lundi 30 mai 2011 par Le Patriote

Un homme de paix. Plus préoccupé à faire revenir l'entente dans la région de Gagnoa, dont il est le commandant. Le Lieutenant Diomandé Vassézé fait l'unanimité dans le Fromager par ses actions entreprises pour faire disparaître la méfiance entre les populations et les Forces républicaines de Côte d'Ivoire.

Le Patriote: Quelles sont les difficultés auxquelles vous avez été confrontés dès les tout premiers jours et auxquels vous continuez d'être confrontés, un mois après votre installation?

Lieutenant Diomandé Vassézé: Elles sont d'ordre technique. Parce que je suis dans une région que tout le monde observe, qui est le point initial de ce qui se passe présentement sur l'échiquier politique. Avant notre arrivée dans la ville, il se racontait que les FRCI étaient venues contre une ethnie. Naturellement, cela est faux. Mais, déjà, les esprits étaient préparés contre nous. Et quand j'ai été nommé à la tête de ce commandement, j'ai mis une stratégie sur pied. Aujourd'hui, le bilan est positif.

LP.: Vous étiez certainement conscient des difficultés qui vous attendaient dans la mesure où Gagnoa est la ville natale de l'ancien chef de l'Etat. Comment êtes-vous parvenu à faire le rapprochement entre les FRCI et les populations?

Lt. D.V: Nos rapports sont comme ceux des fils avec les populations. Parce que certes, nous sommes militaires, mais nous appartenons à des familles. Etant donné que l'armée regroupe toutes les ethnies du pays, c'est comme si nous servions nos parents directs. A ce niveau, les liens sont très fraternels. Et cela se passe sans accroc.

L.P.: Est-ce que les militants FPI et LMP arrivent à concevoir que la parenthèse Gbagbo est définitivement fermée?

Lt. D.V: Depuis mon installation, j'ai fait plusieurs séances de sensibilisation dans les marchés, les villages. Je peux vous dire qu'au départ, cela a été difficile pour eux de le concevoir, mais aujourd'hui, ils ont compris. Parce que je leur ai dit que les FRCI ne sont pas venues pour une partie au détriment d'une autre et que nous là pour tout le monde, pour tous les Ivoiriens. Et à ce niveau, ils ont compris et tout va bien.

L.P.: Le défi qui vous attend est celui de la sécurité. Quel est le point des armes qui ont été distribuées dans les villages de la région?

Lt. D.V: Nous avons effectivement saisi assez d'armes, de toute sorte de calibres : des armes lourdes, des armes individuelles (des kalachnikovs, obus, etc.). je précise que nous avons saisi des obus anti-personnel, anti-char, anti bâtiments, les calibres 12 de fabrication russe, les mortiers, etc.

L.P.: Malgré toutes ces prises, avez-vous le sentiment qu'il y a encore des armes entre les mais des populations?

Lt. D.V: Le militaire évolue sur les renseignements. Avant d'effectuer une mission, il se base sur les renseignements. Et selon les renseignements qui me sont rapportés, il est clairement établi qu'il y a encore beaucoup d'armes cachées, que les villageois détiennent par devers eux. Mais, comme ils sont partagés entre la peur et l'hésitation, ils se disent que s'ils rendent les armes, ils seront inquiétés.

L.P.: Mais, n'est-ce pas effectivement le cas?

Lt.D. V: Pas du tout. Les armes dont ils disposent, cela dépend de celui qui les leur a confiées. Car l'outil de travail d'un paysan, ce n'est pas l'arme à feux. C'est la daba, c'est la machette. Si d'aventure, on voulait améliorer leurs conditions de travail, ce sont des tracteurs ou d'autres machines qu'on devrait leur donner. Cela n'a pas été fait. Donc, je leur ai clairement signifié que les armes ne leur appartiennent pas. Elles appartiennent à l'armée. Par ailleurs, ces armes n'ont pas été prises entre les mains d'un ennemi, ou au combat. Et moi non plus, je n'ai pas procédé par la force pour entrer en possession desdites armes. Ce sont plutôt les villageois eux-mêmes qui les ont rendues. Et lorsque quelqu'un me rend les armes, ce que je peux faire pour lui, en retour, c'est de le rassurer et d'assurer sa sécurité jusqu'à ce que nous terminions ce processus.

