lundi 28 fevrier 2011 par Le Nouveau Courier


Des milliers d'habitants de la commune d'Abobo (qui fait face actuellement à une guérilla des militants du Rhdp, vigoureusement combattue par les Fds), qui ont pu tant bien que mal se libérer du joug de ces chiens de guerre, ont décidé de quitter le territoire du district d'Abidjan, comme nous avons pu le constater le samedi à la gare routière d'Adjamé. Destination : Agboville, Alépé, Adzopé, bref, les villes périphériques, pour ceux qui en sont les ressortissants, pour y trouver refuge. Et ce sont des familles entières qui sont au centre de cet exode massif
Des allers et venues incessants dans les deux sens du boulevard communément appelé Renault, entre le poste de Gendarmerie (au niveau du siège de la Sicogi, immeuble Mirador) et le carrefour menant à la gare routière de la commune d'Adjamé. Femme avec sacs et/ou enfants au dos, suivie de l'homme et des adolescents, portant parfois des balluchons sur la tête. Souvent, ces personnes allant seules. Bref, Adjamé Renault avait l'allure, ce samedi, d'un camp de transit pour refugiés. Pressés, les visages marqués par la fatigue et l'inquiétude, ces émigrés de la commune d'Abobo ? qu'on remarquait facilement par les gros bagages qu'ils transportaient ? gagnaient les différentes gares d'Agboville, d'Adzopé et d'Alépé, situées aux abords de ce boulevard. Un tour dans ces gares nous a permis de dissiper toute équivoque. Parmi cette foule de personne en attente d'un véhicule, certains ont accepté de nous expliquer leur situation, comme cette demoiselle, Nathalie, sortie d'Abobo Anonkoua et en partance pour Agboville. Je suis sortie vendredi d'Abobo. La veille, le jeudi, les tirs ont commencé vers les 18 heures et ce durant toute la nuit. Le lendemain, avec toutes les rumeurs, on a entendu dire qu'on devait quitter Abobo, voilà pourquoi nous sommes sortis. On ne pouvait plus supporter la terreur là-bas. Je suis sortie avec toute ma famille. Comme mes parents sont à Agboville, je vais là-bas me refugier, nous a-t-elle confié. Devant elle, dans la longue file menant au guichet, se trouvait Claver B. Il raconte : Moi j'habite le quartier Agnissankoi, à Abobo. Le lundi, j'ai quitté ma famille pour mon travail à Yopougon. Le mercredi, ma femme m'a appelé pour me dire que ça n'allait pas par rapport à la tension là-bas. Mais je n'avais pas d'argent pour aller les chercher. Heureusement, le jeudi, elle s'est débrouillée pour sortir en pleine nuit pour aller chez sa grande s?ur. C'est là-bas que je les ai récupérés. Vous voyez (il montre du doigt sa femme, son nouveau-né et les plus jeunes enfants), le bébé et les enfants ne peuvent pas supporter ce bruit terrifiant des armes. Donc il fallait absolument sortir. Derrière nous, dans notre quartier, il y a un gros trou et paraît-il que les rebelles sont cachés là-bas. Donc nos forces nous ont demandé de quitter cette zone pour qu'ils mènent leur assaut, parce que les balles perdues pourraient nous atteindre. Ce matin (samedi, ndlr), avec ce qui s'est passé à Yopougon (les affrontements qu'il y a eu, ndlr), il n'y avait pas de véhicule. J'ai donc marché jusqu'à l'autoroute pour trouver un véhicule pour Adjamé. Ensuite, je suis allé à Angré (qui fait frontière avec Abobo, ndlr) les chercher et voilà, je vais les déposer en lieu sûr à Agboville. Avant de retourner à Abobo pour chercher nos affaires.
Toute la petite surface de cette gare d'Agboville située à l'angle du carrefour de la gare routière était littéralement envahie. Sous les bâches, des familles entières attendaient, les mines anxieuses, que le car arrive et les emporte loin de cette atmosphère traumatisante.
A la gare d'Adzopé, c'était également la même ambiance de centaines de personnes attendant de quitter le district d'Abidjan. Quelques habitants de Yopougon, redoutant que la guérilla se déporte dans leur commune, après les affrontements de fin de semaine, ont décidé aussi de parer à toute éventualité en partant pour l'intérieur du pays. A la gare de Gagnoa à proximité de la gare Nord Sotra, une jeune demoiselle s'est confiée : Hier, (vendredi, ndlr) il y a eu des tirs toute la nuit à Selmer. Ce matin, on a découvert un cadavre devant le bureau de la Coopec. Face à tout ça, je préfère aller me cacher un peu à Gagnoa en attendant que ça se calme ici.

Exécutions sommaires et vandalisme de toute sorte
Pendant ce temps, informations et rumeurs les plus folles s'affrontent également. Un jeune homme affirmait que des maisons auraient été détruites dans les affrontements à l'arme lourde. Un monsieur, affirmait lui, et cela paraît plausible, que les commerces des Libanais situés aux environs du rond point de la Gendarmerie auraient été pillés, ainsi que les agences de deux société de téléphonie mobile dans le secteur, à Abobo. Fait révélateur d'une entreprise préméditée, ce témoin affirme également qu'un seul magasin dans le même périmètre a été bizarrement épargné, portant des marques ; comme pour indiquer qu'il devrait être exempté de la furia des vandales. Une autre info, elle véritable, c'est l'assassinat d'un agent du service informatique du Chu de Cocody. Selon notre source qui tient les faits des parents et connaissances de la victime, sur place, les rebelles ont pénétré chez lui après qu'il ait été indiqué comme militant LMP. Il a été lâchement tué devant sa cour Par, ailleurs, pour prévenir d'éventuels actes de vandalisme dans leurs boutiques, certains commerçants libanais de Yopougon-Sable ont commencé à vider leurs boutiques de leurs marchandises
Comme on le constate, la situation sécuritaire dans le district d'Abidjan est critique, vu les différents fronts que les rebelles tentent d'ouvrir dans les autres communes après Abobo. Les appels des leaders de jeunesses à monter des comités d'autodéfense sont suivis. Cependant, ces actions gagneraient à être bien organisées. Parce qu'aussitôt annoncé le vendredi, les barrages de contrôle ont poussé comme des champignons sur les voies de Yopougon. Comme sur le tronçon menant à Abobodoumé, par exemple. Gênant souvent la fluidité de la circulation car très peu distancés. Les systèmes ne devraient pas entraver le dispositif pratique et probant de sécurisation de nos Fds dans la défense du territoire et des institutions de la République contre les assaillants.
Franck-Harding M'Bra

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