mardi 27 novembre 2007 par Fraternité Matin

Tengréla, chef-lieu du département du même nom est distant d'environ 214 km de Korhogo, son chef-lieu de région. Ville calme, située à l'extrême nord du pays, elle est aussi la dernière localité de la région des Savanes à franchir, avant d'accéder au territoire malien. Tengréla ne s'était encore jamais sentie aussi isolée que durant ces cinq années de guerre, qui n'ont en réalité offert aucune alternative de déplacement à ses habitants, si ce n'est que de se réfugier au Mali voisin. Ce que certains d'entre eux n'ont pas hésité à faire. C'est dire combien de fois, cette ville alors coupée du reste du pays et qui avait par le passé eu beaucoup de mal à s'épanouir pleinement, aspirait tant à la fin de la guerre.
La population avait une folle envie de retrouver l'administration territoriale. J'ai trouvé à mon arrivée, des problèmes administratifs et de développement qui attendaient depuis cinq ans d'être résolus?, révèle le préfet M. Coulibaly Issa, qui y a officiellement pris fonction le 12 juillet dernier. En fait, les séquelles laissées par la guerre y sont tout aussi importantes et présentes dans tous les domaines d'activités. Le premier sentiment qui vous envahit lorsque vous parcourez les quartiers est celui de l'abandon quasi-total, suscité par la vue de la broussaille séchée par la canicule, ici et là. Un fait dont semble s'être depuis longtemps déjà accommodée la population et qui ne peut choquer que l'étranger qui arrive. La principale voie d'accès bitumée de la ville, garde encore un état relativement satisfaisant. Quelques boutiques ouvertes non loin du marché, lui-même toujours fonctionnel, entretiennent une certaine animation, au centre-ville. Après quoi, plus rien. La quasi-totalité des bâtiments administratifs restent fermés. Pas de banque ou même d'établissements de la micro finance. La préfecture, qui attend d'être réhabilitée, de même que la résidence du préfet, a perdu toutes ses archives, de sorte qu'il est mal aisé à ce jour pour M. Coulibaly Issa de vous présenter sa circonscription administrative, dans les moindres détails. Pour l'heure, c'est à l'église catholique du coin qu'il trouve gîte et bureau. L'hôpital général a besoin d'un relèvement du niveau de son plateau technique, notamment la mise en place d'un cabinet dentaire. Les centres de santé du département sont tous dépourvus d'infirmiers et de sages-femmes. Il y a également nécessité de renforcer le réseau électrique de cette ville, ainsi que les moyens permettant la fourniture régulière de l'eau perturbée par de fréquentes coupures. Récemment, dans le cadre des préparatifs de la visite du Chef de l'Etat, le ministre des Infrastructures économiques, M. Patrick Achi, est allé prendre la mesure de la gravité de ce problème et envisager les solutions appropriées. Le personnel enseignant qualifié fait aussi défaut, singulièrement dans le primaire où les besoins sont évalués à 100 instituteurs. Au regard de toutes ces entraves à son développement, la population de Tengréla s'est résolument inscrite dans le processus de sortie de crise, à travers l'Accord de Ouagadougou. Mieux, soutient le président du conseil général M. Koné Tiémoko la guerre est désormais morte dans les esprits à Tengréla.? Et cette affirmation résulte des nombreux contacts qu'il a eus avec sa population, qu'il classe parmi les plus éprouvées de ce conflit armé en Côte d'Ivoire. Dès lors, l'annonce de l'arrivée du Chef de l'Etat dans cette ville, quelques mois après le redéploiement de l'administration territoriale, apparaît comme un grand soulagement. Mais surtout, une preuve irréfutable de la fin effective de leur isolement. Au Président Gbagbo, pour l'accueil de qui elles entendent battre le record de la mobilisation dans la région des Savanes, les populations du département de Tengréla adresseront une doléance majeure : le bitumage de la piste de 116 km reliant leur ville à celle de Boundiali. Pas bien souvent carrossable, elle a longtemps contribué à l'isolement de la localité.
Pour le maire résident de Tengréla et son homologue de la commune de Kanakono, située à 24 km de là, c'est tout simplement l'espoir de voir les mairies rouvrir à la suite de cette visite d'Etat qui les anime fortement. Nos administrés sont impatients de recevoir le Chef de l'Etat qui vient ainsi leur dire que la guerre est finie et que toutes les administrations se remettront au travail progressivement, pour assurer leur épanouissement socio-économique?, indiquent très optimistes MM. Nabi Soumaïla Coulibaly et Sylla Adama, respectivement maire résident de Tengréla et maire de Kanakono.
Loin d'être invivable
