lundi 11 avril 2011 par AFP

PARIS, La mise hors jeu du président sortant ivoirien
Laurent Gbagbo fait gagner un point à la France dans son engagement politique
et militaire en Côte d`Ivoire, mais écorne à nouveau son image de pays voulant
prendre ses distances avec des pratiques coloniales d`un autre temps.
Au plan positif, la mise à l`écart de l`ex-président, au pouvoir depuis
plus de dix ans et aux rapports très tendus avec Paris, devrait assainir une
situation qui menaçait de tourner à l`enlisement.
"C`est un bon point, la France fait la différence, elle est le bras armé de
l`ONU, voire sa fille ainée", relève Dominique Moisi de l`Institut français
des Relations internationales (Ifri).
Dans l`immédiat, une inconnue subsiste dans les conditions ayant conduit à
la capture de Laurent Gbagbo même si Paris se défend de toute implication
directe.
Lundi, peu après l`annonce de sa détention par les forces d`Alassane
Ouattara, reconnu président par la communauté internationale, la France a
ainsi multiplié les affirmations pour assurer que ses troupes n`étaient pas
intervenues dans l`assaut de la résidence où l`ex-président était retranché et
n`avaient pas même pénétré dans son jardin.
Depuis dimanche, les unités aguerries de la force Licorne avaient cependant
bien préparé le terrain, avec des bombardements y compris à partir
d`hélicoptères. Sans leur coup de pouce, difficile d`imaginer une chute aussi
soudaine de Laurent Gbagbo.
Dominique Moisi concède: "Cette arrestation n`aurait sans doute pas été
possible sans les militaires français. Acteurs ou facilitateurs ?"
La présidence française a aussi très vite fait savoir que le président
Nicolas Sarkozy s`était "longuement" entretenu avec Alassane Ouattara, sans
toutefois dévoiler le contenu de cet entretien.
Réticente officiellement à s`engager politiquement et militairement dans
son ancienne colonie, Paris s`est vite montré en première ligne dans le
conflit inter-ivoirien, pour cause de faiblesses de l`ONU comme des forces
d`Alassane Ouattara à occuper le terrain et défaire l`ennemi désigné.
L`entrée en guerre de la France, même si son chef de la diplomatie Alain
Juppé en réfute le terme, pourrait toutefois être lourd de conséquences
potentielles pour sa place en Afrique, et au-delà sur la scène mondiale.
"C`est une erreur monumentale que de s`afficher aussi ouvertement à côté de
Ouattara", pronostique un fin connaisseur du continent, demandant à s`exprimer
sous couvert d`anonymat. Il va apparaître, ajoute-t-il, "comme un homme de la
France, ce qui n`est pas idéal lorsqu`il s`agit de pacifier le pays..."
Dans ses explications, la France n`a eu de cesse de brandir les résolutions
de l`ONU, la nécessité sur un continent instable de faire valoir le droit à un
processus électoral qui soit respecté - de multiples élections présidentielles
sont prévues cette année en Afrique -, et la défense des populations civiles.
Sur ce dernier point, la France va avoir fort à faire pour lutter contre
l`impunité dont pourraient se prévaloir les forces d`Alassane Ouattara,
accusées d`exactions notamment dans l`ouest du pays.
"Il faudra que la vérité soit faite et que la France rappelle très
clairement à Alassane Ouattara son engagement à punir les coupables", estime
l`expert de l`Ifri.
Pour éviter de n`apparaître que comme va-t-en-guerre, Paris a commencé
depuis plusieurs jours à plaider pour la réconciliation ivoirienne et la
création d`un gouvernement d`union nationale. La France a aussi promis son
aide économique dans un pays où elle dispose d`intérêts financiers importants.
Et de faire partir ses unités militaires dès que cela sera possible.

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