jeudi 3 décembre 2009 par Le Temps

Au cours des deux dernières années, l`autorité portuaire, en parfaite synergie avec la communauté portuaire, s`est attelée à mettre en ?uvre des projets et des outils visant à mieux nous rapprocher de notre clientèle d`une part, et à apporter des réponses adéquates aux problèmes auxquels sont confrontés nos partenaires/clients dans l`exercice de leurs activités au port d`Abidjan d`autre part. Mais avant de vous dévoiler l`ensemble de ces solutions, je voudrais vous inviter à refaire avec moi, le parcours qui nous a conduit à ce résultat. Le port d`Abidjan, comme vous le savez, est un port essentiel en Afrique, en ce sens qu`il joue au niveau sous-régional un rôle important d`outil d`intégration économique de par sa position qui fait de lui la principale porte océane pour les pays sans littoral tels que le Burkina, le Mali et le Niger. En situation normale, au cours des années antérieures à 2002, notre port réalisait avec ces trois pays un trafic de transit moyen de l`ordre de 1200000 tonnes par an, ce qui nous plaçait dans une position confortable de port de transit majeur sur la Côte ouest-africaine. Nous envisagions à cette période des stratégies pour renforcer ce positionnement et accroître nos parts de marché. C`est alors que survint, en septembre 2002, la plus grave crise de l`histoire de notre pays, qui va non seulement geler nos ambitions, mais impacter négativement l`ensemble du trafic du port d`Abidjan et particulièrement celui du transit. En effet, alors que nous attendions une croissance d`au moins 10% à fin 2002 par rapport à 2001 au niveau du trafic de transit, les effets immédiats de la guerre ont eu pour conséquence une croissance très faible de 1,05 %. L`année 2003 sera encore plus désastreuse avec un trafic de 206.000 tonnes, soit une chute de 85 % par rapport à 2002. Devant cette situation difficile, pour ne pas interrompre les activités portuaires et permettre surtout aux opérateurs des pays de l`hinterland de poursuivre l`enlèvement de leurs marchandises, nous avons très rapidement imaginé des stratégies de sauvetage. Il s`agit notamment : du maintien des représentants en fonction dans les pays sans littoral jusqu`en 2005 en dépit de la guerre pour garder le contact avec les opérateurs économiques; de la prise de dispositions administratives pour exonérer les 230000 tonnes de marchandises en souffrances dans les magasins au port et la simplification des procédures pour leur enlèvement ; de l`ouverture dans un premier temps d`un Couloir économique sécurisé Est pour les opérations de post acheminement des marchandises en direction des pays de l`Hinterland. De l`ouverture dans un deuxième temps d`un Couloir économique sécurisé Nord qui a consisté en l`organisation de convois de camions escortés par les forces impartiales ; de l`organisation de plusieurs missions dans la zone nord du pays au plus fort de la crise en collaboration avec l`Office ivoirien des chargeurs, l`Observatoire de la fluidité des transports pour débattre des questions de sécurité, de tracasseries et de coût de l`escorte sur le corridor de transit ; de l`organisation de plusieurs missions dans les pays sans littoral pour rassurer les opérateurs et les ramener vers le port d`Abidjan. Ces missions ont été suivies de convois tests avec l`implication active des ministères du Commerce, du Transport, des Forces de défense et de sécurité, de l`Administration des douanes et de la communauté portuaire d`Abidjan; de l`organisation d`un séminaire à Grand-Bassam sur la réglementation des opérations de contrôle routier du 17 au 19 janvier 2005 pour permettre, entre autres, la mise en place de dispositifs institutionnels de prise de sanctions contre les barrages non autorisés; De l`organisation de rencontres avec la Sir, la Gestoci, la Sitarail, les sociétés de cimenteries et la Fnisci pour trouver des solutions idoines aux préoccupations des opérateurs de l`hinterland relativement au transport des marchandises. De l`organisation d`un séminaire sur le repositionnement stratégique du Port autnome d`Abidjan les 4,5 et 6 octobre 2005, pour évaluer la position du port d`Abidjan et mettre en application des résolutions en vue d`améliorer le trafic de transit. Toutes ces mesures courageuses, nous ont permis de retrouver une croissance encourageante au niveau du trafic de transit qui s`est fixé successivement à 530000 tonnes en 2004, 762000 tonnes en 2005 et 1002000 tonnes en 2006, soit une croissance de plus de 47 % sur la période allant de 2004 à 2006. Tous ces efforts ont donné lieu à des encouragements et félicitations de la part du Président de la République, son Excellence monsieur Laurent Gbagbo et recréé un climat de confiance entre les opérateurs économiques des pays de l`hinterland et le Port autonome d`Abidjan.


