jeudi 28 avril 2011 par Soir Info

"Le commando invisible" a opposé une résistance farouche aux ex-Forces de défense et de sécurité (Fds) à Abobo et Anyama. Aujourd'hui après la chute du régime Gbagbo, des voix dont celle du ?'général IB'' revendiquent la paternité de ce commando. Le commandant Matchè, de son vrai nom, Konaté Laciné, natif de Gbéléban (Odienné), donne sa part de vérité dans l'entretien qu'il nous a accordé. Il fait la genèse du commando invisible et parle de ses soutiens.

Vous êtes membres d'une unité qui a combattu les ex-Fds à Pk-18 à Abobo. Comment avez-vous organisé la résistance à Abobo ?
Cdt Matchè : Nous avons commencé avec les casseroles, le courage et les bénédictions de nos parents. Nous avons débuté par l'opération casserole. Quand les Fds rentraient dans les quartiers, nous faisions du bruit avec les assiettes, nous réveillons les populations en jetant des pierres sur les toitures des maisons. Après, nous nous dirigeons vers les soldats des Fds les mains nues pour leur demander pourquoi ils enlevaient nos frères et s?urs pour les exécuter. Nous n'étions pas nombreux à agir ainsi. Mais au fur et à mesure, notre rang grossissait et les jeunes qui nous rejoignaient n'avaient plus peur. C'est ainsi que nous sommes parvenus à arracher aux Fds, quelques pistolets et kalachnikov. Toute chose qui par la suite, nous a permis de résister face aux incursions des Fds. En clair, nous étions au départ un petit groupe composé de jeunes volontaires d'Abobo. Nous n'avions jamais utilisé des armes auparavant. Nous
faisions face à ceux qui venaient nous menacer et qui menaçaient nos parents.

PK-18 et Anyama ont été généralement indexées comme des zones d'influence d'Ibrahim Coulibaly dit IB. Quels sont vos liens avec celui qui se fait appeler désormais général?
Moi, je ne connais pas IB. J'entends parler de lui comme tout le monde. Au moment où nous commencions la résistance, il y avait des anciens éléments d'IB avec nous. Ils nous ont fait croire qu'ils menaient le même combat que nous, c'est-à-dire, protéger les populations et faire en sorte que le président Alassane Ouattara exerce son pouvoir. Mais ces deux derniers mois, nous avons constaté que les éléments d'IB ne jouaient pas franc-jeu. Malgré cela et pour éviter que nous nous marchions sur les pieds, nous leur avons laissé Pk-18 avec certains de nos hommes. Nous avons donc décidé d'avancer vers Abobo.

Etes-vous en train de dire qu'IB n'a jamais été votre chef ?
Oui, il n'a jamais été notre chef. Et tous les combattants sur lesquels il compte, sont nos éléments. D'ailleurs ceux-ci étaient à Pk-18 mais ils n'ont jamais combattu en réalité.

Aujourd'hui, IB affirme qu'il a beaucoup de soldats à Abobo. Il revendique environ 5.000 hommes. Qu'en dites-vous ?
Les éléments d'IB ne sont pas nombreux. 5.000 personnes, c'est un camp complet. Pk-18 ne peut pas contenir un tel nombre. Qu'il arrête de dire des choses qui ne sont pas vraies. Ils sont nombreux les combattants qui se sont battus pour le pays. Il y a par exemple Legen, le commandant d'Anyama, Bazo, Kam Lass, qui sont tous de véritables combattants. Ils ont fait beaucoup à Pk-18 et à Anyama. Mais tous ceux-là n'ont jamais revendiqué des choses. Ils n'ont jamais posé des conditions au gouvernement en place qui demande aujourd'hui de désarmer. Les commandants des Frci, Wattao, Chérif, Morou, Koné Zackaria ont combattu pour la République mais ils n'ont rien revendiqué. C'est pourquoi, je voudrais rappeler à IB qu'il n'était pas là au début. Il ne faudrait pas qu'il sème la confusion.

