samedi 7 mai 2011 par Autre presse

Près d'un mois après l'arrestation de Laurent Gbagbo, L'Usine Nouvelle revient sur la situation économique en Côte d'Ivoire, mise à mal pendant plusieurs mois par les combats entre les forces de l'actuel président Alassane Ouattara et celles de Laurent Gbagbo. Lakoun Ouattara, directeur de la Confédération Générale des Entreprises de Côte d`Ivoire (CGECI), fait le point sur les derniers événements dans le pays.

L`Usine Nouvelle - Est-ce l'activité économique du pays a repris son cours normal depuis un mois ?

Lakoun Ouattara - Les choses se remettent peu à peu en place. Les banques ont ouvert à nouveau leurs portes depuis une semaine. Les fonctionnaires vont donc pouvoir toucher leurs salaires, ce qui n'a pas été le cas depuis deux mois pour certains. Dans les entreprises, on est content aussi car les liquidités vont permettre aux services logistiques de pouvoir passer de nouvelles commandes, de relancer les opérations de production, d'export et d'import.

Reste-il des secteurs encore totalement bloqués ?

Ils ont tous été touchés par la crise, tant en volumes qu'en termes de parts de marché. Il y a encore des blocages dans la filière du cacao. Elle est affectée par des problèmes de financement depuis plusieurs mois, avant la crise même. Les difficultés sont donc nombreuses pour acheter la marchandise. D'autant plus que pendant les événements, la filière a été soumise à des mesures de restriction à l'export. Elles sont désormais levées mais la filière va encore avoir largement besoin d'aide, notamment sur ces questions de financement. A côté de cela, il y a toutes les PME qui sont très affectées car elles sont les premières concernées en cas de manque de financement. Elles ont été les premières cibles des pillages, des restrictions bancaires, et de la baisse de consommation dans le pays.

Sinon, toutes les industries ont pu redémarrer ?

Presque. Les sites encore fermés ou partiellement bloqués subissent soit des problèmes de gestion de la sécurité, soit des manques d'effectifs. En effet, pendant la crise, certains employés ont dû quitter la zone économique pour se rendre davantage dans les terres. Il faut laisser le temps aux citoyens de revenir dans la capitale. Dans d'autres entreprises, c'est l'heure du bilan. La direction de tel site fait par exemple un état des lieux, pour savoir à quel point elle a été pillée, quelles machines sont à réparer. Cette phase va prendre du temps mais va permettre de savoir qui a été le plus touché et donc qui il va falloir soutenir.

Les ports ont-ils repris une activité normale ?

La reprise monte en puissance depuis le 18 avril. Actuellement, il y a environ 4 bateaux qui peuvent entrer dans le port d'Abidjan contre 8 en temps normal environ. La situation est la même à San Pedro. Mais comme dans le reste de l'économie, les conditions de reprise évoluent toutes les 48 heures, ce qui rend difficile le suivi. Globalement la machine se remet en marche.

Quelle est la priorité à régler pour l'économie du pays ?

Voir comment les entreprises affectées vont pouvoir rebondir. Et nous attendons beaucoup de la nouvelle politique dans le domaine de l'administration, de la logistique et du système bancaire dans le pays. Pour bien redémarrer l'économie, il faut tenir compte des quatre mois de crise et prendre des mesures complémentaires pour aider les entreprises à obtenir ce dont elles ont besoin.

Voyez-vous déjà des changements sur le plan politique depuis l'arrivée d'Alassane Ouattara au pouvoir ?

Il y a quelques signaux, notamment sur le plan de la sécurisation du pays. Depuis deux jours, la zone qui était encore touchée par la violence, le quartier de Yopougon, est en train d'être sécurisé. Cela lève en partie les problèmes d'acheminement des marchandises dans cette zone industrielle et dans une partie de la capitale qui en dépend.

Quelle est l'ambiance dans le pays ?

Je pense que les gens doivent encore sortir du traumatisme des quatre mois de crise, dont deux semaines entières de tirs et de combats intenses. Pendant cette période, ils ont été privés d'eau, d'électricité pour certains. Des services publics qui redémarrent au fur et à mesure. Les citoyens sont plutôt dans une période d'observation politique. Le discours du président passe bien, il appelle à la réconciliation, qui devient un leitmotiv au sein de la population. Quant à la sécurité, cela va beaucoup mieux : on arrive à venir travailler, à faire nos courses

Le 05 mai 2011 par Barbara Leblanc

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