vendredi 18 fevrier 2011 par Soir Info

Coup de poignard. La fermeture sur toute l`étendue du territoire ivoirien de certaines banques n`est pas sans conséquence pour les clients de ces institutions financières. Surtout dans cette période où les ?'affaires'' ne tournent pas rond. Il est vrai que l`objectif, au-delà des raisons techniques que peuvent avancer les responsables des établissements financiers, est d`asphyxier le régime de Laurent Gbagbo et susciter un soulèvement populaire contre son régime. Mais en attendant cette ?'révolution'' que l'opposition politique ivoirienne et ses soutiens étrangers appellent de tous leurs v?ux, ce sont les personnes morales et physiques qui paient le plus durement possible cette décision. Le mardi dernier 15 février, dans l`impossibilité de retirer de l`argent à la Bicici , une jeune dame, enseignante dans un collège à Riviera, a laissé éclater sa colère. `` Ceux qui veulent enlever Gbagbo du pouvoir savent où il dort, où il travaille. Ils savent où se trouve son compte et son argent. Ils n`ont qu`à aller s`en prendre à lui. Pourquoi nous empêcher de manger et de vivre. Moi qui aujourd`hui ne peux toucher mon argent, sait-on pour qui j`ai voté ? `` , s'est-elle emporté.

Nous digérons très mal ces fermetures de banque sans préavis ni information préalable. Le manque de clarté dans le comportement de toutes ces banques en rajoute à notre angoisse et déception , a confié à un confrère récemment, un usager des banques. De façon plus large, cette situation pèse d'ailleurs lourd pour de nombreuses entreprises, qui en fait n'étaient pas du tout préparées à cette ?'saute d'humeur''. Bourry Guy-Serge est directeur d`une entreprise qui importe et revend des pièces détachées de gros engins. Se prononçant sur la fermeture des banques, lors des échanges que nous avons eus hier avec lui, il a fait savoir qu'il ne pourra plus passer de commande et que cela rejaillirait négativement sur son activité. Toute notre activité passe nécessairement par la banque. Les ordres de paiement, de virement, ou de remboursement étaient gérés par la banque. Mais aujourd'hui qu'elle est fermée, cela paralyse du coup notre business , s'est-t-il plaint. Selon lui, son entreprise court le risque de fermer puisqu`il n`aura pas accès à son compte. Du coup, a-t-il déploré, la première mesure à prendre est de mettre des employés au chômage technique, en attendant plus de lisibilité.

Toutefois, il a tenu à faire cette remarque : Parmi les personnes que j`emploie, autant certains ont voté pour Gbagbo autant d`autres ont accordé leurs suffrages à Ouattara. Mais vous pensez que celui qui a voté Ouattara va seulement accuser Gbagbo de ce qui arrive ? Il en voudra également à Ouattara contre qui il pourrait se soulever ``. Quant à Koné Corodiola, chef d'entreprise exerçant dans l'imprimerie, il a dit craindre la réaction, dans les jours à venir de ses fournisseurs à qui il doit de l'argent. Mais où puiser cet argent si la banque est fermée ? Nous avons livré des tas de commande et en général nous sommes payés par chèque. Mais comment encaisser ce chèque si la banque ne fonctionne pas ?, s'est-il interrogé lorsque nous l`avons approché. Depuis deux jours, nous avons arrêté de fonctionner parce que notre fournisseur nous demande de payer cash nos commandes. Nous n'avons pas de liquidité et c'est extrêmement compliqué pour nous , nous a rapporté Edess Mel, chef d'une entreprise de construction immobilière . Il n'a pas caché son angoisse, à l'approche de la fin du mois. Si cette situation ne se règle pas, comment allons-nous faire face aux salaires de ce mois puisque nos comptes sont bloqués ? . C'est pourquoi, tous ces chefs d'entreprise ont sollicité le concours de l'Etat, sinon beaucoup d'entre eux se verraient obligés de mettre la clé sous le paillasson. Il faut noter que les entreprises publiques et parapubliques souffrent également de cette situation. Selon le président du conseil d'administration d'une entreprise publique que nous avons interrogé et qui a requis l'anonymat, les choses sont certes difficiles, mais des dispositions, a-t-il dit, sont en train d'être prises pour ne pas étouffer l'Etat qui vit au dépend de ses sociétés nationales. Il faut bien reconnaître qu'en dépit de ces assurances, la fermeture en cascade des banques se pose comme un goulot d'étranglement pour l'économie nationale. Et c'est inquiétant !

A. BOUABRE

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