jeudi 30 décembre 2010 par Nord-Sud

La marche organisée par le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp) les 16 et 17 décembre n'a pas été sans conséquence. A Grand-Bassam, des femmes parties libérer leurs enfants au commissariat de police de la ville, ont été passées à tabac.

Le jeudi 23 décembre, au marché municipal de la ville, il est un peu plus de 10 heures. Ce jour-là, le marché est quelque peu animé mais clairsemé. Awa Traoré est assise derrière son étal de fruits. Le front dégoulinant de sueur, elle semble ne pas être au mieux de sa forme. Elle qui a pris part à la marche des femmes, réprimée par le commissariat de la ville, semble garder des séquelles de cette épreuve. Nous l'approchons, visiblement angoissée, elle accepte de se confier. Elle relate les faits : le samedi 18 décembre, je me suis rendue au marché comme à l'accoutumée pour mon commerce. Vers 10 heures, nous recevons la visite d'une dame affolée (dont elle tait le nom). Cette dernière nous demande de nous rendre au commissariat afin, a-t-elle dit, de libérer nos enfants des mains des policiers. car, ils y seraient victimes de tortures. C'est ainsi que nous nous sommes rendues, nous les femmes au commissariat vers 10 heures, dans un élan de solidarité. Elle marque un arrêt avant de poursuivre. Nous avons fait le pied de grue devant le commissariat. Nous sommes restées plus d'une heure. Le maire et le préfet sont arrivés plus tard. Après les échanges, entre les autorités de la ville et les forces de l'ordre, les jeunes au nombre de trois ont été libérés. Pendant que nous essayons de revenir sur nos pas, nous sommes prises à partie par les forces de l'ordre. Ils ont tiré en l'air pour disperser la foule. Et, ils nous ont rouées de coups. Moi j'ai eu des blessures au genou, s'est-elle souvenue. Elle précise que de sa mémoire de fille de Bassam, c'est sa toute première fois de voir des femmes battues à sang parce qu'elles ont demandé la libération de leur progéniture. Nous prenons congé d'elle. A quelques mètres de son étal, se trouve celle de Djido Assetou, vendeuse d'huile et d'oignons. Elle dit avoir échappé de justesse à la furia des policiers.

Les femmes âgées matées
Une partie de sa marchandise, selon elle, a été mise à sac ce jour-là par des individus véreux, qui ont profité de son absence. En voilà une dette qui s'ajoute à sa souffrance physique. Dame Djido souligne qu'elles se sont rendues au poste de police pour prêter main forte aux femmes dont les enfants étaient emprisonnés. Nous ne faisons pas de la politique. Nous sommes allées par simple solidarité. J'ai été molestée et ma marchandise volée , s'est-elle plaint. Diarra Kady a vu rouge. Cette mareyeuse est encore sous le choc. En plus des séquelles de la bastonnade, elle a perdu une forte somme d'argent et son téléphone portable, nous a-t-elle confié. Contrairement aux autres femmes molestées, le cas de Santa Sidibé commerçante âgée de 75 ans est plus critique. Elle a failli passer de vie à trépas. Elle s'était évanouie lors des faits. Nous avons respiré du gaz lacrymogène. La tension était forte et j'ai perdu connaissance. Ce sont mes enfants qui m'ont réanimée avant de me conduire à l'hôpital. Je ressens encore des douleurs , a-t-elle commenté. Quant à Doumbia Mamousso, commerçante sexagénaire, résidant au quartier Odoss, elle garde un triste souvenir des évènements de Bassam. Ses membres supérieurs sont encore couverts de traces des coups de matraques. Ils venaient chercher nos enfants pour aller les frapper. Pour cela, nous étions obligées de les cacher au fin fond de la cocoteraie d'Odoss. C'est là-bas qu'ils dormaient tous. Et mon fils a même été mordu par un serpent dans la broussaille, s'est-elle indignée. Abiba Coulibaly, elle par contre, a eu plus de chance. Elle était parmi les femmes qui ont protesté devant le commissariat, mais elle dit s'en être sortie indemne. Elle a pu prendre ses jambes à son coup à la première alerte.
Emmanuelle Kanga à
Grand-Bassam



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