lundi 17 décembre 2007 par Notre Voie

C'est reparti. L'heure est encore à la campagne d'intoxication politico-médiatique. Alors que le pays entier se concentre sur les grandes dates affichées par l'accord politique de Ouaga III, nos médias, pour des raisons difficiles à cerner, renouent avec les scoops toxiques. Ils pondent, des fois, des papiers? bien colorés d'ignorance.

Voyez vous-mêmes. Depuis quelques jours, des journaux ivoiriens de la même obédience reprennent en ch?ur, comme s'ils se sont passé le mot, la rumeur selon laquelle le président de la République de Côte d'Ivoire, Laurent Gbagbo et le président de l'Assemblée nationale, le Professeur Mamadou Koulibaly, seraient en conflit. Pour se convaincre eux-mêmes de l'existence de cette prétendue bagarre au sommet de l'Etat, nos enquêteurs du dimanche (ils n'ont évidemment enquêté sur rien) brandissent l'absence du Pr. Koulibaly dans la région des Savanes lors de la visite d'Etat du président de la République dans cette région, du 28 au 30 décembre 2007 et son absence momentanée du territoire ivoirien. Sur leur lancée, ils voient un conflit du même genre entre le président de la République et la Première Dame, son épouse Simone Ehivet Gbagbo, absente elle aussi de la tournée présidentielle au Nord. Enfin, ils soutiennent que le professeur Mamadou Koulibaly, à cause de ce conflit, a été exfiltré du pays et s'est exilé à l'étranger. Comment cela peut-il arriver à une personnalité sous immunité parlementaire, dans un pays où, pour la paix, le président de la République compose aujourd'hui avec ceux qui, hier, lui faisaient la guerre ?
Certes, sur le cas Mamadou Koulibaly, nos confrères semblaient avoir des raisons d'être agités. Le président de l'Assemblée nationale est, en effet, natif du Nord, la Région visitée, fin novembre dernier, par le président Gbagbo. La logique, il faut le leur concéder, aurait voulu que le Pr. Koulibaly soit à l'accueil du président ivoirien. Mais cette remarque sur l'absence du président du parlement ivoirien à Korhogo suffit-elle à conclure à un conflit ouvert entre le président de la République et le n°2 de son régime ? Mamadou Koulibaly séjourne actuellement aux Etats-Unis. Il regagnera Abidjan dans quelques jours et le FPI, son parti, a sûrement tort de rester muet sur les agitations autour de son absence qu'on attribue à un prétendu conflit de clans . Mais combien cela coûte-t-il à une entreprise de presse de permettre à ses journalistes de passer quelques coups de fil à l'entourage ou aux collaborateurs de Koulibaly, pour savoir que le bien nommé est momentanément hors du pays pour des raisons personnelles et pour des contacts importantes ? La recherche de la vérité guide-t-elle vraiment les auteurs des articles donnant Koulibaly pour exilé ?
On en était encore à ces interrogations quand d'autres journaux, repris par les premiers qui n'ont sûrement pas atteint l'objectif recherché avec le scoop du conflit Gbagbo-Koulibaly?, ont brandi un autre curieux scoop : un complot de l'entourage de Gbagbo? pour limoger le général de brigade Philippe Mangou, chef d'état-major des Forces armées nationales de Côte d'Ivoire (FANCI). Selon ces écrits, le président de la République aurait décidé de remplacer le général Mangou par le colonel Dogbo Blé. Or, une petite curiosité journalistique aurait permis à ces auteurs de comprendre que Philippe Mangou, fort du soutien et de la confiance du chef de l'Etat, se bat aujourd'hui avec le chef d'état-major de l'ex-armée rebelle, le général Soumaïla Bagayoko, pour entamer le désarmement comme prévu le 22 décembre prochain. De toute évidence, on a préféré perturber l'armée pour des raisons faciles à détecter.
Une observation attentive permet, en réalité, de constater que les auteurs de ces écrits se recrutent dans les rangs de ceux qui ont toujours du mal à se faire à l'idée que l'actuel président de la République de Côte d'Ivoire s'appelle Laurent Gbagbo et que, avec lui, le pays est bien gouverné. Ces contestataires d'un autre genre, accrochés à la saugrenue idée que, seules, leurs idoles sont nées pour gouverner, s'ingénient à salir leur propre pays et ses dirigeants, à faire croire qu'au sommet de l'Etat ivoirien, le président Gbagbo et son régime s'amusent . Dans leur logique, le chef de l'Etat et son régime ne peuvent que servir soit des conflits personnels au peuple ivoirien appauvri par leur stupide guerre, soit des calculs ethniques pour la gestion du pouvoir. N'oubliez pas, au début de la crise du 19 septembre 2002, ils ont tenté de polluer les casernes militaires en faisant croire, par articles de presse interposés, que le chef de l'Etat aurait placé des officiers bété , de son groupe ethnique, à la tête de toutes les unités de commandement des Forces de défenses et de sécurité. Ils ont écrit que cette armée léguée par feu Houphouët-Boigny à Bédié, mal gérée, désorganisée par ce dernier et trouvée ainsi par Laurent Gbagbo, serait brusquement et exclusivement constitués de Bété. Ils ont même poussé l'outrecuidance jusqu'à faire passer Philippe Mangou, un Ebrié d'Abidjan, pour un Bété de Gagnoa, le jour où le chef de l'Etat l'a nommé chef de l'état-major des FANCI.
Bien entendu, leurs différentes prouesses dans l'intoxication ont échoué, ainsi que leur conquête du pouvoir par les armes. Mais, le chien ne changeant jamais sa façon de s'asseoir, ils récidivent en faisant croire que l'entourage de Gbagbo? veut la tête de Mangou. Or, dans leur esprit brouillé de pensées tribalistes, l'entourage du chef de l'Etat ne peut être que Bété. Alors, écrivent-ils, le remplaçant de Mangou serait, fatalement, le colonel Dogbo Blé, un officier, Bété. Vous avez tout compris. Quelle dégradante logique pour des individus qui prétendent aimer et servir leur pays !
Du 2 au 8 décembre dernier, notre pays a reçu près de 200 journalistes du monde entier venus participer, à Abidjan et à Yamoussoukro, aux 39èmes assises de l'Union internationale de la Presse francophone (UPF), organisation que préside désormais notre confrère Alfred Dan Moussa. Au cours des débats qui ont passé au peigne fin notre fâcheuse tendance à user de la puissance de nos plumes et de nos voix pour cogner , notre attention n'a cessé d'être attiré sur le fait que le journaliste est avant tout un citoyen. Qu'il a les mêmes devoirs que les autres citoyens envers son pays. Alors, peut-on espérer nous voir un jour, nous, journalistes ivoiriens, appliquer ces bons conseils ? Le débat mérite d'être engagé.








C.E. cesaretou2002@yahoo.fr

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