L`atelier qui déclenche tout

C`est dans ce contexte de reprise qu`intervient, le 4 mars 2007, l`accord politique de Ouagadougou qui offre une meilleure lisibilité dans le processus de sortie de crise de notre pays. Profitant de cette embellie de la situation sociopolitique l`Autorité portuaire, soucieuse de repositionner le port d`Abidjan, a organisé les 15 et 16 mai 2007, en collaboration avec la Communauté portuaire, un important atelier sur thème " Compétitivité du port d`Abidjan : enjeux et perspectives ". Ont été associés à cet atelier les partenaires institutionnels des pays sans littoral, qui ont soulevé les préoccupations suivantes. La multiplicité des barrages ; les coûts excessifs de l`escorte spéciale ; les tracasseries routières ; l`insuffisance de magasins pour entreposer leurs marchandises ; la cherté du Port d`Abidjan ; la caution douanière exigée au passage des marchandises en transit jugée trop élevée.
Sur la base de ces préoccupations, et fort des recommandations issues du séminaire, nous avons organisé une série de missions commerciales d`une part, auprès de nos partenaires et clients d`Europe et d'autre part, auprès de ceux du Mali, du Burkina et du Niger, pour les informer des décisions immédiates arrêtées et recueillir à nouveau leurs préoccupations.

L`engagement dans l`action forte

En ce qui concerne les pays de l`hinterland, nous avons pris les décisions suivantes : La mise en ?uvre d`une nouvelle forme d`escorte spéciale en collaboration avec l`Office ivoirien des chargeurs pour accompagner les camions jusqu`aux frontières ; la construction de nouveaux magasins pour accroître les capacités d`accueil des marchandises des pays de l`hinterland ; l`initiation d`une étude pour envisager la possibilité de réduire les frais de manutention. L`initiation d`actions de sensibilisation auprès du gouvernement et des Forces de défense et de sécurité pour assurer la fluidité au niveau du corridor de transit.

Les atouts politiques de proximité

Par ailleurs, le point focal de ces missions dans l`hinterland a certainement été la mise en ?uvre d`une politique de proximité par l`installation de natifs de ces pays comme représentants du Port d`Abidjan, en remplacement des cadres ivoiriens qui avaient été rappelés à Abidjan depuis 2005.
A l`issue de ces missions riches en enseignements, nous avons poursuivi, dès 2008, la recherche et la mise en ?uvre des solutions aux préoccupations soulevées par nos clients. Ainsi, avons-nous planifié et réalisé les actions suivantes : L`approfondissement des quais sud pour accueillir des navires de 12 mètres de tirant d`eau. La poursuite de la politique de spécialisation des quais pour une optimisation du traitement des navires et des marchandises. L`accroissement de la capacité d`accueil des marchandises par la construction de nouveaux magasins d`une superficie totale d`environ 25000 m² et des silos à grains pour le stockage des céréales à destination des pays de l`hinterland. Nous envisageons très prochainement la construction de magasins dans la périphérie du Port.

