mercredi 17 octobre 2007 par Notre Voie

Le ministre Alphonse Douati est le directeur de campagne du candidat Laurent Gbagbo dans le département de Biankouma. Après cinq ans d'absence sur les terres de ses parents pour cause de la crise politico-militaire, il a repris contact avec le terrain, il y a quelques semaines, à la faveur d'un meeting géant. Dans cet entretien, celui qui va défendre l'étandard du chef de l'Etat à Biankouma, fait le bilan de son come back et affiche son optimisme quant au triomphe de son champion à la prochaine présidentielle.

Notre Voie : Vous n'étiez pas revenu à Biankouma depuis cinq ans. A la faveur de la cérémonie de retrouvailles que vous avez organisés récemment, vous avez fait votre retour chez vous. Quel bilan faites-vous de ce come-back ?

Alphonse Douati : effectivement, depuis juillet 2002, nous n'avions plus mis les pieds dans le département de Biankouma. C'est vrai qu'il y a eu à la faveur de la visite du premier ministre Banny, une brève apparition qui a duré juste le temps de la visite. Nous sommes partis cette fois ci, véritablement rendre visite aux parents. Mais il est important de dire que s'il est vrai que pendant cinq ans, je n'y étais pas allé, j'ai gardé le contact avec mes parents. Soit par des visites qu'ils nous rendaient, soit à la faveur des visites des populations de l'ouest au président de la république. Nous avons aussi échangé avec eux, au téléphone pour ceux qui étaient en ville, à travers des messagers, en tout cas, d'une manière ou d'une autre, nous étions en contact. Mais c'est la dernière visite qui nous a véritablement permis de nous rendre compte de la vie de nos parents. Pour ce qui est du bilan, je peux dire que les parents étaient contents de nous revoir. Je peux dire aussi que les parents ont véritablement souffert de la guerre. J'ai vu une population meurtrie, en difficulté, qui souffre. Malgré tout, j'ai vu une population qui est demeurée digne. En ce sens que les valeurs fondamentales comme la solidarité, le respect de l'honneur ont été conservées par nos parents. J'ai vu aussi que nos parents ont développer une très grande capacité d'écoute. Beaucoup de message leur sont parvenus, ils ont bien écouté tous les messagers et ils ont forgé leur réaction en fonction des différents messages. Pour moi, la mobilisation que j'ai observée n'est rien d'autre que l'expression d'un message à mon égard, moi leur fils, mais aussi à l'égard de l'idéal que je représente et que je véhicule. C'est le moment peut-être de m'excuser auprès de mes parents pour n'avoir pas été suffisamment patient pour attendre tous ceux qui venaient, même après la fête, pour nous rencontrer. Je leur dis que ce n'est que parti remise. C'est à nous d'aller vers eux, maintenant que la voie est ouverte. Pour moi, le bilan est positif dans la mesure où l'objectif qui était de communiquer avec les parents, de connaître leurs sentiments profonds, a été atteint. Mais, au-delà, j'ai bien perçu le message des parents. En substance, ils ont dit que nous sommes dans un contexte politique où chacun doit savoir où se trouve son intérêt. Sur l'échiquier politique en Côte d'Ivoire aujourd'hui, il y a plusieurs personnalités. Nos parents ont exprimé clairement que leur intérêt ne peut être géré de façon correcte que par le président Gbagbo. De façon publique, j'ai posé la question. En faisant l'analyse politique de la Côte d'Ivoire, les populations de Biankouma me disent que leur choix, pour leur intérêt, c'est le président Laurent Gbagbo.

