jeudi 31 mars 2011 par AFP

ABIDJAN - Les forces du président ivoirien reconnu par la communauté internationale Alassane Ouattara ont accentué mercredi leur pression sur le régime du président sortant Laurent Gbagbo en prenant la capitale politique Yamoussoukro, alors que la tension montait à Abidjan.
Cette victoire hautement symbolique intervient au troisième jour de
l`offensive et quatre mois après le début d`une crise post-électorale ayant
fait, selon l`ONU, plus de 460 morts et déplacé près d`un million de personnes.
La chute de Gagnoa (centre-ouest), son fief au coeur de sa région natale,
et l`entrée des combattants pro-Ouattara à San Pedro (sud-ouest), premier port
d`exportation de cacao au monde, sont d`autres revers pour M. Gbagbo.
Après un silence de plusieurs semaines, le président sortant devait
s`adresser à la Nation dans la soirée, selon la télévision d`Etat. Mais ce
discours très attendu a été reporté sans explication.
Isolé diplomatiquement et asphyxié économiquement, son pouvoir n`a jamais
été aussi menacé, et ses forces se repliaient sur la capitale économique
Abidjan.
Le Conseil de sécurité de l`ONU a infligé à M. Gbagbo encore un coup dur en
adoptant à l`unanimité une résolution qui impose des sanctions contre lui, son
épouse Simone et trois autres proches, et exige son départ immédiat.
Elle apporte son "entier soutien" aux forces de l`ONU en Côte d`Ivoire
(Onuci) pour utiliser "toutes les mesures nécessaires" pour assurer la
protection des civils et empêcher l`utilisation d`armes lourdes contre eux.
"M. Gbagbo a encore quelques heures pour partir, sinon ce sera la marche
sur Abidjan. Et ce sera beaucoup plus compliqué pour lui", a averti Guillaume
Soro, Premier ministre de M. Ouattara.
A Abidjan, dans ce climat de haute tension, de nombreux habitants sont
rentrés précipitamment chez eux dans l`après-midi. Des tirs, notamment à
l`arme lourde, ont été entendus dans plusieurs quartiers nord durant la
journée.
Signe de la soudaine dégradation du climat: deux gendarmes français en
fonction à l`ambassade de France ont été blessés lorsque leur voiture a été la
cible d`un tir en rafale par des forces de M. Gbagbo, a affirmé Paris,
dénonçant un acte "inadmissible".
Les Forces républicaines de M. Ouattara, regroupant essentiellement les
ex-rebelles qui tiennent le Nord depuis 2002, ont poursuivi leur avancée en
prenant Yamoussoukro.
Village natal du "père de la Nation" Félix Houphouët-Boigny (1960-93)
devenu capitale politique du premier exportateur mondial de cacao, la ville
est tombée aux mains des combattants pro-Ouattara, pratiquement sans combat,
seuls quelques tirs de kalachnikov ayant été entendus, selon des habitants.
"Yamoussoukro est sous contrôle des Forces républicaines, la foule en
liesse les acclame, ils paradent en ville", a indiqué une résidente.
Selon plusieurs témoignages, les forces pro-Ouattara ont poursuivi leur
route vers le sud, ne laissant qu`un petit détachement dans la capitale
politique.
Un habitant de Toumodi (50 km au sud de Yamoussoukro) a assuré avoir
entendu des tirs dans l`après-midi dans cette localité, située à environ 200
km d`Abidjan.
Après Soubré, à 130 km au nord de San Pedro, les forces pro-Ouattara sont
entrés dans le grand port cacaoyer dans la soirée.
"Ils sont entrés dans la ville, ils tirent avec des armes lourdes au
centre-ville. Les miliciens qui pillaient la ville passent en courant dans
tous les sens", a déclaré un résident. Dans la nuit, des tirs continuaient
d`être entendus.
Le camp Ouattara a fait une autre prise symbolique à Gagnoa (centre-ouest),
au coeur du "pays bété", région natale du président sortant. "Ils sont rentrés
sans combat, depuis ce matin les forces pro-Gbagbo avaient quitté la ville",
selon un habitant.
Sur le front est, les forces pro-Ouattara ont avancé rapidement sans
rencontrer de forte résistance, s`approchant toujours un peu plus d`Abidjan,
où de nouvelles recrues ont commencé mercredi à se faire enrôler dans l`armée.
Le camp Gbagbo avait appelé mardi soir à un "cessez-le-feu immédiat", se
déclarant prêt à des négociations sous l`égide de l`Union africaine début
avril à Addis Abeba. "Diversion", a tranché le camp Ouattara.
Le pape Benoît XVI a annoncé sa décision d`envoyer un émissaire en Côte
d`Ivoire pour encourager "la réconciliation et la paix" et a appelé à "un
processus de dialogue constructif".

Par Christophe PARAYRE

www.225.ci - A propos - Plan du site - Questions / Réponses © 2023