vendredi 8 août 2008 par Nord-Sud

Le professeur Amoa Urbain a démontré sa connaissance de la tradition en faisant appliquer les procédures adéquates lors de la cérémonie de Bouna.


Bouna, ville située à près de 600 km d'Abidjan, a connu une ambiance particulière mercredi. Et pour cause, la caravane du Festival de la route des reines et des rois qui venait de boucler la veille, l'étape de Bondoukou, s'y est rendue. Pour la circonstance, les autorités coutumières et administratives ont mis les bouchées doubles pour que cette étape pour la magnificence de la tradition soit une réussite. De fait, toutes les danses et les masques de la région étaient au rendez-vous. La Place de la paix, choisie pour accueillir l'événement était noire de monde. Les "dozos" dans leurs apparats de chasseurs traditionnels n'ont pas raté l'occasion de faire tonner leurs mousquets. Toute chose qui mettait en "déroute" les non habitués de ces coups. C'est dans cette ambiance de fête que le recteur de l'université Charles de Montesquieu, Amoa Urbain et sa délégation composée des représentants du roi de Bondoukou et des rois Wê, Béninois et du chef de Djebonoua ont pris place sous la bâche principale. Arrivent alors les moments de civilités qui diffèrent d'une royauté à l'autre. Concernant celle de Bouna, en pareille circonstance, on apporte de l'eau à boire à l'hôte. Ce que le professeur et sa délégation ont accepté sans aucun problème puisque la procédure a été respectée. Mais les difficultés commencent à partir de la deuxième étape. En effet, les notables de Bouna avec à leur tête le docteur Ouattara Mamadou, s'adressent directement au professeur Amoa Urbain pour donner les nouvelles. Il s'exécute. Au moment où les notables pensaient que les choses étaient assez claires, l'initiateur du festival de la route des rois, va montrer qu'en dépit du fait que sa tête est dans l'académique, il a ses pieds dans la tradition. C'est ainsi qu'il a redemandé la parole et lancé "j'ai froid". N'ayant pas saisi certainement le sens profond de cette métaphore, la notabilité ne réagit pas. Alors, le professeur reprend la parole pour affirmer qu'au lieu de tout discours, les envoyés du roi devraient lui poser la question de savoir pourquoi, il a froid. Avant de les mettre sur la piste en indiquant ceci: "avant d'arriver ici, nous avons fait escale à Bondoukou. Et le roi des Abron, Adingra Kouassi Adjoumani, m'a fait accompagner par des chefs. C'était à eux que vous devriez vous adresser pour les nouvelles. Il n'était pas de mon devoir de donner en premier lieu ces nouvelles", a-t-il corrigé. En conséquence, le professeur a exigé un boeuf pour vice de procédure comme amende coutumière. En pareille circonstance, les notables de Bouna devraient tout en avisant négocier la réduction de l'amende. Malheureusement, les représentants du roi de Bouna, certainement ne maîtrisant pas tous les rouages de la tradition, disent au professeur qu'ils reconnaissent s'être trompés et acceptent de payer l'amende. Il n'en fallait pas plus pour que, le professeur double la mise. A partir de ce moment, les notables du roi de la cité des Koulango, paniquent et multiplient les erreurs. La cérémonie est donc bloquée. Après une vingtaine de minutes, le roi Zagassida Danadire fait convoquer le professeur et c'est dans sa cour royale que tout finit par rentrer dans l'ordre. Puisque le cérémonial d'accueil a été repris et fait selon les us et coutumes. Après quoi, le roi dans son discours, lu par son porte-parole Dikemory, tout en saluant les efforts du professeur, a affirmé que la colonisation a eu un impact sur l'effondrement des fondements culturels en Afrique. "L'Afrique en général, a-t-il dit, sous le choc violent de la colonisation et des religions importées, a été ébranlée dans ses fondements culturels. Ainsi des pans entiers de nos valeurs ont totalement disparu dans certaines régions ou sont en voie de l'être. Le royaume Koulango n'échappe pas à cette érosion." A sa suite, Amoa Urbain au cours d'une conférence de presse, a réaffirmé sa volonté de donner à la chefferie toutes ses lettres de noblesse. Et cela à travers un travail académique. "Il faut restituer la vérité à la vérité. Il faut que l'Afrique opère sa révolution culturelle en mettant au centre la chefferie", a-t-il indiqué. Et d'ajouter "le Conseil économique et social et la médiature sont des poids lourds. S'ils avaient joué leur rôle, la Côte d'Ivoire n'allait pas connaître la guerre." En lieu et place de ces institutions, il a préconisé la mise en place de la chambre des rois et chefs traditionnels? qui permettra de résoudre les problèmes des Africains" Pour cela, il faut donner la place qui sied aux chefs traditionnels dans la société. Le roi Adjahoutô, organisateur national du culte vaudou au Bénin, a demandé pour sa part aux rois et chefs traditionnels ivoiriens de veiller sur Amoa Urbain, eu égard au travail colossal qu'il fait pour la chefferie en Afrique. Si tel n'est pas le cas, le Bénin se verra dans l'obligation de le récupérer. Avant de lancer ce cri de coeur: "Les religions étrangères sont en train de décimer toutes les réalités traditionnelles en Afrique". Notons que Amoa Urbain avait également bloqué la cérémonie à Bondoukou pour non respect de la procédure traditionnelle. Il a été fait roi dans la cité des mille mosquées. Et son nom de sacre est Kobenan Kouakou Gouléga.


Issa T.Yéo (envoyé spécial)

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