mardi 15 juillet 2008 par Le Nouveau Réveil

Le Chef de l'Etat, Laurent Gbagbo, s'est adressé au peuple de Séguéla. Et a déclaré que loin d'être une blague, les élections présidentielles auront bel et bien lieu le 30 novembre 2008. Voici de larges extraits de son discours.

() Mesdames et Messieurs ;
Je suis à la fois ému et heureux d'être à Séguéla pour des raisons diverses que le Maire Amadou Soumahoro a rappelées tout à l'heure. Avant de rentrer dans le vif de mon sujet, je voudrais répondre à certaines interrogations, afin qu'on se consacre au sujet de la paix.
Monsieur le Maire, cher petit frère et porte-parole des populations du département de Séguéla. Oui, je viendrai en visite d'Etat. Je vous confie au Premier Ministre pour que vous fixiez ensemble la date, parce que lui et moi, quand nous avons discuté, ce qui nous gênait, c'était la période du carême en septembre. Faut-il le faire avant, pendant ou après ? Discutez, fixez une date, je m'en tiendrai à cela.
Monsieur le Préfet m'a soumis le cas du ranch de la Marahoué où les travailleurs ont de grosses difficultés, et où ils ont des arriérés de salaires portant à peu près sur 400 millions de francs CFA. J'ai donné tout à l'heure les instructions au Premier Ministre, pour que dans les semaines qui viennent, on puisse débloquer ces arriérés et leur permettre de vivre dignement.
Vous savez, le problème le plus compliqué, sera celui de l'usine d'égrenage de coton pour lequel nous allons lancer les réflexions dès notre retour à Abidjan. On m'a aussi soumis dans les fiches, le problème de l'érection de Kani en département. J'ai consulté rapidement les uns et les autres, et je puis vous affirmer que Kani est érigé en département.
Quant aux enseignants volontaires, nous allons signer immédiatement leur décret de recrutement que le Ministre de l'Education Nationale va nous soumettre, après les examens de fin d'année.
Voici, Monsieur le Maire et Porte-Parole des populations, chers amis, ce que je voulais dire d'entrée de jeu, pour ne pas que notre propos sur la paix soit greffé par d'autres pensées.
Mais avant de commencer, je voudrais saluer toutes les personnalités de Séguéla : les personnalités traditionnelles avec lesquelles j'ai discutées tout à l'heure, les Imams, notamment le plus grand Imam de la ville ; les Chefs de tous les cantons, particulièrement le Chef Diomandé. Je voudrais vous saluer tous. Ils m'ont honoré en m'adressant une invitation à venir les voir. Je viendrai pour la visite d'Etat. Je me suis précipité pour aujourd'hui, pour les raisons que nous allons évoquer tout à l'heure. Je voudrais saluer les femmes de ce département. Je les connais assez bien. Les hommes et les femmes de cette région sont très nombreux dans mon département d'origine, Gagnoa. Les ''Koyaka'' y sont très nombreux, et, quand un ''Bété'' de Gagnoa dit qu'il parle ''Dioula'', c'est en fait du ''Koyaka'' qu'il s'agit. D'ailleurs, quand on veut se moquer de nos voisins communs qui sont les ''Gouro'', on leur dit que lorsqu'ils vieillissent, ils deviennent des ''Koyaka''. Je voudrais donc saluer très chaleureusement les personnalités traditionnelles et religieuses. Je voudrais saluer les prêtres qui sont venus m'accueillir ; bref, tous ceux qui font la vie quotidienne dans le département de Séguéla.
Je voudrais également saluer les Ministres Barry Battesti, Timité (ancien Ministre de l'Agriculture), Koné Messemba, Soumahoro Amadou, Bakayoko Youssouf et Hamed Bakayoko. A vous tous chers amis, chers frères, je vous dis merci pour votre accueil, merci de vous être déplacés.
Chers amis, je suis à Séguéla. Une terre que je connais bien. J'ai fait 7 mois au camp militaire, et c'est ici que j'ai écrit mon premier livre ''Soundjata, Lion Mandingue''. Mais, je ne dis pas cela pour être amer, puisque c'est un passage de ma vie qui m'a permis de mûrir et de connaître beaucoup de personnes. Mon passage ici m'a surtout permis de connaître le fonctionnement de l'armée. Si, aujourd'hui, je suis à l'aise avec les militaires, c'est parce que je suis d'abord passé à Séguéla, puis à Bouaké. Je connais donc cette ville et son camp militaire. Mais je connais aussi le département, notamment les villes de Sifié, Worofla, Djibrosso. Dans cette dernière localité (Djibrosso), on m'a donné à manger de la viande de panthère que vous appelez ''Diarra''. En me disant, en 1993, que celui qui mange cette viande devient Chef, vous n'avez pas menti. J'ai mangé du ''Diarra'' et je suis aujourd'hui Président de la République.
