Ambassade cherche ambassadeur. C'est le constat que l'on fait en entrant à la représentation diplomatique de Côte d'ivoire en France. Car le professeur Aimé Pierre KIPRE, préoccupé par l'organisation du cinquantenaire de l'indépendance de la Côte d'Ivoire, a déserté les locaux du 102 avenue Raymond Poincaré pour Abidjan.
Il est difficile de trouver la signature de l'ambassadeur Aimé Pierre KIPRE sur les notes de service de l'ambassade de Côte d'Ivoire en France. Depuis qu'il a été nommé par son collègue professeur et président Laurent Gbagbo comme président du comité d'organisation du cinquantenaire de l'indépendance de la Côte d'Ivoire, l'ambassadeur de la Côte d'Ivoire en France brille par son absence dans les locaux de la représentation diplomatique ivoirienne en France. Depuis quelque temps, ce sont les " par ordre " (P.O) accompagnés de la signature de M. Timothée EZOUAN, premier conseiller à l'ambassade de Côte d'Ivoire que l'on retrouve aux bas des courriers officiels de l'ambassade ivoirienne en France. L'absence de Pierre KIPRE au 102 avenue Raymond Poincaré est tellement évidente que plusieurs personnes s'en plaignent. " La dernière fois, après une marche de protestation pour le maintien de la date de l'élection présidentielle, nous avions voulu remettre une lettre à l'ambassadeur. Malheureusement, nous n'avons pu le rencontrer. C'est son premier conseiller qui nous a reçus ", se souvient M. Marcel YOUPEH, président du Rhdp Europe. Nous ne doutons pas de la qualité des collaborateurs de l'ambassadeur. Cependant, la logique voudrait bien que le chef de mission soit auprès des Ivoiriens en France pour défendre au mieux les intérêts de ces derniers. Depuis plus de cinq mois, les étudiants boursiers ivoiriens en France n'ont perçu aucun centime. Menacés d'expulsion de leurs chambres dans les différentes cités universitaires, ces derniers ont paralysé les locaux de l'ambassade le lundi 21 décembre dernier. " Nous avions voulu rencontrer M. Pierre KIPRE en personne pour lui faire part de nos problèmes. Malheureusement, il était à Abidjan. C'est l'attaché de défense de l'ambassade, le général Camille LOHOUES et le premier conseiller Timothée EZOUAN qui ont échangé avec nous ", regrette le président des étudiants bousiers ivoiriens de France, François Adou. Aujourd'hui, c'est l'organisation du cinquantenaire de l'indépendance de la Côte d'Ivoire qui préoccupe le professeur Pierre KIPRE. Ambassadeur de Côte d'Ivoire en France et président du comité d'organisation du cinquantenaire de l'indépendance de la Côte d'Ivoire. Cette double casquette est-elle normale pour un diplomate ? Pour les vrais diplomates, la réponse est négative. "Dans les conventions diplomatiques internationales, rappelle un ex-ambassadeur de la Côte d'Ivoire en France qui a voulu garder l'anonymat, un ambassadeur en mission auprès d'un autre pays ne peut exercer une deuxième mission. " La preuve de l'amateurisme des refondateurs est, encore une fois, mise à nu. A l'ambassade, personne n'ose se prononcer sur cette situation. Car là-bas aussi, Pierre KIPRE a réussi la prouesse d'imposer sa dictature. Des membres de la société civile et de certains partis politiques ne veulent pas rester inertes face à cette situation. " Nous sommes en train de préparer un courrier pour saisir le Quai d'Orsay (Ministère français des Affaires étrangères) afin de lui faire constater l'abandon de poste de l'ambassadeur de la Côte d'Ivoire. Nous souhaitons que les chefs des diplomaties française et ivoirienne trouvent une solution à cette situation ", a confié M. Joël TCHETCHE, membre de la délégation générale du Pdci-Rda. Avec son budget de 15 milliards de Fcfa pour l'organisation d'une fête, il y a de quoi à ne plus se faire griller les fesses dans les bureaux d'une ambassade. Mais, malheureusement, le professeur donneur de conseils se plait à rouler sur deux salaires. Nous sommes vraiment sous la refondation. Un régime ou tous les actes posés sont des insultes au peuple. En Côte d'Ivoire, il n'y a pas d'intellectuels de la carrure de Pierre KIPRE pouvant assurer l'une où l'autre de ces deux fonctions. En tout cas, des voix sont en train de s'élever pour que l'Ambassadeur fasse un choix. Ou bien il décide d'être à Paris pour assumer pleinement son rôle d'ambassadeur et défendre les intérêts des Ivoiriens en France, ou bien il opte pour la présidence du comité d'organisation du cinquantenaire pour continuer sa grande vadrouille à travers le monde pour faire la promotion d'une fête qui n'a de sens que pour les refondateurs.
Eugène YOBOUET
Correspondant permanent à Paris