NV : Après ce retour triomphal, on est tenté de se demander quelles seront vos prochaines actions, de sorte à maintenir cette confiance que vous même avez remarquée de la part des populations.
A.D. : Je vous remercie du constat que vous faites vous-mêmes en disant que ce retour a été triomphal. C`est aussi mon sentiment si ce triomphalisme signifie l`enthousiasme, la mobilisation et aussi la profondeur des messages. J`ai dit qu`après cette première visite, nous allons maintenir le contact avec nos parents. Donc, nous avons en projet des visites régulières aux parents pour aller discuter avec chaque entité parce que nous avons quatorze entités bien distinctes. Et nous irons discuter avec chaque entité pour toucher du doigt leurs problèmes, apporter des solutions que nous pouvons apporter sur place. Là où nous ne pouvons pas apporter des solutions, les recueillir et les transmettre au président de la République envers qui ils ont déjà exprimé leur confiance. Mais à Biankouma, j`ai dit que nous allons tenir un forum de la jeunesse. Ce forum-là, il sera tenu. Je crois que de par mon métier de vétérinaire, j`ai travaillé sur du concret. Ce jour-là, il ne sera pas question de résolutions livresques que nous allons prendre pour venir transmettre, comme ça, au président de la République. Nous donnerons des indications pratiques, à partir desquelles chaque jeune qui en manifeste le désir aura véritablement le nécessaire pour se prendre en charge. Donc, voilà les deux grandes actions pour les mois à venir : l`organisation du forum de la jeunesse de Biankouma et puis les visites aux parents. J`avais annoncé une action qui est déjà en cours, c`est-à-dire la prise en main de la santé de la population. C`est à ce titre que des spécialistes de la santé ont sillonné la région et ont fait part de la souffrance physique de nos parents. Le bloc opératoire est en réhabilitation. Celle du programme d`opération ou d`intervention chirurgicale aura également lieu dans les jours à venir. Mais nous n`allons pas rester là. Pour l`aspect sanitaire, nous allons organiser des équipes de médecins volontaires, d`infirmiers et même de certains de nos amis, pharmaciens qui voudraient bien nous aider et que nous connaissons déjà pour, vraiment, aller faire quelques petites consultations dans les villages, là où il y a des centres de santé. C`est pour montrer à nos parents que nous sommes sensibles à leurs douleurs. Maintenant, en dehors de ça, nous, en tant que membres du gouvernement, nous attirerons l`attention de nos différents collègues sur les nécessités qui sont les nôtres à Biankouma et là, où il s`agira des contributions de la population, nous organiserons nos frères et nos cadres de Biankouma pour que nous puissions donner cette contribution pour que l`Etat puisse faire ce qu`il a à faire. Nous sommes vraiment parti dans le sens d`une aide vraiment pratique au bien-être de nos parents. C`est pourquoi, j`ai dit que ce qui s`est passé ces jours-là, n`est que le début d`une action de longue haleine et d`une action en profondeur et d`une action concrète qui est partie.

N.V. : Vous avez dit, ce jour-là qu`il n`y a pas de raisons que Biankouma, votre département, reste dans les querelles. Je voudrais rappeler que vous teniez ces propos-là deux jours seulement après la bagarre que l`UDPCI et Franck Guéi ont eue dans la même région où on a failli en venir à l`affrontement. Comment comptez-vous y prendre pour ramener la paix, pour ramener la réconciliation réelle et inscrire le département de Biankouma dans le processus général de paix dans lequel se trouve la Côte d`Ivoire aujourd`hui?
A..D. : Mais je pense que la première action, c`est d`abord de leur dire qu e le pays a retrouvé la paix, que le pays est sur la voie. Nous devons leur expliquer les raisons profondes qui ont fait que le président Laurent Gbagbo a choisi comme Premier ministre Soro Guillaume. Et leur dire que cela a contribué fortement à l`avènement de la paix dans notre région. Maintenant vous évoquiez les situations entre les fils et filles de Biankouma. Je ne me crois pas autorisé de porter des jugements sur la ligne des autres ; ma ligne, c`est véritablement de leur présenter le langage de la paix, le langage du développement. On ne peut pas vouloir les routes, les pistes et se faire palabre. C`est vrai, mon meeting est intervenu après plusieurs autres meetings à Biankouma. Mais, je n`ai particulièrement pas lié mon message à celui-là ; mon message est fondé sur le fait que je suis convaincu que le bonheur de nos parents est vraiment dans la voie de la paix, un langage apaisé. Mais ce bonheur se trouve aussi dans les propositions concrètes, dans les actions que nous allons mener. Nous sommes tous des cadres. Chacun a ses contacts, selon sa position hiérarchique, il faut que les parents apprécient qu`à partir de nos positions, nous leur avons apporter ce dont ils ont besoin. Je le dis clairement, moi je ne suis pas dans les querelles. Je ne suis pas dans les palabres. A ne pas confondre avec la lutte légitime pour la conquête du pouvoir. Et mettre ce pouvoir à la disposition du parti ou de la personne qu`on estime capable de faire évoluer nos parents. Moi, je mène ce combat pour la paix. Pour le développement, parce que je sais que mon parti et le président Laurent Gbagbo ont un programme dans le cadre de la paix, peut aider fortement nos parents.