Je connais donc Djibrosso et Morondo (chez les Sénoufo), mais aussi Kani où j'ai passé la nuit, Diarabana, Duala []. J'ai mangé et dormi à tous ces endroits, que je considère aussi comme chez moi. Ce sont des endroits où, comme le disent les militaires, j'ai crapahuté, marché. J'ai marché parce qu'il faut chercher les voies, les unes après les autres. J'ai regardé les gens travailler dans les champs, les carrières de diamant, partout. Après quoi, je suis allé à Mankono où j'ai fait le même parcours. Je suis ici très à l'aise avec le peuple, avec les gens. Je suis ici chez moi, et donc content d'être là.
C'est pourquoi, je vous dis chers amis, qu'ici à Séguéla, la denrée la plus rare, la plus chère, c'est la paix. On ne nous jugera pas sur les raisons (le pourquoi) de la guerre ! Mais on nous jugera, demain, sur notre capacité à faire la paix. Aujourd'hui, qui se souvient de celui qui a tiré le premier coup de feu dans la guerre de sécession aux Etats-Unis ? Personne. Mais, on sait par contre que c'est Abraham Lincoln qui a fait la paix. C'est le faiseur de paix qu'on retient. Je ne suis pas venu pour qu'on fasse un jugement ; pour qu'on cherche qui a tiré le premier coup de feu ; et pourquoi il l'a fait ? Mais, la guerre étant survenue, comment faisons-nous pour la surmonter ? Comment faisons-nous pour la vaincre ? Comment faisons-nous pour ramener la paix ? Comment faisons-nous pour ramener la prospérité ? Tel est le problème qui s'est posé à nous, et qui se pose encore à nous. Nous avons essayé plusieurs choses. Nous avons essayé les discussions de Lomé, de Marcoussis, les Accords d'Accra I, II et III, de Pretoria I et II. La kyrielle de résolutions de l'ONU. Il y avait au moins une résolution tous les deux mois. C'est un ami Israélien qui m'a dit " Laurent, ne t'inquiète pas. Si les résolutions tuaient, nous autres, nous sérions déjà morts. Mais, prends courage et bats-toi ". Tout cela ne nous a pas apporté la paix. C'est alors qu'avec des amis, nous avons réfléchi. En nous disant que c'est nous-mêmes, ivoiriens, auteurs de la guerre, qui devrions également être auteurs de la paix. C'est le point de la réflexion sur ce qu'on a appelé par la suite, le ''dialogue direct''.
Nous avons contacté les uns et les autres. Je dois dire qu'au bout du compte, j'ai rencontré deux personnes qui ont rendu décisif cet accord de paix. D'abord, le Secrétaire Général des Forces Nouvelles, Soro Guillaume, qui a saisi la main que je lui tendais. Je voudrais profiter de cette tribune pour le remercier publiquement. C'est pourquoi, quand il y a une ombre quelque part, sur la paix, je ne peux le laisser seul aller expliquer. Je dois venir moi-aussi, expliquer, expliquer et encore expliquer. Donc, Soro Guillaume a saisi la main que je lui tendais. S'il ne l'avait pas saisie, ma main serait tombée un jour lorsqu'elle aurait ressentie la fatigue. Donc, je le remercie.
La deuxième personne, a été le Président Compaoré qui m'a dit : "Frère, viens, on va travailler au règlement de cette affaire. Je peux aider". J'ai répondu en disant ceci: "je t'ai accusé, et toi, tu m'as attaqué. Comment allons-nous nous arranger pour que cela soit crédible ? " [] Il a rétorqué en disant que nous allons nous appuyer sur la CEDEAO dont il allait bientôt prendre la Présidence. Nous avons attendu quelques mois, et, quand le Président a effectivement pris fonction, j'ai demandé à l'Institution sous-régionale d'endosser l'Accord de paix à venir. La CEDEAO a donné son accord et a confié la facilitation à son Président qui n'était autre que le Président Blaise Compaoré.
Je voudrais donc saluer Soro Guillaume et Blaise Compaoré pour avoir saisi la main que je leur ai tendue. Blaise Compaoré est un ami de longue date. On s'est engueulé réellement ; on s'est disputé. On l'a fait comme on le voit entre les dents et la langue. On s'est même mordu et la langue a eu mal, puisque les dents sont plus dures. Mais, maintenant, tout va mieux. L'affaire est réglée et la guerre est finie. Chers amis de Séguéla, je suis venu dire que la guerre est réellement finie. La guerre est totalement finie et il faut y croire. Si, de temps en temps, vous constatez quelques soubresauts, rappelez-vous de ce que les artistes de zouglou chantent en disant que " les moutons peuvent être dans le même troupeau, mais ils n'ont pas les mêmes prix ". Donc, il y en a qui marchent quelque peu à reculons, mais le troupeau avance quand même, et il arrivera à bon port.
