mardi 25 mai 2010 par Le Nouveau Réveil

Le nettoyage des écuries d`Augias par le commissaire du gouvernement, le procureur militaire Ange Bernard Kessi Kouamé, s`est poursuivi avant-hier, avec l`arrestation d`au moins six (6) policiers, dont un commissaire de police, une femme officier et des capitaines. Il s`agit du commissaire Konan Kouassi du commissariat de Bonoua, du Lieutenant Sanogo Djénéba, du capitaine-major Tanoh Koutou Jean François, du sous-lieutenant Tokalo Bi Zinvo et du sergent chef Minlin Say. Le commissaire Konan Kouassi et le Lieutenant Sanogo Djénéba ont été arrêtés et écroués à la Mama (Maison d`arrêt et de correction militaire), avant-hier mercredi, tandis que les quatre (4) ont été placés sous mandat de dépôt depuis au moins deux semaines. Tous sont inculpés d`escroquerie, d`abus de confiance et de complicité d`escroquerie et de corruption. Leur procès devrait s`ouvrir le lundi prochain 7 juillet 2008. Les faits mis à leur charge sont liés au concours d`entrée à l`Ecole nationale de police. Ces agents de police font partie d`un puissant réseau d`escroquerie et de corruption qui percevait de fortes sommes d`argent des candidats au concours, leur garantissant la réussite ". Ces informations ont été publiées dans les colonnes de " Soir Info " dans son édition du 5 juillet 2008. Elles ont d`ailleurs fait l`objet de publication dans plusieurs journaux ivoiriens, à cette même période. Nous les citons, pour permettre au lecteur de comprendre ce qui va suivre.

Manipulation de l`opinion
En réalité, le commissaire du gouvernement, Ange Kessi, n`a jamais arrêté le commissaire Konan Kouassi, du commissariat de Bonoua. Il y a eu quelque part, dans cette affaire, et notre enquête nous a permis de le découvrir, une volonté manifeste de manipuler l`opinion nationale, en faisant passer des faits qui se sont produits dans le courant de l`année 2006, comme s`étant produits en 2008 et en les mélangeant avec des affaires récentes pour faire croire qu`une bataille féroce était menée contre la corruption des fonctionnaires de police par Ange Kessi. De quoi s`agit-il en réalité ? En avril 2006, l`officier de police Konan Kouassi, précédemment chef de protocole du ministre Martin Bléou, ancien ministre de la Sécurité, réussit le concours professionnel des commissaires de police et entre à l`Ecole nationale de police pour une formation professionnelle. Là, il rencontre le sergent Sanogo Djénéba (élève officier), également en formation professionnelle. Cette dernière lui demande alors s`il a la possibilité de l`aider à faire rentrer trois de ses parents proches à l`Ecole de police. L`officier Konan Kouassi qui a quelques " relations " au niveau de la hiérarchie des services de police pour avoir travaillé au ministère de la Sécurité, se rend à la police judiciaire, rencontrer un commissaire qui y travaillait et qui n`est plus de ce monde dont nous taisons le nom par respect pour sa mémoir. Après un entretien avec ce dernier, l`officier Konan Kouassi accepte d`aider le sergent Sanogo Djénéba. Cette dernière lui remet donc les dossiers de ses trois parents plus la somme de 1 million de francs. Mais après ces trois premiers dossiers, une semaine plus tard, 30 autres dossiers vont être remis à l`officier Konan Kouassi par le sergent Sanogo Djénéba pour un total de 22 millions. L`argent et l`ensemble des dossiers sont ensuite transmis au commissaire de police contacté par l`officier Konan Kouassi. Malheureusement, aucun des 33 candidats ayant payé pour rentrer à l`Ecole de police ne sera admis.

Poursuivi pour restituer l`argent des candidats corrupteurs
L`officier Konan Kouassi, devant cette situation, saisi son " partenaire ", le commissaire de police en service à la police judiciaire. Ce dernier, en partance pour une mission en France, promet de faire le nécessaire dès son retour. Mais à son retour, pour une raison indépendante de sa volonté, il ne pourra rien faire pour restituer l`argent. Les choses en resteront là, provisoirement. Sa formation finie, l`officier Konan Kouassi est affecté comme commissaire de police adjoint, au commissariat de police de Bonoua. En fin d`année 2006, il reçoit une convocation de l`Inspection de police. Là, il rencontre une dame répondant au nom de Viviane Tiéboué Lou qui lui apprend qu`elle fait partie des trois personnes qui ont remis le million au sergent Sanogo Djénéba. Mais curieusement, elle affirme que c`est le désormais commissaire de police qui s`était rendu chez elle à domicile pour lui dire qu`il avait le pouvoir de l`aider à rentrer à l`école de police. Le commissaire nie cette version des faits et argue ne connaître que le sergent Sanogo Djénéba et qu`il n`a jamais rencontré directement aucun des candidats.

