vendredi 9 mai 2008 par Le Temps

Comoé Marius, président de la Fédération des Associations de Consommateurs actifs de Côte d'Ivoire (FACA-CI).

La flambée des prix est une réalité, que faites-vous pour la juguler ?
Dans le cadre de la lutte contre la flambée des prix, nous avons mené sur le terrain, un certain nombre d'actions allant dans le sens de la défense et de la protection des intérêts des consommateurs. En attirant l'attention du gouvernement sur la nécessité de poser des actes pouvant permettre aux consommateurs, un meilleur accès aux soins de santé. Mais aussi et surtout à la nourriture. Car, avec la flambée des prix du riz et des produits de grandes consommations, l'Ivoirien, même moyen, n'arrive plus à s'offrir un repas par jour. Dans certaines familles, cela relève d'un miracle. Malheureusement, durant près de huit mois, nous n'avons pas été écoutés et nous nous sommes rendu compte, qu'on n'était plus préoccupé par le processus de sortie de crise.

Ne peut-on pas dire que la guéguerre dans vos rangs, a entaché la crédibilité du mouvement consumériste en Côte d'Ivoire ?
Je vous le concède. C'est pourquoi d'ailleurs, il est né une nouvelle fédération. Le président N'Goran N'Da en tirant sa révérence, a créé cette nouvelle structure. A cette fédération, il a donné les véritables moyens de mener la lutte pour la défenses des intérêts et la protection des intérêts des consommateurs. () Rien que pour ça, nous invitons tous les ivoiriens à lui rendre à partir de ce samedi, à la place Inch'Allah à Koumassi, un dernier et grand hommage mérité dans le recueillement. Nous n'avons pas le droit d'échouer ou de trahir les consommateurs. Aussi, que le gouvernement ne voit en nos associations, des organisations politiques.

Pourquoi avoir contourné le ministre du Commerce pour vous faire recevoir par le Président de la République ?
C'est parce que cela était nécessaire. Du reste, c'est cette rencontre qui permet aujourd'hui de constater une accalmie. Car, le Président de la République, en nous recevant, a pris des mesures allant dans le sens de la résorption de nos préoccupations. Malheureusement, sur le terrain, l'application effective de ces mesures pose problème. Nous avons constaté que certains commerçants véreux, alors qu'ils bénéficient déjà des retombées de l'engagement du chef de l'Etat, continuent de faire de la surenchère, en usant de mauvaise foi et refusant d'afficher les nouveaux prix.

A qui la faute ?
Je dirais simplement à l'Etat. Parce qu'en prenant des mesures, l'Etat ne s'est pas doté de moyens nécessaires, pour veiller à leurs applications. En la matière, le ministère du Commerce n'est pas exempt de tout reproche.

Conséquences : Sur le terrain, les prix ne baissent pas ?
Cela constitue une préoccupation majeure chez nos populations. Qui continuent de grogner. On continue de nous saisir dans ce sens. Après notre action de fermetures des magasins et de certaines boutiques, on nous a reçus, pour nous faire entendre que ses services étaient en action. Pour veiller à l'effectivité de l'ordonnance présidentielle et pour que les consommateurs puissent en ressentir les effets. Malheureusement, les détaillants ne suivent pas.

Et pourtant, une ligne verte a été installée par le ministère du Commerce ?
Les associations de consommateurs, n'ont pas été encore saisies par les services du ministère du commerce. Nous espérons que le gouvernement va se ressaisir. Une chose est d'installer un numéro vert, l'autre est de veiller et répondre aux sollicitations des populations. On dit que ce département ministériel n'a pas de moyen.

Qu'un ministère aussi stratégique que celui du Commerce dise qu'il n'a pas les moyens, est-il concevable ?
Ce n'est pas possible. Moi, je voudrais plutôt parler de démotivation. Les agents, à travers des grèves, ont voulu réclamé plus de moyens pour travailler. Comme proposition concrète, qu'on nous associe à l'application des décisions prises par le Président de la République. Dans le cas contraire, les consommateurs vont le faire eux-mêmes, sur nos marchés et dans les boutiques.

Cela fait-il partie des prérogatives des associations de consommateurs ?
Dans un Etat, lorsqu'il y a défaillance au niveau des dirigeants et des structures étatiques, il revient à la population d'être le dernier maillon de sa sécurité. On ne devient pas ministre pour satisfaire les attentes d'un parent ou d'un groupe d'amis. Mais pour répondre aux attentes des populations. ().

N'avez-vous pas peur que les mots d'ordre que vous lancez soient récupérés par des politiciens ?
Nous avons déjà lancé à l'endroit des acteurs politiques, des mots d'ordre très clair. Le mouvement consumériste n'est pas une action politique. Il est destiné à l'amélioration des conditions de vie et à la protection des intérêts des consommateurs. Nous entendons donc attirer l'attention des gouvernants et des acteurs politiques, sur la nécessité de mettre en place, des programmes des gouvernements soutenus par des projets de société qui prennent en compte les principes élémentaires du droit des consommateurs.

Ne faudrait-il pas à nouveau, craindre l'effet de contagions des émeutes de la faim à travers le monde ?
Je puis vous le certifier. Cela est d'autant vrai que les populations ne vont pas continuer à se faire hara-kiri. Nous sommes certes engagés dans le processus de sortie de crise, mais la paix ne peut venir qu'avec un ventre pas affamé.

Le Président de la République a dit récemment que la Côte d'Ivoire peut et doit devenir le grenier de l'Afrique. Un commentaire ?
Le Président Gbagbo a sa petite idée sur ce point. Je puis vous dire qu'il tire son épingle du jeu. Il a fait baisser la TVA dont le taux obéit depuis quelques années aux prescriptions du Tarif extérieur commun (TEC) dans l'espace UEMOA. En diminuant de moitié le taux de 19% à 9,5%. Mieux, il a étendu les allègements fiscaux aux droits de douanes, sur certains produits de grande consommation entrant en Côte d'Ivoire. Il faut être de mauvaise foi pour ne pas reconnaître que le Président et son Premier ministre n'ont rien fait. A notre humble avis, il y a un ministère qui ne joue pas son rôle.

Par Bamba Mafoumgbé
bamaf2000@yahoo.fr

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