Dites-nous alors quand Ib a fait son apparition à Abobo
Cela fait trois semaines ou un mois qu'IB est arrivé à Pk-18. Pourtant, cela fait presque quatre (4) mois que nous sommes dans le combat. Où était-il ? Le commando invisible, ce n'est pas IB. S'il avait un commando, c'était pour certainement créer le désordre. Peut-être c'est lui qui est à la base des tueries de personnes innocentes, dans certains quartiers. A un moment, on était attaqué de dos. Ce sont sans doute, les éléments d'IbB qui agissaient ainsi. Aujourd'hui, ce n'est pas parce que les choses vont bien qu'il va se proclamer le patron du commando invisible. Il gagnerait à féliciter ses jeunes frères qui ont mené le combat. C'est nous qui sommes le commando invisible, c'est nous qui savons comment il a été créé et c'est nous qui avons l'effectif exact. IB n'a pas d'éléments.

Aujourd'hui, IB soutient qu'il contrôle une partie de Yopougon et d'Abobo. Que comptez-vous faire désormais ?
Je ne suis qu'un exécutant. Nous avons fait le combat sans véritablement des chefs. Mais nous savions que des grands frères ont commencé le combat avant nous. J'étais en contact permanent avec Ouattara Morou qui m'orientait. Il me montrait comment se battre sur le terrain. Nous savions par exemple que Koné Zackaria, Wattao Chérif se battaient pour la République et la démocratie. Si IB a un problème personnel qu'il le dise à la nation. Moi qui ai beaucoup souffert pendant cette crise, je n'ai pas de revendication à faire. IB ne veut pas se rendre. Qu'il sache que Gbagbo était plus armé que lui. Je demande pardon à IbBpour qu'il se rallie à la République. S'il a un père, une mère, des frères et s?urs, qu'il respecte le président de la République, qu'il vienne rejoindre ses frères d'armes pour que nous puissions faire la paix ensemble. Parce que toute personne qui n'accepterait pas la paix, qui veut la
dictature, connaît son sort. Les populations ont assez souffert pour que quelqu'un vienne jouer avec elles. Nous osons croire qu'IB n'est pas un dictateur. Qu'il se mette au service de la République. Les généraux Philippe Mangou et Kassaraté sont venus faire allégeance d'eux-mêmes. Beaucoup d'autres chefs militaires sont venus. Pourquoi IB ne peut pas venir se rallier et demande à être accompagné par ses soldats. Qu'il réfléchisse. Nous ne sommes pas contre lui mais nous voulons la paix. Avec son attitude, on peut affirmer qu'il était avec Gbagbo. Qu'il vienne dire que c'est lui qui est le patron du commando invisible alors que c'est nous qui avons mené le combat, nous disons non à cela !

Le régime de Laurent Gbagbo est tombé. Qu'allez-vous faire désormais ?
Nous sommes au service de l'Etat, de la République. Nous sommes des démocrates. Nous sommes à l'écoute de nos chefs. Nous sommes prêts à accepter les décisions que le premier ministre et le chef de l'Etat vont prendre nous concernant. Nous nous considérons comme des soldats, et nous n'avons pas de décisions à prendre.

Des miliciens refusent de déposer les armes notamment à Yopougon. Quel commentaire ?
Je voudrais d'abord remercier le président de la République, le premier ministre Guillaume Soro, tous les chefs de guerre surtout les commandants Wattao, Morou, Zackaria et Chérif Ousmane pour ce qu'ils ont fait. C'est la voie qu'ils ont tracée que nous avons empruntée pour libérer la Côte d'Ivoire. Aujourd'hui, ceux qui n'ont pas encore compris que la guerre est terminée, je leur demande de déposer les armes. La guerre n'est pas une bonne chose. Moi qui vous parle, j'ai perdu mon petit frère dans cette guerre. Il a été brûlé vif. Nous demandons pardon à tous les miliciens qui ont en ce moment des armes. Qu'ils les déposent. La Côte d'Ivoire, c'est notre pays. Nous ne devons pas continuer à y mettre le feu sinon les autres vont se moquer de nous. A IB et aux miliciens, je leur demande de penser à leur avenir en reconnaissant le président élu de la République. Il a souffert et Dieu lui a donné aujourd'hui
sa chance.
Entretien réalisé par
BAMBA Idrissa

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