Le tribunal militaire entre en scène
En janvier 2007, le commissaire Konan Kouassi est convoqué au tribunal militaire par le procureur Ouattara Steven`s. Là, le procureur Ouattara lui apprend qu`il est poursuivi par Ouattara Baba qui lui réclame 7 millions, Touré Fanta qui lui réclame 10 millions et le sergent Sanogo Djénéba, 500 mille francs, le tout, faisant partie des 23 millions. Le commissaire Konan Kouassi reconnait avoir effectivement reçu les 23 millions mais précise qu`il les a entièrement reversés à son mandant. Mais celui étant désormais dans l`impossibilité de restituer l`argent, il prend l`engagement de rembourser entièrement l`argent. Mais le procureur Ouattara Steven`s veut une preuve de sa bonne foi. Le commissaire Konan Kouassi verse donc séance tenante, la somme de 1 million. Selon nos sources, le procureur, après ce versement de 1 million, a requalifié l`affaire qui était pénale, en " affaire civile ". Le 12 janvier 2007, une autre rencontre est organisée au bureau du procureur Ouattara Steven`s. C`est que le commissaire Konan Kouassi, entre temps, avait informé son oncle, N`guessan Yao, avocat inscrit au barreau de Paris, de son immense infortune. Ce dernier, devant le procureur Ouattara Steven`s, prend l`engagement de rembourser entièrement les 23 millions de francs " au plus grand tard, fin mars 2007 ". Il consigne cette volonté dans un document dont nous avons pu obtenir copie et auquel est jointe la photocopie de sa carte d`avocat inscrit au barreau de Paris. Mais à la date convenue, l`avocat ne peut honorer son engagement. Les plaignants commettent alors un huissier qui adresse une sommation de paiement à l`avocat. Des tractations commencent alors pour trouver une solution. Cela va durer jusqu`en juin 2008. Ne voyant pas venir le remboursement, Ouattara Baba, (qui selon nos sources a remis en mains propres au moment des faits, la somme de 4 millions au commissaire Konan Kouassi, soit 2 millions pour lui-même pour devenir commissaire et les 2 autres pour un autre candidat), le sergent Sanogo Djénéba, devenue officier et Touré Fanta, selon les termes d`un courrier adressé par le commissaire Konan Kouassi au président de la Chambre judiciaire de la Cour Suprême et dont nous avons obtenu copie, portent plainte auprès du substitut du procureur résident de la section de tribunal de Grand Bassam. Le 1er juillet 2008, le commissaire adjoint de Bonoua, Konan Kouassi est convoqué par le substitut du procureur résident de la section de tribunal de Bassam, Mme Assi Juliette.

Le commissaire Konan Kouassi est arrêté pour " trafic d`influence "
En compagnie du préfet d`Aboisso et du commissaire chef de service De Bonoua, le commissaire Konan Kouassi répond à la convocation. Dans le bureau du substitut, il trouve le commandant de la brigade de gendarmerie de Bassam. Après quelques échanges avec le substitut, le commissaire Konan Kouassi, sous les yeux du préfet d`Aboisso et du commissaire chef de service de Bonoua, et bien qu`étant en tenue militaire et armé, est mis aux arrêts et gardé à vue dans les locaux de la gendarmerie de Bassam. Le 3 juillet 2008, il est placé sous mandat de dépôt et écroué à la prison civile de Bassam, où il est détenu au même titre que les gangsters qu`il a fait arrêter lui-même à Bonoua. Depuis 22 mois, il est détenu sans jugement, pour " trafic d`influence ". Il n`a donc jamais fait l`objet d`une arrestation par le commissaire du gouvernement Ange Kessi. Pourquoi ce dernier a-t-il laissé la presse dire le contraire ?

Violation des règles en vigueur
Les députés de Côte d`Ivoire bénéficient d`une immunité parlementaire qui les protège contre toute arrestation, tant que cette immunité n`est pas expressément levée. C`est ce qui explique, pour exemple, que le député Fpi d`Agboville, est en liberté, bien qu`inculpé comme ceux qui sont en prison, dans le cadre de l`enquête dans la filière café-cacao. Les magistrats, dans l`exercice de leur fonction, bénéficient de cette même protection de la loi. Ainsi, ils ne peuvent l`objet d`arrestation dans le cadre d`une procédure pénale, sans l`autorisation de la Cour Suprême. Les commissaires de police qui sont des officiers de police judiciaire au même titre que les magistrats, bénéficient de cette même protection de la loi. On ne peut les arrêter sans l`accord de la Cour Suprême. C`est du moins ce que stipulent les articles 648 et 656 du code de procédure pénale : " Lorsqu`un officier de police judiciaire est susceptible d`être inculpé d`un crime ou d`un délit qui aurait été commis dans la circonscription où il est territorialement compétent, hors ou dans l`exercice de ses fonctions, le procureur de la République présente sans délai requête à la Cour Suprême qui procède et statue comme il est dit à l`article 648 ". Lequel article précise que si " la Cour Suprême estime qu`il y a lieu à poursuite ou s`il y a constitution de partie civile, désigne la juridiction où l`affaire sera instruite et jugée ". En l`espèce, toutes ces barricades posées par la loi pour protéger les officiers de police judiciaire contre les agissements expéditifs de quelque autorité, ont été aisément enjambées. Le substitut du procureur de Bassam a procédé à l`arrestation et à l`incarcération du commissaire Konan Kouassi, sans en référer à la Cour Suprême. Et depuis plus de 22 mois, ce dernier est incarcéré sans jugement à la prison civile de Bassam. Au mépris de la loi. Toutes ses demandes de mise en liberté provisoire ont été systématiquement balayées du revers de la main.

