mardi 29 janvier 2008 par 24 Heures

Rien ne va plus entre les villageois de Diboké et leurs voisins de Tinhoun. Ces deux villages de la région de Bloléquin se regardent en chien de faïence. Les derniers cités ont même subi la furia des autres qui ont mis leur village à sac. A l'origine, une loi traditionnelle bafouée.

Vingt quatre cases incendiées, seize maisons saccagées et pillées, vingt quatre boeufs, deux cents poulets, moutons et cabris tués et emportés.
C'est le triste visage qu'affiche le village de Tinhoun depuis le 14 janvier dernier, date fatidique où, il a reçu la visite musclée des masques de Diboké, son voisin.
La notabilité de Tinhoun et les cadres du village, dont le ministre Dagobert Banzio, ont décidé de porter plainte contre leurs agresseurs, après avoir constaté l'ampleur des dégâts.
Comment en est-on arrivé là ? Les témoignages recueillis tournent autour d'une affaire de masque frustré?.
A l'origine de la guerre, le décès d'un porteur de masque du village de Tchuambly, voisin de Tinhoun et de Diboké.
Comme le veut la coutume, un b?uf doit être offert au village endeuillé, et c'est Diboké qui est commis à cette tâche.
Dans les funérailles d'un masque, il n'y a qu'un masque qui puisse convoyer le B?uf.
C'est ainsi que le 13 janvier 2008, Kou?, un masque bagarreur du village dudit village, est désigné pour convoyer le boeuf.
Chemin faisant, Kou? et ses suiveurs rencontrent un jeune cycliste originaire de Tinhoun.
Normalement, le jeune homme doit céder le passage au masque, comme le stipule la tradition.
Seulement, il se trouve que ce jeune homme est un Ganhou?, et en tant que tel, il n'est pas soumis à cette restriction.
Il refuse donc de céder le passage au masque.
Ce qui n'est pas du goût de ce dernier qui, pour laver l'affront, se rue sur le jeune homme à coups de chicotte, avant de continuer son chemin vers Tchuambly, chemin qui traverse Tinhoun.
Entre temps, le jeune homme bastonné, se sentant ainsi déshonoré, retourne au village (Tinhoun) ameuter sa troupe et réserver un accueil des plus chaleureux? au masque.
Dès son entrée à Tinhoun, le masque est accueilli par des jets de pierres, des insultes et aussi des coups de la part des jeunes villageois qui ont décidé de venger leur camarade.
Le masque de Diboké est sauvé grâce l'intervention du chef de canton, qui demande aux jeunes de cesser les hostilités et de laisser le masque poursuivre son chemin.
Mais au moment où, il se croit tiré d'affaire, il tombe, à la sortie de Tinhoun, dans une embuscade tendue par ses bourreaux décidés à en découdre avec lui.
Copieusement lynché, il est laissé pour mort dans les broussailles environnantes.
La vengeance appelle la vengeance?; l'histoire de Tinhoun et de Diboké vient confirmer cette maxime.
En effet, ceux des suiveurs du masque qui avaient pu échapper à la bastonnade retournent dans leur village d'origine (Diboké) pour informer le chef et sa notabilité sur les faits qui viennent de se produire.
Il n'en faut pas plus pour qu'au lendemain du premier incident, tous les masques de Diboké se déportent à Tinhoun pour laver l'affront.
Selon la notabilité de Tinhoun, c'est, armés de fusils, de machettes et de gourdins que les masques venus de Diboké ont entrepris une descente punitive contre les profanateurs de masques.
Ce qui devait arriver arriva.
Heureusement, aucune vie humaine n'est à déplorer, ce, grâce à la sagesse de la notabilité de Tinhoun qui a demandé aux jeunes de quitter le village afin d'éviter les affrontements.
Ainsi, sans aucune résistance, les masques de Diboké auraient détruit des maisons, tué des animaux, aidés dans leur besogne par une autre troupe venue de Tchuambly, spécialisée dans le pillage de biens.
Le sacage aurait duré toute la journée du 14 janvier.
Le chef de Tinhoun, qui espérait que le différend se règle selon la tradition, a affirmé ne pas avoir eu connaissance du fait que les jeunes aient outrepassé la consigne en allant s'attaquer au masque.
Aussitôt informé, le Préfet militaire, le Capitaine de frégate Martin Gnonsekan, a détaché des éléments pour ramener le calme entre les populations.
Mais, les populations de Tinhoun sont très éprouvées par les dommages qu'elles ont subis.
Un huissier a été dépêché sur les lieux pour faire le constat et rassembler tous les témoignages possibles afin de compléter le dossier d'enquête.
Malgré l'accalmie, les relations entre les protagonistes n'en sont plus au stade de bon voisinage.
Il y a encore de l'électricité dans l'air.


M.B (Envoyé spécial à Tinhoun)


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