Les projets forts du moment

Le Port autonome d`Abidjan, dans sa quête permanente de satisfaction de la clientèle, a initié plusieurs projets d`envergure. Au nombre de ceux-ci, nous notons le ferroutage, le serveur vocal interactif, l`affichage dynamique, la ligne verte, le site Web et le tracking des camions. Le projet de ferroutage des marchandises nigériennes en provenance et à destination du port d`Abidjan via Ouagadougou est né de notre volonté de rendre le corridor ivoirien compétitif sur le marché nigérien. En effet, au regard de l`évolution du trafic de transit du Niger au départ des ports de Cotonou, Tema, Lomé et Abidjan, un constat relatif à la baisse progressive du volume de trafic nigérien sur le corridor ivoirien avait été fait. A l`analyse de ce constat, les raisons essentielles soulevées sont en premier lieu la distance de 1708 km séparant le port d`Abidjan de Niamey. La seconde explication à cette baisse se situait au niveau des tracasseries routières rencontrées par les transporteurs nigériens utilisant le corridor ivoirien. Cependant, le trafic maritime nigérien ayant triplé en 7 ans et s`inscrivant dans une courbe ascendante, l`on constate qu`en dehors du Port de Cotonou qui est le port naturel du Niger, les ports de Lomé et de Tema traitaient 25% de ce trafic et ce, malgré le désavantage en terme de distance. Ainsi, au regard de la part de marché croissante de ces ports, il semble juste de dire qu`au-delà de la distance qui reste un facteur déterminant de choix du port de transit, la rapidité des opérations, les facilités de transport ainsi que les délais d`acheminement demeurent des critères importants dans les choix de schémas logistiques. Face à cette réalité, et aux fins d`offrir une alternative compétitive aux opérateurs nigériens, le port d`Abidjan a proposé en 2008 la mise en place d`un schéma de transport multimodal combinant le rail et la route entre Abidjan et Niamey pour l`acheminement des marchandises nigériennes. La mise en ?uvre de cette solution permettrait de, réduire de façon très significative les coûts d`acheminement des marchandises grâce à la grande capacité de transport de Sitarail. Ce qui permettrait une économie d`échelle ; éviter les tracasseries sur le tronçon Abidjan- Ouagadougou ; capter une plus grande part du trafic maritime nigérien traité par les ports concurrents.


L`apport des partenaires et les mesures économiques prises

L`adhésion de l`ensemble des acteurs économiques et institutionnels nigériens à cette solution, a conduit le 28 février 2008 à la mise en place d`un Comité technique chargé d`étudier les conditions de la mise en place de la solution et d`en assurer sa mise en ?uvre et son suivi. Les études réalisées par ce comité ont permis de situer la compétitivité du port d`Abidjan sur les marchés du vrac et des conteneurs et d`engager des négociations avec les opérateurs de la plate-forme portuaire d`Abidjan, les Douanes ivoiriennes et burkinabé, Sitarail le Cnut, les Chambres de commerce et d`industrie du Niger et du Burkina Faso, ainsi que les syndicats des transporteurs de ces deux pays, à l`effet de rendre compétitive la solution proposée. De ces négociations, il en a résulté les baisses de tarifs suivants. Au niveau du transport, sur le corridor Abidjan-Ouagadougou : Prix du vrac : 23000 Fcfa au lieu de 30000 Fcfa, soit une baisse de 23% ; Prix conteneur 20/40` : 13% de baisse. Sur le corridor Ouagadougou-Niamey. Le prix du vrac est passé de 27000 Fcfa à 24000 Fcfa la tonne. Au niveau de la manutention, l`acconage et le relevage des conteneurs 20`/40` (pieds), soit 35% de baisse. Au niveau du Port autonome d`Abidjan adoption d`une tarification forfaitaire des conteneurs à la boîte. C`est ici le lieu de féliciter l`ensemble de nos partenaires qui, à la suite des négociations ont consenti des baisses importantes des prix de leurs prestations, permettant ainsi la réalisation de ce projet.


