mercredi 1 juillet 2009 par Le Temps

A tort ou à raison, les femmes sont accusées de raffoler les funérailles, les baptêmes et les mariages. Y a-t-il une raison particulière ? Le Temps a enquêté.

Ce jeudi 14 mai 2009, il est 16 heures. Abobo-Sogefia, non de loin de la cité policière. Ici, habite la famille Soumahoro Vado, un riche commerçant Mahouka. La cour grouille de monde. L'ambiance est à la fête. Les percussionnistes, avec leurs Djembé d'un côté, et deux autres groupes de chansonniers venus tout droit du Bafing, de l'autre, rivalisent d'ardeur pour donner plus de piment à cette cérémonie de baptême, du petit-fils des Bamba et des Diomandé. Le boucan, "l'atalaku" des géniteurs dit par des griottes triées sur le volet. "Cette griotte bien connue dans le milieu Mahou particulièrement et malinké en général, est présente à toutes les cérémonies du groupe Badegnan", nous indique dame Mariam S., membre de cette association. En fait, cette association regroupe environ 50 femmes "capables" et grandes commerçantes de pagnes et d'articles électroménagers. Elles font régulièrement, l'axe Abidjan-Dubaï. En décidant de mettre sur pied "Badegnan", qui veut dire fraternité en Malinké, il s'agit pour elles de s'entraider et de s'assister en cas de malheur ou d'évènements heureux comme les naissances et les mariages. Pour l'occasion, dans leurs boubous dégageant un fort parfum d'encens, elles ne peuvent s'empêcher d'esquisser des pas de danse et " travailler " sur les griottes. Mais aussi offrir conformément au règlement de leur association, de fortes sommes d'argent et du savon à dame Soumahoro, une des leurs. A côté de ce groupe de femmes, une autre du nom de Saphir, existe depuis août 2003. Il comprend à ce jour 25 membres, issues de tous les corps de métiers. Mme Diarra, la trentaine révolue, travaille dans une entreprise spécialisée dans le courrier express et est un membre influent de Saphir. Approchée, elle ne s'empêche pas de dire le bien-fondé de la création de Saphir. "Nous sommes, dit-elle, 25 femmes issues de toutes les catégories socioprofessionnelles qui avons décidé de nous mettre ensemble pour non seulement nous entraider, nous épanouir mais nous distraire. Car tout cela contribue à l'épanouissement de la femme. Ne l'oublions pas, militer dans une telle association permet non seulement une ouverture d'esprit, mais la confiance en soi".

Et la femme de l'Ouest dans tout ça ?

Les femmes de l'Ouest, particulièrement les femmes Bété, pour leur part, accusées à tort ou à raison d'aimer les funérailles s'en défendent. Une d'entre elles, Mme Marie Ligué Antoine, cadre au ministère d'Etat, ministère du Plan et du Développement, explique : "C'est un faux procès qu'on nous fait. Le peuple bété d'une manière particulière, et d'une manière générale les autres peuples, sont solidaires. On va aux funérailles pour soutenir, qui un frère, qui une s?ur ou une amie qui a perdu un être cher. Contrairement à ce qui se dit, il serait difficile qu'en de telles circonstances douloureuses, on donne rendez-vous à un prince charmant. Personnellement, je ne suis pas forcément obligée d'aller aux funérailles pour rencontrer un amant. Cela peut se faire ailleurs". Poursuivant, Mme Ligué trouve une autre explication à ce cliché qui est collé à la femme bété. "Dans la société Bété, les funérailles reposent sur les femmes. Ce sont elles qui font non seulement la cuisine mais aussi tiennent la partie culturelle. Ce sont elles qui dansent. Quand il y a un décès, ce sont elles qui pleurent. Pas les hommes". Il n'y a pas que les femmes malinké qui aiment les baptêmes et les mariages. "En pays Adjoukrou, nous apprend B. Amari, la fête de la nourrie est célébrée avec faste. Car, il s'agit de célébrer la procréation de la femme qui sort d'un accouchement où, elle aurait pu perdre la vie. Elle est encore plus importante et obligatoire pour celles qui viennent d'être mères pour la première fois ", avant de nous donner des détails sur le déroulement de " la fête de la nourrice " : " Elle se déroule 3 mois ou six mois après l'accouchement. C'est une sortie prestigieuse au cours de laquelle la nourrisse est parée de bijoux et de pagnes de valeur. C'est aussi une occasion pour certaines familles de faire étalage de leurs richesses". Tout juste à côté, dans les "3 A", c'est-à-dire chez les Alladjan, les Akouri et les Ahizi, sa célébration a une signification particulière. "Chez les Tiagba, la fête de la nourrice tient sur trois mois. Des dispositions particulières sont prises pour magnifier la femme qui vient de donner naissance à un enfant. Le jour de sa sortie, on l'habille dans ses plus beaux habits et elle est parée de bijoux. Elle fait ensuite le tour du village, pour dire merci à tous les voisins. Après quoi, elle revient à la maison pour en ressortir plus belle et mieux vêtue qu'avant", nous apprend M. K. Dipro, originaire du village de Tiagba.

Bamba Mafoumgbé
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