jeudi 15 septembre 2011 par Nord-Sud

L'association Monique Barnet au service des prisonniers(Ambsp) existe depuis 1999. Elle a pour objectif l'assistance juridique, la formation et la réinsertion des détenus dans l'univers social. Cette Ong travaille avec des structures comme l'ANAC et le PSR (prisonnier sans frontières). Son président Oued Elie Ali explique les activités de sa structure au sein de la maison d'arrêt et de correction d'Abidjan (Maca).


Quelles sont vos activités au sein de la prison?
A la Maca, nous faisons de l'assistance judiciaire et juridique, la formation-réinsertion. Nous travaillons tous sur le volet de l'assistance juridique qui consiste à conseiller les détenus sur leur réinsertion et à échanger avec eux sur leur situation judiciaire et leur situation de détenu. L'assistance judiciaire consiste à aller devant les tribunaux, à suivre les dossiers et à rencontrer les magistrats.

Quel est l'objectif de l'assistance judiciaire ?
Il réduit le nombre des détentions préventives dans les prisons. Il faut dire qu'en Côte d'Ivoire, avant les évènements de mars 2011, il y avait des détentions préventives, à mon avis, abusives et figurez-vous que des gens sont en prison sans qu'on ne retrouve leurs dossiers, parce qu'ils ne sont plus au cabinet. Ces dossiers sont renvoyés directement au tribunal correctionnel qui ne peut pas statuer parce que le parquet ne transmet pas de dossier. Vous voyez que se sont des situations difficiles, voire bizarres.

Qu'est-ce qui explique cela ?
C'est le dysfonctionnement du système judiciaire ivoirien, et pour moi c'est de la faute des magistrats car ce sont eux qui appliquent les lois, mais ceux qui les créent et qui votent les lois ce sont les députés. Et le législateur depuis un certain temps ne les révise plus. Et c'est ce dysfonctionnement qui s'impose à nous On constate qu'il y a des dossiers qui font des années sans passer devant le tribunal. Avant qu'on ouvre la prison, il y a des dossiers de détenus qui étaient retenus au parquet jusqu'à ce que la prison soit ouverte. Malgré tous les courriers et correspondances que nous avons adressés au magistrat, nous n'avons eu aucune suite favorable.

Que deviennent les détenus dont les dossiers ont disparus ?
Ils restent en prison jusqu'à ce que la situation soit réglée. Il y aussi une l'assistance-pénitencerie pour le prisonnier. Nous faisons ce que nous pouvons en adressant des courriers mais malheureusement souvent ils n'arrivent pas à destination. Il y a un détenu qui était dans un cabinet et le juge d'instruction a prononcé un non-lieu en sa faveur. La photocopie et l'original du dossier ont été transmis au parquet pour sa mise en liberté. Mais depuis 2007 jusqu'à ce qu'on casse la prison, rien n'avait été fait. Vous voyez, c'est difficile pour les détenus. Et des solutions doivent être trouvées. Pour cela, nous souhaitons que le mode d'archivage soit réétudié. Parce que, pour retrouver les dossiers aux archives, c'est très difficile.

Que dites-vous aux détenus quand vous allez à la Maca ?
Nous échangeons avec eux pour savoir leurs conditions de détention exactes. Souvent, ils ne savent pas l'évolution de leur dossier ; ils ne sont pas au parfum de leur sort. La transmission des comptes-rendus d'audience, de la justice à la prison, c'est un imbroglio.

Avez-vous des exemples ?
Il y a un détenu qui, en 2007, a été jugé et condamné à 18 mois au tribunal correctionnel ; il a fait 24 mois jusqu'à ce qu'il finisse sa peine et c'est après que nous sommes allés faire une attestation. C'est avec ce document que nous avons bataillé au parquet pour obtenir sa liberté provisoire. En plus des 12 mois, il a fait plus. Il y a plus de cas.

Et que faites-vous dans cette situation ?
Nous conseillons à ces détenus de porter plainte contre l'Etat pour demander dommages et intérêts. Mais nous ne l'avons pas encore fait. Nous prenons le cas de celui-ci qui après 9 ans d'emprisonnement, sa relaxe a été déclarée pour délit non établi. Avec lui, nous avons commencé les démarches, mais malheureusement, avec les évènements, nous ne sommes pas allés au bout. Désormais, nous allons poursuivre l'Etat devant les tribunaux.
Entretien réalisé par N.B (stagiaire)

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