Depuis quelques jours, le front social est en ébullition. L'opposition politique assiste en spectateur au mouvement d'humeur.
Face à la fronde sociale qui prend du volume, l'opposition ivoirienne ne sait pas quelle attitude adopter. Faut-il soutenir ouvertement les travailleurs ou plutôt aider le gouvernement à faire face aux mouvements sociaux ? L'opposition tergiverse. Hormis le Parti ivoirien des travailleurs (Pit) qui a clairement pris position dans une déclaration, les autres préfèrent murmurer et jouer à cache- cache. Le 16 juillet, le parti du professeur Francis Wodié a mis les pieds dans le plat : le Pit exprime haut et fort sa solidarité avec tous les travailleurs pour la situation de pauvreté et de mendicité à laquelle les gouvernants s'emploient à les réduire. Le Pit soutient de toutes ses forces et de toute son énergie la lutte des travailleurs pour leur dignité et pour l'amélioration de leurs conditions de travail et de vie, pour leur pouvoir d'achat. Le Pit soutient l'action de l'Ugtci dans sa quête de bien être et de justice sociale . Les autres leaders politiques préfèrent observer la situation évoluer comme il lui plaira et de faire quelques commentaires mesurés lorsque l'occasion leur est donnée de s'exprimer. Dans les colonnes de notre confrère le Patriote, le secrétaire général du Pdci, Alphonse Djédjé Mady, donne son avis : Nous comprenons la manifestation des Ivoiriens. Nous partageons entièrement leur comportement et leur attitude. Nous pensons que par rapport au prix du carburant, l'on aurait dû faire autrement, c'est-à-dire prendre d'autres mesures pour que cette augmentation soit compréhensive. Elle est trop élevée . Pas plus !
Selon plusieurs sources, c'est aujourd'hui que le Rhdp fera connaître sa position. Il faut s'attendre à une déclaration passive de soutien aux grévistes car le Rhdp ne sait quoi faire dans l'actuelle crise. Le groupement des houphouëtistes n'a pas encore tranché s'il faut se battre contre le gouvernement dont il est membre, et comptable de la gestion ou se mettre du côté du peuple qui crie sa misère face aux augmentions sauvages des prix du carburant. Qui ne se souvient de cette déclaration de Alassane Dramane Ouattara, lors d'un déjeuner de presse, organisé à son cabinet : Personnellement, je considère que ces questions sont difficiles parce qu'on ne peut, tout simplement, pas accabler un gouvernement quand une crise est internationale. C'est vrai que, que ce soit le riz, le blétous ces produits ont connu une forte augmentation de leurs prix. Ce n'est donc pas spécialement un problème ivoirien, africain ou des pays en développement.
Quelle stratégie ?
Pour le président du Rdr, l'opposant n'est pas fait pour s'opposer à tout. Quand Anaky Kobena pense simplement qu'il faut inverser les rôles pour déterminer la conduite à tenir face à l'inflation généralisée. Que ferait Gbagbo s'il était actuellement l'opposant et Ouattara ou Bédié, président de la République? C'est ce que conseille le président du Mfa. Le Rhdp peut-il imiter l'opposant historique? Pas certain en l'état actuel de la situation sociopolitique. Laurent Gbagbo complètement sonné par les remous sociaux n'a pas de solution pour calmer la colère de ses concitoyens. Les Mahan Gahé et autres syndicalistes non représentatifs avec qui il a man?uvré activement n'ont pas réussi à faire lever les mots d'ordres de grève. Cette stratégie ayant échoué, c'est le temps des bouc-émissaires.
Les journaux arrimées à la refondation ont déjà vu la main de Ouattara et de Bédié derrière les manifestations de colère. Gbagbo n'attend que le déclic pour enfoncer cette porte déjà ouverte. Il est à la recherche de la moindre faille dans le dispositif de l'opposition pour politiser les grèves et dénaturer les revendications alimentaires de la population. L'opposition elle-même, apeurée qu'elle est par les menaces de remaniement ministériel qui ont été brandies, ces jours-ci n'est point prête à taper du poing fermement sur la table au risque s'attirer le courroux du chef de l'Etat.
Traoré M. Ahmed