vendredi 4 novembre 2011 par Le Patriote

Les Forces Nouvelles étaient beaucoup attendues sur la question de leur avenir politique, après les élections et la crise postélectorale. C'est pourquoi, du 10 au 11 septembre derniers, tous les regards et les oreilles étaient en direction de Bouaké où se tenait le grand conclave des Forces Nouvelles. Tout le monde était curieux de savoir ce que feront désormais le Premier ministre Guillaume Soro et ses hommes, au lendemain de l'élection présidentielle. Là-dessus, on a entendu beaucoup de choses. Pour certains, le conclave annoncerait la fin des FN. Pour d'autres, dans la perspective des élections à venir, les tenants de l'ex-rébellion franchiraient le cap de la formation d'un parti politique, avec pour ambition, la conquête du pouvoir d'Etat, dans les années à venir. Au finish, le conclave qui a vu la participation de 200 délégués, a décidé de la dissolution de la branche des FN, entrée dans les rangs de l'armée républicaine et de l'adhésion de l'aile politique au Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix RHDP . Bien plus, en plus du secrétaire général, Guillaume Soro, des cadres des FN brigueront en décembre, des sièges au Parlement de la nouvelle Côte d'Ivoire.

Je vais le dribbler, je vais le feinter mal

Notamment Sidiki Konaté, Alain Lobognon, Bamba Sinima.. Un autre rendez-vous est donc pris sur la route de la démocratisation de notre pays, après tant d'années de déchirements, de convulsions, d'atermoiements et de conflits fratricides.
C'est en septembre 2002, précisément le 19, que Guillaume Soro et ses amis ont lancé une offensive généralisée, pour déloger le régime corrompu et vermoulu de Laurent Gbagbo, arrivé au pouvoir deux années plus tôt, dans des conditions calamiteuses et qui avait fait de l'extermination des opposants, de la préférence nationale, du tribalisme et de la mauvaise gouvernance, les vecteurs communs de la confiscation du pouvoir d'Etat. L'actuel Premier ministre du Président Ouattara, ne disait pas autre chose dans son livre-témoignage à succès Pourquoi je suis devenu un rebelle. La Côte d'Ivoire au bord du gouffre , paru aux éditions Hachette Littératures : Il est encore temps de faire obstacle à la vague xénophobe qui balaye mon pays. C'est en tout cas dans cette conviction et avec cet espoir, que j'ai pour ma part décidé de prendre les armes contre le régime raciste de Laurent Gbagbo. C'est bien parce que le pire est à craindre que j'ai décidé de ne pas baisser les bras . Il faut le dire. En installant une rébellion dans les parties Centre, Nord et Ouest, avec peu de moyens, mais avec des hommes à la détermination à toute épreuve, oints de l'onction des populations sous le joug de la dictature des pseudo- socialistes, les Combattants de Guillaume Soro sont parvenus à instaurer l'équilibre de la terreur et à faire redescendre sur terre, un despote qui se prenait pour le centre de la terre et pour un homme invincible.
En affirmant que la rébellion s'est installée là où les gens étaient d'accord , Gbagbo ne faisait que reconnaître la légitimité des FN et de leur patron. La réalité est là, tangible et palpable ! L'avènement de Guillaume Soro et de ses hommes soulageait une grande partie des populations, victimes du charnier d'octobre 2000, des délits de faciès, de patronymie et de port de grands boubous. Dans le désespoir et la désolation, elles avaient un secours de taille. C'est pourquoi, en dépit de toutes les tentatives d'infiltrations et de querelles intestines suscitées, Laurent Gbagbo n'est jamais parvenu à vaincre les FN. La légitimité ainsi acquise sur le terrain de la lutte pour l'affirmation de la démocratie, de la consolidation des libertés individuelles et collectives, de même que le combat contre l'impunité, érigée en règle d'or sous l'oligarchie Gbagbo, se trouve renforcée dans les différentes tentatives d'assassinat du leader des FN. Les faits de lâcheté n'ont pas fait défaut. La mort programmée en 2003 à la RTI, l'assassinat manqué en Juillet et novembre 2004 et l'attentat du Fokker 100 à Bouaké, qui a coûté la vie à des collaborateurs du Premier ministre. En effet, Gbagbo voulait faire à Soro ce que son ami Dos Santos a fait à Jonas Savimbi en Angola. Malheureusement pour lui, Guillaume Soro portait bien son nom Kigbafori , qui renvoie à l'invincibilité, à la victoire sur les forces obscures et du mal. Assurément, bon sang ne saurait mentir. Après l'attentat du Fokker 100, le Premier ministre a montré au grand jour ses qualités de grand stratège, à l'image de l'élève qui arrive à surclasser son maître pourtant convaincu que son disciple ne pourrait jamais l'égaler.
