mardi 4 mars 2008 par Nord-Sud

Le temps de Carême qui a débuté le 6 février et qui prend fin le 23 mars est une période de prière intense, mais aussi et surtout une période de partage.


Naomi Tanoh, employée dans une clinique de la place, est une fidèle de la paroisse Notre Dame de la tendresse de la Riviera golf. Depuis le début du Carême, elle offre 2000Fcfa chaque vendredi à son église. Ce montant est quatre fois plus élevé que celui dont la jeune dame s'acquitte lors des quêtes ordinaires. C'est le fruit de sa privation. Elle se passe de ses repas de la journée du mercredi et met de côté l'argent que cela devait coûter. Le vendredi du Chemin de croix, son économie lui permet non seulement d'effectuer le déplacement jusqu'à sa paroisse, mais aussi de participer aux collectes spéciales organisées pendant le temps de Carême en faveur des pauvres. Ils sont nombreux à travers le monde les fidèles catholiques qui, durant cette période font l'effort de mettre en pratique le partage prôné par la Bible et rappelé chaque année par le Vatican au début du carême. En ce traditionnel message pour le carême, je voudrais m'arrêter pour réfléchir sur la pratique de l'aumône : elle est une manière concrète de venir en aide à ceux qui sont dans le besoin, et, en même temps, un exercice ascétique pour se libérer de l'attachement aux biens terrestres, déclarait le pape Benoit XVI en début février. L'Eglise fait un effort pour que les fidèles prennent conscience de la nécessité de faire l'aumône dans leur vie quotidienne. Il s'agit de se priver de quelque chose. Ça peut être de la nourriture de la boisson ou toute autre chose en vue d'économiser. On n'économise pas pour épargner, mais plutôt pour aider les pauvres , précise l'abbé Augustin Obrou de l'archevêché d'Abidjan. Ce geste doit être désintéressé. On ne donne pas en attendant quelque chose en retour. Celui qui fait un don de façon désintéressée gagne forcement la grâce de Dieu , souligne le curé de la paroisse Sacré C?ur d'Abobo Anador. Les dons sont collectés au cours des chemins de croix organisés chaque vendredi dans les paroisses. C'est une messe hebdomadaire qui retrace le parcours douloureux du Christ avec la croix de son lieu d'arrestation à son lieu de crucifixion. Ce jour-là, en dehors de la cotisation ordinaire, une cotisation spéciale est levée dans le cadre du carême. Où va cet argent ? Si certains fidèles le savent, la majorité par contre n'en a qu'une vague idée. Je sais que ça va à la Caritas (structure de bienfaisance de l'Eglise catholique) , affirme Agui Jean Paul de la paroisse St Ambroise d'Angré. Cet argent sert au fonctionnement de la paroisse. Je n'en sais pas trop. Renseigne-toi auprès des responsables paroissiaux , ajoute Naomi. Une partie de l'argent reste à la paroisse et une autre partie va dans le diocèse , poursuit l'un des animateurs de la catéchèse à l'église dirigée par le célèbre abbé Abékan Norbert. Le plus important, disent ces fidèles, c'est la confiance qu'ils placent en leurs responsables. Nous avons obtenu une réponse précise auprès du directeur de la procure du diocèse d'Abidjan. Le mot procure découle d'un terme latin qui désigne le procureur. Ici, il s'agit de l'organe central de gestion des biens matériels et financiers de l'église. Chacun des 16 diocèses de Côte d'Ivoire a sa procure. Elle est chargée de collecter, de redistribuer les ressources des différentes paroisses et de veiller à leur bonne gestion. Elle reçoit aussi bien les fonds issus des quêtes ordinaires que ceux des quêtes spéciales du temps de Carême qui nous intéressent cette fois. L'argent est intégralement acheminé à la procure (à Adjamé, pour le diocèse d'Abidjan) par les responsables des différentes paroisses. Il y en a 57 au total.





Une quête spéciale pour le Vatican



L'année écoulée, hormis la quête du mercredi des Cendres, le carême a permis de mobiliser 21millions de Fcfa. Cet argent est destiné à des ?uvres caritatives. C'est pourquoi on les appelle les quêtes de la Caritas , explique Amangoua Lookensey. 50% de cet argent retourne à la caritas paroissiale, 25% sont destinés à la caritas diocésaine et les 25% restants vont à la direction nationale de la caritas. Ces fonds permettent d'aider les démunis. Nous recevons des gens qui n'ont rien à manger, des malades, des veuves ou des femmes enceintes qui viennent demander de l'aide , révèle le sous-directeur national de cette structure. Djoman Jean indique que le nombre de ces demandeurs d'aide s'est accru depuis le début de la crise que traverse le pays : La pauvreté est aujourd'hui une réalité en Côte d'Ivoire. Il y a des gens qui viennent juste demander 1 kilo de riz, de l'huile ou de quoi payer du charbon pour faire la cuisine. En général ces personnes s'orientent vers les caritas paroissiales. Quant à la direction nationale, elle joue un rôle de coordination et initie des activités génératrices de revenus au bénéfice des couches défavorisées. Chaque année, sa part de quête s'élève à 10.000.000 de F. Une somme largement en deçà des besoins, à en croire le sous-directeur : Même 100 millions de F ne suffiraient pas aujourd'hui tant les besoins sont nombreux. Il a cité la détresse des habitants de Massitéon, village du département de Bouna, qui sont obligés de migrer en saison sèche faute d'eau. Le sol est aride, donc point d'eau dans les puits qui s'assèchent. Il n'y a pas de pompe villageoise. Tout le village ou presque est donc contraint de parcourir des dizaines de kilomètres vers le premier point d'eau et s y installe pendant quelques mois en attendant la saison des pluies. Ce village n'a pas la moindre école ni un hôpital. Massitéon n'est qu'un exemple. De nombreux villages de la zone vivent le même calvaire. Lorsque nous avons découvert cette situation, nous avons monté un programme pour leur apporter notre aide , annonce M. Djoman qui doit conduire bientôt une mission dans la zone de Bouna. Les sommes recueillies pendant la quête du dernier vendredi, le Vendredi saint ne restent pas en Côte d'Ivoire. Elles sont directement transférées à Rome : On appelle cela une quête impérée. C'est une forme d'impôt qui vient de tous les diocèses du monde et qui permet d'entretenir les lieux saints , précise le sous-directeur. En 2007, le diocèse d'Abidjan a mobilisé à lui seul 11 millions de Fcfa le Vendredi saint pour le saint siège. Certains fidèles préfèrent faire des dons en nature. C'est l'exemple d'un chef d'entreprise qui a offert 25 sacs de riz à Notre Dame de la tendresse. D'autres donnent des vêtements. Ces dons en nature restent généralement à la caritas paroissiale qui les redistribue aux nécessiteux. En plus des dons qu'ils font dans leur paroisse, des fidèles réunis en communauté font des quêtes supplémentaires pour faire du social. La coordination des communautés nouvelles (qui compte 22 communautés et 28 fraternités) organise ce genre d'action depuis 10 ans. A la fin, du carême ses membres rassemblent ce qu'ils ont pu économiser et cela est offert à des malades, des orphelins ou des malades. Cette année, nous avons décidé de mettre notre don à la disposition des séminaristes du diocèse d'Abidjan, explique Guillaume Koffi, président de la coordination.





Cissé Sindou

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