L.P.: Si en dépit de la mobilisation et du langage diplomatique pour récupérer les armes, rien n'est fait, quelle sera la prochaine étape?

Lt. D.V: Je vais toujours continuer la sensibilisation, parce que la Côte d'Ivoire n'a plus besoin de violence. Mais, il faut qu'on se le dise. Il va arriver un moment où ce ne sera plus la sensibilisation ou la diplomatie. Mais, nous allons utiliser la force pour récupérer le reste des armes. Donc, c'est pour dire à ceux qui sont têtus, ceux qui ne veulent pas remettre leurs armes que, lorsque ce moment viendra, en tout cas, personne ne sera pardonnable.

L.P.: L'autre défi demeure celui de faire venir les populations qui ont fui pour se réfugier dans les brousses, dans leurs villages. Où en est-on à ce niveau?

Lt. D.V: A ce niveau, le bilan est positif; parce qu'au départ, tout le monde était effectivement en brousse. Mais je suis allé vers les populations pour leur dire que nous ne sommes pas là pour leur faire du mal. Et ce message a été compris. Beaucoup de villageois quittent les forêts pour regagner les villages. Seulement, les armes qu'ils détiennent ne leur appartiennent pas. Qu'ils nous les rendent. Et c'est ce qui se passe présentement.

L.P.: Vous avez aussi pour mission de réconcilier les populations. Qu'est-ce que vous leur dites?

Lt.D.V.: On ne peut pas jeter la pierre à Pierre ou à Paul. Mais aujourd'hui, nous disons aux Ivoiriens en général et aux populations de Gagnoa en particulier que les temps ont changé. Je leur lance donc un message de pardon, de cohésion, de réconciliation. Parce que toutes les grandes Nations sont passées par là. Avant de grandir, il faut souffrir. Et c'est le cas actuellement pour la Côte d'Ivoire. Je pense que les Ivoiriens ont compris que cela ne se reproduit plus jamais.

L.P.: Quels sont les rapports des FRCI avec leurs frères d'armes policiers, gendarmes et autres ex-FDS dans la région?

Lt.D.V.: Quand je suis arrivé ici et que j`ai pris fonction, j`ai mis mes frères d`armes en confiance. Je leur ai dit de sortir de leur cachette pour qu`ils viennent afin qu`on travaille ensemble. A ce jour, je peux vous dire que tous les policiers, et gendarmes qui sont inscrits sur la liste nominative de la police et de la gendarmerie nationales, sont présents dans leurs commissariats et brigades. Ils travaillent. On travaille ensemble. On fait tout ensemble. Et chacun joue son rôle après les services où nous nous rencontrons, c`est-à-dire au sport par exemple, au cours des grands rassemblements et des grandes réunions.

L.P.: Et les services publics?

Lt. D.V: Idem pour les services publics et l`administration. La justice fonctionne. Il en est de même pour la prison civile, le préfet et le sous-préfet sont tous arrivés. Ils sont les mieux placés pour me juger, parce que ce sont les représentants du Président de la République.

L.P.: Des cadres FPI ou LMP sont-ils rentrés en contact avec vous pour leur sécurité et comment cela s'est-il passé?

Lt. D.V: Je l`ai déjà dit, mais, je le répète. Nous ne sommes pas venus pour une partie contre l`autre. Vous sommes pour toutes les parties. Je voudrais profiter pour remercier mes chefs directs, mes chefs militaires. Je veux parler du chef d`Etat-major le Général Bakayoko, de tous les généraux sans distinction de corps. Je n`oublie pas le Premier Ministre, Ministre de la Défense, le Commandant Wattao qui m`a instruit, qui m`a nommé en me donnant le pouvoir que j`ai aujourd`hui. Je remercie ce grand homme. Mes remerciements vont à l`endroit aussi de tous les Ivoiriens. Je les appelle à la paix. Parce que rien ne peut se construire sans la paix. Je demande à chacun de pardonner. Moi-même j`ai pardonné.

Interview réalisée par Yves-M. ABIET

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