Je suis donc venu vous apporter la bonne nouvelle, à savoir que la guerre est finie ; elle est définitivement derrière nous.
La 2ème nouvelle, c'est que le 30 novembre, il y aura l'élection présidentielle. Je le dis parce qu'il y en a encore qui sont à se demander si Gbagbo ne va pas les rouler. A ceux-là, je dirai qu'au lieu de se poser toutes les interrogations, il serait bon qu'ils se préparent à aller aux élections. Parce qu'elles auront effectivement lieu. Si vous n'êtes pas prêts, il ne faudra pas m'accuser, car cela fait longtemps que je crie que l'élection présidentielle aura lieu le 30 novembre.

Voici les deux nouvelles que je suis venu vous apporter. La paix encadre le développement. J'ai échangé sur cette question tout à l'heure avec les sages et les vieux. J'ai aussi écouté le Maire de Séguéla et Porte-Parole des populations. Quand il a demandé la visite d'Etat, il en a donné les raisons. C'est parce que ce département et les autres, Mankono, Touba, etcont des problèmes, qu'il faut régler. Et c'est mon rôle. Mais, j'ai dit aux anciens qui me disaient que les rues de Séguéla sont dégradées, comment voulez-vous que je demande à un entrepreneur de venir ici, si ce dernier a peur de se rendre dans votre ville ? La paix encadre donc le développement. Sans la paix, il n'y aura de développement nulle part, ni à Séguéla, ni ailleurs. C'est pourquoi, le Premier Ministre et moi-même, nous nous battons pour faire comprendre aux uns et aux autres que tituber et tomber, n'est pas le problème. Mais, reste dedans celui qui ne sait pas se relever. Si tu ne sais pas te relever, tu es perdu, parce que le jour où tu vas tomber, c'en est fini pour toi. C'est pourquoi, en apprenant à marcher, on apprend aussi à se relever.
Aujourd'hui, le moment est venu pour la Côte d'Ivoire de se relever. Je suis prêt pour cela. Il y a tellement de choses à faire ici à Séguéla.
A Séguéla, si les gens, au lieu d'avancer sur le chemin de la paix, reculent plutôt, c'est qu'il y a du diamant, du coton, du café, du cacao. Donc, il nous appartient de comprendre cela. Il nous appartient de nous tranquilliser et de régler sereinement le problème. Nous allons le régler, parce que nous avons besoin de la paix. Pour montrer au monde que nous sommes capables de dépassement, pour aller à la paix, et aux élections.
Nous attendons les élections pour nous-mêmes, parce qu'il faut renouveler nos Institutions, mais, le monde aussi attend cette échéance pour prendre acte de notre volonté à faire la paix. Les élections, c'est le contraire de la guerre. Donc, le monde entier, les Institutions internationales, attendent de nous, que nous fassions des élections, et non les proclamer, pour prendre acte de notre volonté de faire la paix.
Chers amis, chers frères, allons à la paix.
Chers amis, chers frères, très bientôt, les équipes de l'INS et de la SAGEM, vont passer pour faire les listes électorales. Inscrivez-vous, si pour porter au pouvoir, celui que vous voulez. Inscrivez-vous, si vous voulez exprimer votre suffrage.
Donc, la prochaine étape sera celle des inscriptions. Nous aurons entre 8 et 9 millions d'inscrits sur la liste électorale. Ce sera en même temps celle du recensement, car, si quelqu'un est inscrit sur une liste électorale, c'est qu'il est ivoirien. Celui-là recevra automatiquement après une carte d'identité. Chers amis, inscrivez-vous, car vous aurez la carte d'électeur, mais, après les élections, vous recevrez votre carte d'identité.
Chers amis, voici ce que je suis venu vous dire. Engagez-vous dans la paix. Engageons-nous sur la voie de la paix. Demeurons-y. Je vous appelle à un sursaut pour construire notre Nation. Notre Nation a besoin d'être bâtie après une épreuve comme celle que nous avons connue. Aucune nation ne se bâtit sans épreuve. Relisez l'histoire de tous les pays au monde : l'Allemagne, la France, l'Angleterre, les Etats-Unis, l'ItalieTous ces pays-là forment une Nation aujourd'hui parce qu'ils ont un avenir commun, une crise commune.
Quant à nous, profitons de cet accident qui nous est arrivé pour bâtir notre identité nationale, notre Nation. Nous savons désormais qu'il n'y a pas de Côte d'Ivoire sans Séguéla, Kani, Mankono, Korhogo, Tiapoum, Tabou. La Côte d'Ivoire, c'est le rassemblement de toutes ses filles et de tous ses fils.
Que Dieu bénisse la Côte d'Ivoire.
Je vous remercie.
Source: RTI 1ère chaîne

www.225.ci - A propos - Plan du site - Questions / Réponses © 2023