Recevoir une affectation sur Tengréla paraissait, bien avant la guerre, pour nombre de fonctionnaires, comme l'application d'une mesure punitive à leur endroit. C'est dire combien les agents de l'Etat avait une bien mauvaise idée de cette localité, du fait de son éloignement d'Abidjan, la capitale économique, principal centre de toutes les grandes décisions des pouvoirs publics. Certes, de Tengréla à Abidjan, on avait, et l'on a aujourd'hui encore, toute la journée à passer en route à bord des moyens de transport en commun, singulièrement les cars. Mais le fait le plus redouté dans les déplacements à l'extérieur de cette ville frontalière est indubitablement, la piste de 116 km qui la relie à sa voisine de Boundiali. Il s'agit d'une route au relief généralement plat, peu rocailleux mais difficilement praticable après le passage de la moindre pluie. Une réalité qui vient en rajouter à l'éloignement de la ville et surtout amplifier la peur bleue que certains se font à l'idée d'y aller servir l'Etat de Côte d'Ivoire. Ces raisons ont été dominées par la guerre qui a fait partir la majorité des fonctionnaires qui s'y trouvaient. Et à ce jour, les uns et les autres se font encore prier pour y revenir, arguant le traumatisme que l'éclatement du conflit armé leur a causé et dont ils ont beaucoup de mal à se départir. Quant à ceux qui y reçoivent pour la première fois leur affectation, la seule situation géographique de la ville par rapport à Abidjan les rebute, au point qu'ils n'hésitent pas à faire des pieds et des mains, pour ne pas y aller. Pourtant, à en croire le préfet du département, Tengréla est loin d'être invivable. Sa population est même réputée pour son hospitalité. Bien évidemment, la canicule y est forte, comme du reste dans tout le nord de la Côte d'Ivoire. Cependant, cela ne saurait être un motif pour tout fonctionnaire bien portant de refuser de venir servir à Tengréla.
Cela dit, on peut, dans la mouvance actuelle du redéploiement des fonctionnaire, et agents de l'Etat, déplorer la timidité ou la trop grande prudence avec laquelle, certains grands services publics observent le déroulement de cette opération. Donnant par ce fait même, un surcroît d'arguments à tous ceux qui demeurent réfractaires aux affectations. C'est bien ce qui se passe avec les banques ou autres organismes financiers de proximité, dont le retour dans la ville peut valablement stimuler celui des fonctionnaires, très attendu en ce moment, aussi bien par les autorités administratives, que par la population tout entière.
Aussi, grand reste l'espoir des uns et des autres qu'après la visite d'Etat du Président de la République à la quelle tous adhèrent pleinement en dépit de leurs divergences politiques, on se fera assurément une autre conception de cette ville, victime de son relatif éloignement. Et si la bonne nouvelle attendue par tous, à savoir le bitumage de la route en terre qui la relie à Boundiali, venait à être annoncée par le Chef de l'Etat, il y aurait alors davantage lieu d'espérer que tout rentrera très vite dans l'ordre pour la ville de Tengréla.
Moussa Touré
Envoyé spécial
Le comité d'organisation fin prêt
Au terme d'une réunion de bilan relative aux préparatifs de la visite du Président de la République, M. Koné Mamadou, ministre de la Justice et vice-président national de la commission d'organisation de ladite visite, a organisé un point de presse pour rassurer la population quant à l'effectivité de la visite du Président Gbagbo dans la région des Savanes.
La visite est confirmée. Nous avons déjà reçu les services du protocole d'Etat pour les derniers réglages. A présent, nous sommes dans la phase active des préparatifs. Le gros ?uvre de l'organisation est en place. Nous sommes optimistes et confiants. La visite sera un succès?, a-t-il confié à la presse. Dans l'ensemble, le compte rendu des différentes commissions, ressort que tout est prêt tant au niveau de la logistique que de la mobilisation des populations pour réserver un accueil digne au Président. Seulement, la commission note quelques problèmes au niveau de l'hébergement. Pour lesquels le ministre Koné Mamadou a dit compter sur l'hospitalité des populations. Le ministre a aussi communiqué à la presse le programme définitif de cette visite. Dont les points nodaux sont d'une part deux allocutions du Premier ministre Soro Guillaume. L'une à Ferké en tant que fils de ce département et l'autre à Korhogo, en sa qualité de Premier ministre de Côte d'Ivoire. D'autre part, des visites aux familles Soro Guillaume et Alassane Ouattara à Ferké, au président Fologo dans son village à Péguékaha, aux familles Gbon Coulibaly et Soro Mapiéchon, un des militants de première heure du FPI à Korhogo, et aux notabilités de Gbon, Kolia et Kouto dans le département de Bondiali. Koné Mamadou a enfin lancé un appel à la grande mobilisation car, a-t-il souligné, on avait craint un moment les risques de seccession. Cette visite du Président Gbagbo est donc un événement important, c'est un pas supplémentaire sur le chemin de la paix et de la réunification?.

Martial Niangoran
Correspondant régional

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