samedi 9 février 2008 par Le Nouveau Réveil

Dans une interview à nous accordée, Dr Kouadio Kpli Kouassi Delphin, maire de la commune de M'Bahiakro, s'est prononcé sur le retrait des forces armées de sa commune avant d'inviter les hommes politiques à arrêter le mensonge. M. le maire, votre commune qui était à cheval sur la zone gouvernementale et celle sous contrôle des FAFN est l'une des villes ayant souffert le plus des affres de la guerre. Aujourd'hui, quel sentiment vous anime après le retrait des hommes en tenue de M'BAHIAKRO ?
Merci. Je remercie Dieu d'avoir épargné ma commune. A M'BAHIAKRO, nous savons ce qu'est la guerre. Etre entre deux feux équivaut à un stress permanent. Combien de nos parents en sont morts? Aller au champ à une certaine période était risqué mais il fallait se nourrir. Je dis tous les jours que je ne souhaite à personne d'être dans la situation de ma ville. Que l'on comprenne que M'BAHIAKRO ne veut plus de guerre en Côte d'Ivoire. Le retrait des militaires signifie pour moi le début de la fin de la guerre. Le sentiment donc qui m'anime est un sentiment de joie avec une goutte de mélancolie car des relations humaines unissent la population à certains militaires.
Un groupe de miliciens avait séjourné tout le temps dans la commune que vous dirigez, à quelques mètres seulement des forces loyalistes, a-t-on appris. En tant que 1er magistrat de cette commune, pouvez-vous confirmer ou infirmer cette information?
Les miliciens n'ont pas pu s'installer dans notre commune. En tant que républicain, je me suis opposé à ce que notre armée face appel à des milices. L'armée c'est d'abord l'honneur et elle a rempli l'essentiel de sa mission ici. Accepter les miliciens, c'est déshonorer l'armée, c'est lui dire qu'elle est incapable. Il y a des personnes qui n'ont pas une hauteur d'esprit qui disent que le maire de M'BAHIAKRO est contre le FPI et donc contre l'armée. Ce slogan a failli prendre. D'ailleurs, le maire que je suis n'a jamais eu la visite ni à mon domicile ni à la mairie des généraux de notre armée qui se sont succédé à M'BAHIAKRO et pourtant Dieu seul sait ce que nous avons fait. J'ai une haute idée de l'armée. Pour moi, elle ne doit pas être l'émanation d'un parti politique ou d'une ethnie; elle doit être républicaine. Elle doit garder ses valeurs, même en temps de guerre. Qu'est-ce qui empêchait l'Etat de sonner la mobilisation générale et volontaire au lieu de recruter des miliciens et les payer avec l'argent des contribuables? C'est anticonstitutionnel. Les militaires qui acceptent les miliciens n'honorent pas leur corps. En tant que 1er responsable du PDCI dans cette localité, vous avez été menacé de mort. Selon vous, qu'est-ce qui vous était reproché?
Je ne sais pas ce qu'on me reproche. Pour ma part, je n'ai peur que de Dieu et de ma conscience. Vous pouvez interroger les autres partis politiques. Je suis attaché à la démocratie. Certains partis avec 95 militants dans ma commune voulaient installer le désordre. Ils m'ont trouvé en face d'eux. Malgré ces menaces, vous avez pris le risque de rester auprès de vos populations. Pourquoi?
Je suis resté auprès de ma population parce que c'est mon devoir. J'ai été élu pour accomplir une mission et je l'accomplirai. Si je suis dans l'incapacité, alors je démissionne. Vous savez, il fallait ouvrir l'école. Je ne pouvais pas rester à Abidjan et dire aux braves enseignants de rester à M'BAHIAKRO pour donner des cours aux enfants. Je n'ai pas bénéficié de gardes du corps et pourtant je suis resté avec eux. D'ailleurs, tout le corps préfectoral d'alors est à remercier et à féliciter. Pour un véritable retour à la paix durable, quel message pouvez-vous lancer à l'endroit des hommes en tenue des deux camps, aux populations qui restent encore réticentes ainsi qu'aux hommes politiques de tout bord?
Pour un retour durable de la paix, j'invite la population à rester sereine et vigilante en même temps. Aux hommes en tenue, je demande de croire à la paix. Dans cette crise, chacun à sa part de responsabilité. Qu'ils assument les leurs. Aux hommes politiques, je demande d'arrêter de tricher. Une paix durable ne se construit pas dans le mensonge. Les élections doivent être transparentes pour que tous les Ivoiriens choisissent librement leurs dirigeants de demain. La communauté internationale doit aider la Côte d'Ivoire à atteindre cet objectif sinon, demain sera plus sombre qu'aujourd'hui. La démocratie a ses exigences, respectons-les pour une Côte d'Ivoire paisible, unie, mise sur le chemin du développement.
Interview réalisée par
Tano Koffi Henri

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