N.V. : Vous convenez avec nous que c`est dans le cadre de la recherche de ce pouvoir que la rébellion a éclaté en Côte d`Ivoire ? Nous avons vécu plus ou moins indirectement quelques tensions, des gens sont venus démolir un podium, tout et tout dans un esprit qui n`est quand même pas apaisé. Est-ce qu`aujourd`hui, en vous rendant là-bas, et promettant même d`être régulièrement sur le terrain, vous vous sentez vraiment en sécurité dans votre région ?
A..D. : Non, il faut faire la part des choses. Il y a un programme de sécurisation du pays. Il concerne aussi notre région. Et, lorsque nous nous rendons dans la région, nous prenons les mesures qui sont liées au contexte général. Mais il ne faut pas noyer cette situation. Cela ou la lier aux querelles intestines à l`intérieur du département. Vis-à-vis des parents, nous sommes très en sécurité. Par rapport à la situation nationale, lorsqu`on veut faire ce genre de déplacement, on prend des mesures pour que la sécurité se passe bien . Et les manifestations qui se sont déroulées dernièrement à Biankouma se sont déroulées dans un climat de sécurité. Donc la gestion de la sécurité sur le plan national est générale. Je suis convaincu que cette sécurité ira de mieux en mieux. Maintenant, vous avez fait allusion à un problème de podium. Moi, je n`étais pas sur place mais lorsque j`ai décidé de faire cette adresse à mes parents, j`ai prévu qu`un podium soit dressé. Donc je peux comprendre que, comme il y a eu des manifestations avant nous, que d`autres n'aient pas encore démonté leur podium pour celui qui dit qu`il n`aime pas les palabres, il va avec son podium et il demande aux frères de prendre calmement leur prodium pour qu`il puisse dresser le sien. Je crois que c`est ce qui a été fait. C`est même un élément qui montre que chacun a son patrimoine, et chacun le gère pour le bien être de nos parents. Mais véritablement je ne donne pas de signification particulière à cette situation.

N.V. : Biankouma est un lieu symbolique. C'est le département d'origine de feu le général Robert Guéi. Pensez-vous que la mobilisation que vous aviez à Biankouma est le signe que le vent est en train de tourner à Biankouma ? Est-ce que cela vous rend optimiste par rapport à la mission de directeur de campagne que vous êtes en train d'accomplir à Biankouma ?
A..D. : La mission a montré au moins une chose. Une communication profonde s`est établie. A moi maintenant de tirer cette communication dans le sens positif. Mais, je crois que le message était aussi clair de ce point de vue. Et vous savez que ce genre de réunion a un aspect publique et après un aspect en privé. Les deux aspects se sont superposés. Comme je l`ai dit, tout à l`heure, nos parents définissent leurs intérêts comme ne pouvant être mieux gérés que par Laurent Gbagbo. A partir de ce moment-là, je prends cette situation comme étant déjà un postulat. Et j`avance sur ce terrain. On ne me posera plus de question sur ce sujet. Je dis à nos parents qu'Alphonse Douati, mouvance présidentielle, FPI sont les prénoms de Laurent Gbagbo. Ça nous donne vraiment une position sur laquelle je pense que nous devons travailler pour faire avancer notre région.

N.V. : Vous avez déjà déclaré à Biankouma et vous venez de le dire, que vous avez avancé le chiffre de 90% pour le président Gbagbo. Mais ça peut paraître prétentieux pour une zone réputée être le fief du candidat de l`UDPCI où au niveau des élections, le score du FPI se trouvait généralement autour de 15 à 20% ? N`est-ce pas un peu trop fort ?
A..D. : Pour répondre à votre question, il faut prendre deux repères. Avant le coup d`Etat de 1999, c`est vrai, le FPI n`avait pas eu d`élus dans le département de Biankouma, mais le FPI n`avait pas non plus de président sur le plan national parce qu`à cette époque, on connaissait toutes les conditions dans lesquelles se déroulaient les élections. Mais les archives sont là et le FPI avait obtenu dans cette région des scores de 35 à 48% dans certaines circonscriptions comme Sipilou. C`est cela la réalité. Cela veut dire que le parti avait un véritable sous-bassement. Et puis, par la suite, le score que vous donnez 15 à 20%, a été obtenu compte tenu de l`environnement politique qui avait changé. C`est le premier repère. Le second repère, ce que vous ne dites pas, c`est qu'avant, quand Douati lançait un appel, on connaissait aussi l`affluence qui n`était pas du tout une affluence confortable et puis aujourd`hui Douati informe ses parents et il n`y a plus de place possible dans la ville de Biankouma. Vous étiez sur les lieux, vous avez dû voir que l`affluence qui était très forte. Donc quelque chose est en train de bouger. Quelque chose de positif est en train de bouger, mais au-delà de cette situation, il y a le message que l`on me transmet et ceux que l'on reçoit à travers des symboles. Vous savez, 126 chefs de villages sur 130 étaient présents. Les chefs de village ne se déplacent pas inutilement. Quand ils sont hésitants, ils envoient des représentants. Mais eux-mêmes sont venus. Ils se sont exprimés. Ils ont donné le symbole de la bénédiction à celui qui doit effectivement faire la bénédiction lorsqu`une cérémonie se déroule sur la terre de Biankouma. C`est vrai, on n`a pas encore fait des élections, mais on travaille aussi selon les indicateurs, selon les signes. Ce sont là des signes assez forts pour dire qu'en ce qui concerne le président Gbagbo, 90%, c`est la base. Et puis, le fait est là, de tous ceux qui font la politique en Côte d`Ivoire ou du moins qui sont des prétendants sérieux pour les élections à venir, nos parents disent clairement que, quand ils regardent, c`est Gbagbo qui représente leurs intérêts et quand moi aussi je regarde. Cela me paraît tout à fait clair. Et je vais vous dire pourquoi. Le président Bédié montre tous les jours qu`il est rancunier. C`est suffisant pour comprendre que ceux de Biankouma pensent que ce n`est pas lui qui va faire leur bonheur. Et puis le président du RDR a eu trop de rapprochement supposé ou vrai avec la rébellion. Est-ce vrai ? Est-ce faux ?

