mercredi 2 mars 2011 par Libération

C'est un document confidentiel de l'Onu auquel nous avons eu accès, qui en dit long sur les tensions actuelles en Côte d'Ivoire entre les forces de Laurent Gbagbo et une partie de la population locale à l'intérieur du pays. Mais aussi entre ces militaires et les personnels de l'Onuci (Mission des Nations unies en Côte d'Ivoire) que le camp du président sortant accuse tous les jours de soutenir son adversaire, Alassane Ouattara.

La semaine dernière, la ville de Daoukro, dans le centre de la Côte d'Ivoire, a été le théâtre de violents affrontements. Dans ce fief de la communauté baoulée, l'un des principaux groupes ethniques du pays, des manifestants, dont certains étaient armés, ont défié les forces de Laurent Gbagbo, les FDS (Forces de défense et de sécurité). Le 24 février, deux manifestants sont tués. Le lendemain, les violences reprennent avec plus de vigueur. Daoukro est la ville de l'ancien président Henri Konan Bédié, qui a appelé ses partisans à voter pour Ouattara lors de l'élection présidentielle et permis ainsi sa victoire.

Informée très vite des troubles qui ont éclaté dans certains quartiers, l'Onu dépêche des soldats sur place à bord de deux blindés, de trois jeeps et de deux Prado (4X4) pour tenter de ramener le calme. Puis organise des pourparlers.

Le rapport nous apprend que les FDS ont été en grande difficulté à Daoukro, puisque leurs chefs locaux réclament, lors de cette réunion, la restitution d'armes dérobées par les manifestants. Les responsables des FDS sont pour le moins nerveux, puisque "5 des 7 responsables FDS présents" militent pour "escalade des violences", dit le rapport.

Vers 15h20, en ce 25 février, la réunion, organisée au siège du commissariat de police de Daoukro, se termine. Elle a duré près de quatre heures. Très mauvaise surprise pour les personnels de l'Onu à leur sortie: pendant qu'ils discutaient, deux de leurs véhicules ont été sabotés "par les FDS qui ont coupé les freins arrières"...

Mais ce n'est pas fini. Alors que l'ONU ramène péniblement ses véhicules endommagés vers la base, "les FDS (soutenues par des miliciens) ont poursuivi les violences armées dans les quartiers". Bilan: trois morts, parmi lesquels une femme d'environ 60 ans et un gamin fauché par une balle alors qu'il fuyait.

Le lendemain, 26 février, les FDS "ont repris les tirs à travers toute la ville", et certains de ses élements se sont livrés à des manoeuvres d'intimidation contre les personnels de l'Onu, massant des hommes devant leurs domiciles. De guerre lasse, des femmes se rassemblent en ville et tapent sur des casseroles "pour crier leur ras-le-bol". Finalement, après trois jours de troubles, le calme revient enfin, après que des responsables des FDS eurent présenter leurs excuses au "chef du village".

Entre le 24 et le 26 février, cinq personnes ont trouvé la mort à Daoukro.

Par Thomas Hofnung ... suite de l'article sur Libération

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