vendredi 25 novembre 2011 par L'intelligent d'Abidjan

Les périodes post conflit sont souvent celles des procédures judiciaires en vue de punir les auteurs des crimes ou exactions constatés pendant le conflit. Les procédures en la matière sont généralement longues et complexes. Elles butent sur la qualification des crimes tout comme sur la coopération des mis en cause. Mais aussi lente qu'elle soit, la justice rattrape toujours tous les criminels. L'un des derniers exemples en date est le procès de trois anciens dirigeants Khmers rouges ouvert le lundi 21 novembre 2011 à Phnom Pen au Cambodge. Plus de trente ans après, Nuon Chea, idéologue du régime de Pol Pot (1975-1979), Ieng Sary, ex-ministre des Affaires étrangères, Khieu Samphan, autrefois président du Campuchea démocratique, vont devoir répondre de leurs actes. Tortures, déplacements forcés et massacres de plus de deux millions de Cambodgiens leur sont reprochés. Même si en raison de la complexité du procès, la cour a jugé utile de procéder à un découpage, préférant juger d'abord les déplacements forcés de populations et les crimes contre l'humanité. On peut s'interroger sur l'intérêt d'un procès dont les inculpés sont pratiquement des octogénaires avec une espérance de vie réduite. Mais certains défenseurs des droits humains parlent d'un moment historique pour le Cambodge. Sur le même continent asiatique, aux larges du Golfe persique, on assiste à un autre procès. Il s'agit du Pakistan où un tribunal juge des faits commis en 1971, c'est-à-dire qu'il y a quarante ans au cours de la guerre d'indépendance qui a opposé le Bangladesh au Pakistan. Une guerre prenant pour prétexte la préservation des valeurs religieuses et particulièrement meurtrière. On dénombre trois millions de morts parmi les bangladais et deux cent mille femmes violées. Les exemples peuvent se multiplier. En Afrique, des présumés auteurs du génocide rwandais ont été arrêtés après plusieurs années de cavale. La Côte d'Ivoire qui a traversé une page douloureuse ces dix dernières années jugera peut-être aussi un jour ses criminels. Nul ne peut être sous un parapluie protecteur tout le temps. Ce qui se passe aujourd'hui est certainement une phase de renonciation à l'impunité. Plusieurs dignitaires, civils et militaires proches de l'ancien régime sont aujourd'hui sous le verrou pour leur présumée responsabilité dans la guerre survenue après la présidentielle de novembre 2010. Des observateurs dénoncent une justice à double vitesse. Cela suppose que des auteurs de crimes et exactions courent toujours sans être inquiétés. Le temps des ennuis judiciaires n'a pas encore sonné pour eux. Mais au regard des événements à travers le monde, les crimes de guerre et crimes contre l'humanité ne restent jamais impunis. Les dignitaires du régime de Pol Pot qualifié de marxiste et totalitaire, se croyaient tout puissants et intouchables entre 1975 et 1979. Mais quand tombe Pol Pot, s'ensuit une période de disette pour ces partisans. Plusieurs sont morts quelquefois dans l'anonymat, les survivants eux, peinent avec les charges qui les accablent. Ainsi se fait la justice, toujours lente mais à la fin triomphante. La justice des hommes, avant celle plus redoutable de Dieu.
S. Débailly

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