N.V. : Il y a aussi le président de l`UDPCI que vous avez oublié ?
A..D. : Oui, mais vous savez la politique a des étapes. Il y a des étapes dans la politique. Je le dis pour ne pas aller plus loin. Il y a des étapes dans la politique et je pense que de 1990 à aujourd`hui, nous avons tous vécu en Côte d`Ivoire et nous savons tous que personne n`a franchi les étapes qu`il faut pour pouvoir arriver à atteindre certains niveaux.

N.V. : Seul le général Guéi, à travers les derniers résultats des élections, était présenté comme étant le leader de la région. Aujourd`hui, après lui, Alphonse Douaty ambitionne-t-il d`occuper sa place ?
A..D. : Je ne vais pas répondre à cette question pour respecter la mémoire de l`illustre personne que je respecte et dont vous avez parlé.

N.V. : Vous avez fait beaucoup de dons aux populations. Quinze b?ufs, et 13 millions sans compter la réfection du bloc opératoire de l'hôpital général. Est-ce qu`il y a une volonté de frapper les esprits à travers ces dons, j`allais dire un peu pharaoniques ou bien est-ce vraiment de générosité compte tenu de votre longue absence ?
A..D. : Je ne peux pas dire avec exactitude si c'est de la générosité. Mais je pense que pour ceux qui me connaissent, ils savent que là où je peux aider, j`aide. C`est une position morale que j`ai. Mais s`agissant des parents, voyez-vous, cinq ans, si j`économise 300.000 par mois, ça au moins je peux le faire ; 300.000 FCFA d`économie par mois en un an, ça me fait 3.600.000 FCFA. En cinq ans, ça me fait 18.000.000 FCFA. C`est le minimum que je peux faire pour mes parents que d`économiser 200.000 FCFA à 250.000 voire 300.000 FCFA par mois pour dire que le jour où on va se voir, je vais leur donner. Et c`est ce qui a été fait et c`est ce qui est possible. Et ça, c`est possible. C`est réalisable. Ça dépend de la priorité que chacun donne par rapport à ses avoirs. Moi, j`ai décidé de mettre de l`argent de côté tout les mois pour que le jour où il me sera possible d`aller dans ma région, je puisse donner cela à mes parents. C`est ce que j`ai fait.

N.V. : Doit-on s`attendre à voir le ministre Douati ailleurs dans la région, à Man, à Danané, à Logoualé,où la bataille politique s`annonce aussi difficile ?
A..D. : Nous sommes dans un cadre organisé où chacun a été responsabilisé par rapport à un département. C`est ce que je fait en travaillant dans le département de Biankouma. Mais n`empêche que mon parti à un moment donné, m`avait confié tout l`Ouest. Et j`ai fait le travail à travers toute la région. Quand on a été cette personne, on a toujours un devoir envers les autres. Et donc, si ce devoir-là m`appelle, je répondrai présent. Si des camarades ou des frères de Kouibli estiment que je peux leur être utile, je le ferai. Je ferai ce devoir à Danané, à Zouan-Hounien, à Logoualé, à Man, partout où le devoir de solidarité régionale m`appellera. Mais, même dans le Moyen Cavally. Il est arrivé des moments où des camarades, des frères de Toulépleu, de Guiglo nous ont sollicité peut-être, pas toujours de façon solennelle, pour telle ou telle tâche. Mais pour le moment, le FPI m`a dit "va en mission à Biankouma" . Je fais la mission en combinaison avec mes devoirs de fils de la région.

Entretient réalisé par Guillaume T. Gbato (coll. : Elisée Gonçalvès stagiaire)

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