vendredi 9 mai 2008 par Le Patriote

Il y a quelque chose d'assez troublant, ces jours-ci, dans l'actualité politique nationale. C'est cette virulence dans les voix qui s'élèvent depuis que l'Accord de Ouagadougou a grillé sa première bougie, provenant de certaines personnes, tous d'une chapelle politique, qui ont du mal à maîtriser leurs passions politiciennes. Des responsables, et non des moindres, du FPI sont en effet brusquement montés sur leurs grands chevaux pour reprendre, comme dans un passé pas très lointain, un vieux combat d'arrière-garde. Celui des préalables. Dans une orchestration savamment menée, ce vilain réflexe qui a longtemps plombé le processus de paix, est mis sur la sellette avec sans doute celui qui a été l'un des précurseurs, Affi N'guessan : Il faut le désarmement ici et maintenant. Ce dogme Fpiien est de nouveau au centre du débat. A y voir de près, la Côte d'Ivoire retombe, petit à petit dans la configuration manichéenne de son espace politique. D'un côté, le bloc de la République et de l'autre, celui des rebelles, au sens englobant du terme tel que le parti présidentiel l'a toujours présenté, c'est-à-dire l'opposition politique et les Forces Nouvelles. Ces dernières se trouvant accusés de vouloir des élections sans désarmement.
Le hurlement des loups de la Refondation se veut une réponse aux leaders du RHDP, Konan Bédié et Alassane Ouattara, qui ont souligné que les élections peuvent se tenir dans le climat actuel après le regroupement des combattants. Pourtant, à analyser ces prises de position, avec le recul intellectuel et politique nécessaire, on se rend compte que les deux leaders de l'opposition font, plutôt, preuve d'une vision politique pragmatique. Contrairement aux années précédentes, l'Accord politique de Ouagadougou a permis au processus de paix de connaître des bonds qualitatifs sur le chemin de la normalisation. Gbagbo en a lui-même récemment fait le constat : Je suis heureux de constater, aujourd'hui, que toutes les écoles s'ouvrent, en même temps, sur l'ensemble du territoire national; qu'elles vont suivre les mêmes programmes, avec des instruments de même niveau; que les préfets sont installés partout, que tous les hôpitaux vont rouvrir; que les sous-préfets vont être installés... Nous normalisons la situation, c'est cela qui est important. Il est plus facile de mettre en cause la paix, mais il est très difficile de la reconstruire. Aller aux élections et élire un Président de la république ne saurait être le retour automatique à la paix. A contrario, les élections dont la mauvaise tenue, il y a huit années en arrière, a contribué, par l'illégitimité de Laurent Gbagbo, à pourrir le climat politique, sont un passage, certainement obligé, vers la paix. Une étape parmi tant d'autres du processus. Comme la réunification du territoire, le redéploiement de l'administration. Le futur chef de l'Etat en qui tous les Ivoiriens devront s'identifier parce qu'ayant été élu, on le présume, démocratiquement pourra alors procéder à l'ultime étape du désarmement. Il pourra s'attaquer aux défis qui l'attendent : panser les plaies mais surtout régénérer les cellules pour donner naissance à une Côte d'Ivoire nouvelle. Reconstituer physiquement et moralement l'Etat, restaurer son autorité. Donner à l'Etat un contenu en termes d'armée républicaine, de gendarmerie civique et de police éduquée, avec une justice pour tous.
Au plan économique, l'assainissement de la gestion des finances publiques, la lutte contre la corruption et l'impunité pourront être de mise.
A la vérité le maintien incessant d'un Président illégitime et minoritaire aux affaires, contribue à maintenir le pays dans le gouffre du désespoir, suspecté qu'il est par la communauté internationale. Au plan interne, cela ne donne aucun gage aux Forces Nouvelles. Pourquoi avoir confiance en un chef d'Etat arrivé au pouvoir par la force des armes, qui ne gouverne que par les armes, et qui a désagrégé, par ses choix xénophobes, tribaux et périlleux, le tissu social ? Laurent Gbagbo qui a accepté la désignation de Guillaume Soro comme Premier ministre et qui lui offre de larges sourires à toutes les rencontres, sera-t-il le même, quand Morou, Zacharia, Cherif, Fofié et autres Vetcho ne seront plus armés ? Refuser cette lecture de la situation en Côte d'Ivoire revient tout simplement, à faire preuve d'une cécité intellectuelle qui n'apporte rien au débat. Gbagbo lui-même n'a-t-il pas avoué qu'il respecte les Forces Nouvelles parce qu'elles ont des armes et elles contrôlent une grande partie du territoire national ? Le FPI, du moins une partie de ce parti, la plus majoritaire, il est vrai, veut plonger la Côte d'Ivoire dans un cercle vicieux. Comme le serpent qui se mord continuellement la queue. Ces partisans de Laurent Gbagbo qui soufflent, invariablement, le chaud donnent l'impression de n'avoir rien compris de ce que leur champion disait, il y a juste quelques années au sortir de la signature de l'Accord de Marcoussis, alors que les mouvements rebelles étaient très peu structurés et ne présageaient de rien sur leur avenir : on ne sort pas d'une guerre comme on sortirait d'un dîner de gala. Je n'ai pas gagné la guerre, il faut donc qu'on en tire les leçons , avait dit Gbagbo, avant de poursuivre il ya quelques semaines : on entre dans la guerre de façon brutale, et on en sort de façon progressive.. D'où vient-il que certains de ses partisans et proches collaborateurs se comportent comme si Gbagbo avait gagné la guerre ? A moins qu'il ne s'agisse là, encore une fois, d'un simple partage de rôles, comme une pièce de théâtre dans laquelle Gbagbo et AFFI sont les acteurs principaux. Au FPI, il est vrai, la diversion est une arme

PAR CHARLES SANGA

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