 20 messages et leur demander de choisir le meilleur et le public choisira. Le Premier ministre Guillaume Soro a assisté en personne au lancement de cette plate-forme. Comment avez-vous ressenti sa présence?
Au lancement de la Plate-forme, c'est vrai que j'ai invité le Premier ministre. Mais j'ai invité d'abord un ami, un frère, un camarade de lutte avec qui j'estime, nous sommes en train de mener un autre combat. Qui pour moi est le vrai combat : le combat contre la pauvreté, le combat contre la division, donc le combat de la paix. C'est cette paix-là qui pourra permettre à notre pays d'embarquer dans le bateau du développement. C'est pourquoi nous l'avons invité. Et il faut le dire, nous avons été heureux de retrouver ainsi officiellement notre camarade, nous avons été heureux que le Premier ministre vienne honorer de sa présence, rehausser cette cérémonie. Qu'il vienne à partir de là démontrer qu'il est vraiment attaché à la paix. Parce qu'il n'est pas venu à n'importe quelle cérémonie, c'est une cérémonie qui lance la Plate-forme qui est un espace d'échanges pour la paix. Nous n'avons pas boudé notre plaisir pour montrer qu'au niveau de notre génération, quelles que soient les contingences, nous savons faire preuve de dépassement. Voir Guillaume Soro et Blé Goudé ensemble, ça surprend plus d'un, mais nous l'avons fait pour notre pays.
Ce jour-là, le Premier ministre dont vous dites qu'il est votre ami, camarade de lutte, a dit que vous êtes son soldat.
(Rires. Ndlr). Je pense qu'il a dû ironiser pour détendre l'atmosphère, pour rappeler les vieux liens que nous avons eus parce qu'il ne faut pas l'oublier j'ai été son secrétaire à l'organisation à la FESCI. Mais vous savez aussi que le soldat tient le général. Ce sont les soldats qui deviennent plus tard des généraux. C'est pour reconnaître que j'étais parmi ceux qui l'ont fait. Un général tout seul n'est rien. Je pense que c'est un honneur pour moi que le Premier ministre puisse reconnaître que j'ai été son soldat. Nous avons fait beaucoup de choses ensemble. Moi, je ne le nie pas. Un secrétaire à l'organisation, c'est un homme de confiance. C'est l'homme à tout faire. Et moi quand je sers quelqu'un, je le sers avec loyauté. Je l'ai fait avec Soro à la FESCI. Je pense qu'il ne faut pas dramatiser cette histoire de soldat. Il l'a dit et il était content que nous soyons tous là. Il a dit qu'il est content de retrouver certains visages. Il fallait créer cette occasion pour qu'il retrouve ces visages. C'est mon devoir pour notre pays. Soro et moi, notre amitié doit servir à décanter certaines situations.

Interview réalisée par Pascal Soro
(coll : DC Stagiaire)

www.225.ci - A propos - Plan du site - Questions / Réponses © 2023