Il a fait mine de ne pas savoir que c'est Laurent Gbagbo qui voulait lui faire la peau. Le chef du gouvernement a décrypté ce qui n'était à la vérité, qu'un grossier graffiti. En effet, quand les ministres Désiré Tagro et Amani N'guessan qui devraient prendre leurs places dans l'avion, ont changé d'avis pour faire le voyage en voiture, le commanditaire était tout indiqué. Guillaume Soro était en symbiose avec sa déclaration affichée devant des journalistes français : Je vais le dribbler, je vais le feinter mal . Il ne disait pas autre chose dans son livre, concernant cet homme connu pour sa duplicité et son double langage : Voilà des années que les Ivoiriens ironisaient sur le boulanger qui roule ses adversaires dans la farine. Aujourd'hui, cet homme au cynisme exacerbé et aux méthodes inqualifiables a perdu toute dignité. Il faut tout faire pour éviter que sa fuite en avant ne conduise notre pays plus avant dans le gouffre . A la suite de l'Accord Politique de Ouaga, le 4 mars 2007, qui fait de lui le Premier ministre de Côte d'Ivoire, Soro use de tact pour faire accepter au boulanger , ce qu'il n'a jamais accepté avec les précédents chefs de gouvernement. Il obtient les audiences foraines, le processus d'identification, de délivrance des cartes d'identité et la garantie d'élections transparentes et démocratiques. Pour dire vrai, il était en phase avec son idée première : La Côte d'Ivoire ira aux élections lorsque chaque ivoirien aura sa carte d'identité . En d'autres termes, Guillaume Soro se portait comme le garant moral de tous ceux qui, par le passé, ont subi la politique d'exclusion et de préférence nationale. Pendant huit ans, le patron des FN est resté dans la dynamique de la prise des armes qui s'est imposée à lui, à savoir instaurer la démocratie, la liberté et le combat sans repos ni répit contre l'impunité. Après avoir permis à ses compatriotes d'avoir leur carte d'identité et créé les conditions d'une élection présidentielle crédible, où le vainqueur a été le vainqueur, il ne pouvait nullement se débarrasser de son manteau de légitimité historique et populaire. En aucun cas, Soro ne pouvait saborder sa lutte. C'est pourquoi, il a reconnu, conformément à ses convictions et au nom de sa foi chrétienne , la victoire du Président Ouattara à qui il a remis la démission de son gouvernement, avant d'être reconduit à son poste. Au nom de la démocratie, il a pris le pari d'affronter le dictateur que ses hommes ont capturé le 11 avril dernier, après une crise postélectorale particulièrement meurtrière. A présent donc, Guillaume Soro et ses collaborateurs des FN ne pouvaient faire autre chose que la politique, où ils ont forgé leurs armes. Pour au moins, deux raisons fondamentales. En premier lieu, le Premier ministre, au terme du conclave des 10 et 11 septembre, répondait définitivement à l'appel lancé par le Président Alassane Ouattara, lors du congrès extraordinaire du RDR, à ceux des dirigeants des FN qui voudraient faire la politique , à rejoindre les rangs de son parti. Les FN ont donc rejoint le Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix.
En second lieu, après avoir obtenu la légitimité dans le combat contre la dictature et fédérant les énergies populaires, Guillaume Soro et ses compagnons ne pouvaient qu'entrer en politique et briguer des postes électifs. Le faisant, ils deviennent des taons, pour tenir en éveil les populations et la classe politique sur les bienfaits de la démocratie, de la liberté, de la moralisation de la vie publique, de la justice et de la bonne gouvernance. La légitimité ne pouvait donc qu'aller à la rencontre de la légalité.

Bakary Nimaga

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