mardi 3 mai 2011 par Nord-Sud

Les grands perdants dans la composition de l'équipe qui va diriger la commission Dialogue, Vérité et Réconciliation'', sont sans doute les guides religieux. Ils paient pour leurs partis pris.

La constitution de la commission Dialogue, Vérité, et Réconciliation'', sonne comme un désaveu pour les leaders religieux ivoiriens. Car, pour la deuxième fois, c'est un acteur politique qui présidera aux destinées de cette plate-forme de concertation et de réconciliation des Ivoiriens. Et, comme en 2001, c'est encore un ancien Premier ministre qui conduira, en tant que président, la commission Dialogue, Vérité, et Réconciliation'', voulue par Alassane Ouattara pour réconcilier les Ivoiriens. Pour bon nombre d'observateurs, le profil qui correspondait le mieux à ce poste, était soit celui d'un acteur de la société civile, soit d'un dignitaire religieux, comme ce fut le cas en Afrique du Sud, avec monseigneur Desmond Tutu ou encore avec messeigneurs Isidore de Souza et Laurent Monsengwo Pasinya au Bénin et en République démocratique du Congo (ex-Zaïre) dans le cadre des conférences nationales dans les années 1990. Mais, sans grande surprise, le choix du président de la République s'est porté sur M. Konan Banny, secondé par le Sud-africain, Mgr Desmond Tutu et de l'ancien Secrétaire général de l'Onu, Kofi Annan. Pourquoi Alassane Ouattara, a-t-il laissé de côté, les chefs religieux ivoiriens ? En attendant une explication de M. Ouattara sur le choix de Charles Konan Banny, on peut s'autoriser à penser que le parti pris manifeste des religieux ivoiriens n'a pas milité en leur faveur. Plutôt proches de Laurent Gbagbo durant ses dix ans à la tête du pays, nombre d'entre eux ont clairement pris fait et cause pour le chef de file de la Refondation''. Au nombre de ceux-ci, on peut citer l'ancien archevêque d'Abidjan, Mgr Bernard Agré, le révérend Dion Robert, président de l'église Baptiste ?uvre et Mission, Paul Ayo, président du haut-conseil protestant et évangélique, Bishop Benjamin Boni, président de l'Eglise Méthodiste Unie de Côte d'Ivoire ou encore le président de l'Eglise Assemblées de Dieu, docteur Jean-Baptiste Nielbien. Ils sont d'ailleurs à la base de l'organisation, le 8 novembre 2009 au Stade de la BAE de Yopougon, d'un jeûne de 40 jours en faveur de l'ancien couple présidentiel. Dans ce soutien à Laurent Gbagbo, les musulmans avaient, eux aussi, leurs représentants. Le plus connu d'entre eux restera sans conteste l'imam Binaté de la mosquée du Plateau-Dokui, très proche de Nadiana Bamba, la seconde épouse de M. Gbagbo. Et, même si personne n'a pu prouver leur penchant pour le natif de Mama, la rumeur a fréquemment accusé l'actuel président de la conférence épiscopale, Mgr Joseph Aké et le président du Conseil national islamique, l'imam Idriss Koudouss, de rouler également pour Laurent Gbagbo. Signe que le fossé entre les bergers'' et la ouaille'' était devenu trop grand, Mgr Jean Salomon Lézoutié, évêque coadjuteur du diocèse de Yopougon, n'a pas hésité à mettre les pieds dans le plat, à la mi-janvier dernier, pour prendre clairement position en faveur de M. Ouattara, là où la conférence épiscopale invitait au respect de la constitution, marquant indirectement sa dévotion pour Gbagbo. Monsieur le président (parlant de M. Gbagbo), votre défaite, en avoisinant les 20% avec feu Houphouet-Boigny, vous honore plus que cette obscure victoire à l'arraché, de 51% avec ADO, et boudée par le monde entier . En un mot, les dignitaires religieux sont si marqués qu'il aurait été difficile pour le président Ouattara d'opérer un choix qui fasse l'unanimité. Espérons qu'ils mettront à profit le cadre de la réconciliation qui se présente aux Ivoiriens pour faire eux aussi leur mea-culpa, car Dieu est Vérité.

Marc Dossa

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