Tribunal compétent d`office procédure nulle

Le jeudi 6 mai 2010, nous nous sommes rendus à Bassam, après avoir obtenu au téléphone, un rendez-vous avec le substitut du procureur résident, Mme Assi Juliette, pour essayer d`avoir des éclairages sur un certain nombre de questions. Voici le petit entretien de 6 minutes que nous avons eu : Qu`est-ce qui explique la présence du commissaire Konan Kouassi dans votre prison depuis 22 mois ? : " C`est le procureur de la République qui est directement concerné par cette affaire nous avons reçu un Soit Transmis de sa part nous demandant de procéder à son arrestation. C`est ce que nous avons fait ". Nous avons appris qu`après son arrestation, vous avez écrit à la Cour Suprême. " Vous êtes bien renseigné ". C`est bien vous qui avez écrit à la Cour Suprême ? " Oui ! Sinon le juge d`instruction a bouclé son instruction dans le délai légal, c`est-à-dire 6 mois. Il a même fini avant. Il n`y a donc pas eu de violation de procédure ". Je suppose que si vous avez écrit à la Cour suprême, c`est pour qu`elle désigne la juridiction où l`affaire sera instruite et jugée. Or votre tribunal a déjà fait l`instruction sans l`avis de la Cour Suprême ? " Je pense que le procureur de la République pourra vous donner de plus amples détails. Sinon, son procès peut avoir lieu avant la fin de l`année ". Vous attendez donc la réponse de la Cour Suprême pour le juger? " Oui ". Reçu à 10 h 06 minutes, nous avons quitté madame le procureur à 10 h 13 minutes. Selon un juriste que nous avons rencontré, la procédure qui a conduit à arrêter ce commissaire de police et donc officier de police judiciaire est nulle et d`une nullité absolue : " Si comme vous me le dites, le substitut du procureur de Bassam dit qu`ils ont fini l`instruction alors qu`ils n`ont pas encore reçu la réponse de la Cour Suprême, cela signifie qu`il y a eu détournement de procédure. S`ils ont pu faire l`instruction sans l`avis de la Cour Suprême, je ne vois pas pourquoi ils attendent la réponse de la Cour Suprême pour le juger. C`est le tribunal que la Cour désigne qui fait l`instruction et juge le dossier. La procédure est donc nulle et c`est de façon illégale que ce commissaire est détenu dans cette prison" a-t-il conclu.





Plainte par procuration

Qui sont les plaignants qui ont conduit à l`arrestation du commissaire Konan Kouassi ? Selon le courrier adressé par le commissaire au président de la Chambre judiciaire de la Cour Suprême pour protester contre incarcération et dont nous avons obtenu copie, les vrais plaignants, sont Ouattara Baba, qui lui a remis 2 millions au motif qu`il voulait devenir commissaire, 2 millions pour un autre qui voulait devenir officier, Touré Fanta qui est également policier et qui prétend avoir 10 millions sur les 23 et Sanogo Djénéba qui lui a remis les 23 millions pour 30 candidats malhonnêtes et corrupteurs par procuration. Mais après avoir été entendus par le Tribunal militaire et relâchés (ce qui a donné lieu aux articles de presse dont nous parlions plus haut), les trois plaignants se sont mis en retrait, se cachant, selon les propres termes du commissaire, derrière Madame Tiéboué Lou Viviane, une candidate malheureuse et proche de Sanogo Djénéba, qu`ils ont désignée comme porte-parole des 30 candidats malheureux. Nous avons joint cette dernière au téléphone le vendredi 7 mai pour vérifier ces faits après lui avoir décliné notre identité. " Oui, c`est nous qui avons porté plainte. Comme nous sommes beaucoup, ils m`ont choisi comme leur porte-parole" nous a-t-elle confié. Ainsi, ce sont ces candidats corrupteurs qui devraient être, en même temps que le commissaire, en prison, qui maintiennent ce dernier, par le truchement de la section de tribunal de Bassam, en détention préventive depuis 22 mois. Et en plus, de façon illégale. Vivement que la chambre judiciaire de la Cour Suprême se prononce sur cette affaire et que justice soit faite aux uns et aux autres. On peut dire que le fonctionnaire corrompu a payé sa dette à la société. Que les corrupteurs payent la leur maintenant. C`est ce que dit la loi. Le fonctionnaire corrompu et le corrupteur doivent être punis. Au même titre. Encore que dans son cas, le commissaire Konan Kouassi dont le comportement est inexcusable, n`est poursuivi que pour " trafic d`influence " et non pour escroquerie.
ASSALE TIEMOKO






www.225.ci - A propos - Plan du site - Questions / Réponses © 2023