Le fruit des efforts

Après plusieurs mois de travaux et négociations, nous avons obtenu deux contrats de transports sur le Niger portant sur 12 mille tonnes de riz et de sucre en conventionnel qui ont permis d`organiser le convoi test sur Niamey. Pour mémoire, depuis plusieurs années, les importations nigériennes par le port d`Abidjan tournent autour de 1.500 tonnes par an. Ces contrats ont permis l`escale au port d`Abidjan de trois navires, aux mois de juin et juillet 2009. Le ferroutage a permis d`obtenir un coût à la tonne rendu à Niamey de 59 000 F contre 60 000 F à Cotonou, port naturel du Niger en moins de 10 jours.
Je voudrais à cet effet rendre un vibrant hommage aux administrations douanières du Burkina-Faso et de la Côte d`Ivoire, au Cnut, la Sitarail, aux Chambres de commerce et d`industrie du Burkina Faso et du Niger pour leur totale implication et leur assistance permanente qui ont permis la réussite du projet de ferroutage.


L`avantage du Projet ferroutage

Le projet de ferroutage a permis ainsi le repositionnement du port d`Abidjan sur le marché du transit maritime du Niger qui représente environ 2 millions de tonnes de marchandises à l`import comme à l`export par an. Il s`agit là d`un marché important qui pourrait améliorer considérablement notre trafic de transit au cours des prochaines années et nous permettrait ainsi de renforcer notre place de premier port de transit sur la Côte ouest-africaine. Aujourd`hui, la qualité du pré et post acheminement constitue un facteur important de compétitivité d`un port et détermine le choix du chargeur. Au regard des résultats encourageants obtenus, nous devons donc tout mettre en ?uvre pour maintenir les prix de nos prestations à un niveau compétitif conformément aux engagements pris afin de préserver la compétitivité de notre corridor face aux ports concurrents.


La recherche permanente de la satisfaction des clients et partenaires

La recherche permanente de la satisfaction des clients et partenaires étant pour nous une exigence fondamentale, le port d`Abidjan a mis à la disposition des opérateurs économiques de nouveaux outils. Il s`agit d`un site Internet totalement rénové disponible à l`adresse www.paa-ci.org; d`un serveur vocal disponible au (00225) 21 21 62 00 à partir d`un téléphone fixe ou d`un téléphone portable ou encore par Sms au 98 088 pour avoir des informations sur la situation des navires et leurs consignataires, les cadences portuaires, les services utiles à joindre tels que la capitainerie, le service clientèle, le service domanial ; d`une ligne verte disponible au 80 00 88 88 permettant d`être à l`écoute de toutes les préoccupations des clients et partenaires du port d`Abidjan. La mise en ?uvre d`un système d`affichage dynamique qui diffuse aux opérateurs nationaux et à ceux des pays de l`hinterland des informations à caractère commercial, notamment le planning des navires et trafic des marchandises à temps réel. D`un système de Tracking par satellite des camions et conteneurs en provenance ou à destination des pays de l`hinterland. Il s`agit d`un système de géolocalisation des camions ou conteneurs par réseau satellitaire. Ce système concernera le trafic de transit des pays de l`hinterland. En effet, le tracking est une solution complète aux multiples atouts et adaptée au besoin de traçabilité et de sécurité. A la différence du système Gsm/Gprs, cette solution présente beaucoup plus d`avantages grâce à sa couverture mondiale et permet une remontée des informations sans interruption et en temps réel. C`est dire qu`aucune action humaine extérieure ne peut perturber le bon fonctionnement du système, en dehors de l`exploitant satellitaire, le Centre national d`étude spatiale (Cnes) qui même avec son action de maintenance ne perturbe aucunement la diffusion des données. Ce système sera couplé au Sygap Web et permettra aux chargeurs abonnés d`obtenir à partir de son numéro B/L (connaissement) la situation de sa marchandise, d`identifier le camion affecté au transport de la marchandise et son itinéraire jusqu`au magasin du chargeur. Il est à noter que tous les pays du monde ont une cartographie numérique disponible sur la plate-forme. En définitive, ce système nous permettra de repérer tous les camions et conteneurs équipés de notre système quel que soit le lieu où il se trouve. Le Port autonome d`Abidjan, à travers toutes ces innovations technologiques et logistiques ambitionne d`établir un climat de confiance entre les opérateurs économiques et l`administration des Douanes ivoiriennes et les institutions républicaines de Côte d`Ivoire dans le cadre des échanges commerciaux.``


Propos recueillis par
Simplice Allard
Envoyé spécial à Ouagadougou

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