Guy-André Kieffer est-il encore en vie? Vraisemblablement, non ! Certes, son corps n'a pas encore été retrouvé et dans ce cas, les juristes parlent de ?'disparition'', mais la réalité est que depuis maintenant huit longues années jour pour jour après, parents, amis et connaissances du journaliste sont toujours sans nouvelles de lui. Enlevé sur le parking d'un supermarché de la capitale abidjanaise, il n'a plus fait signe de vie. La disparition de Kieffer pose avec acuité, la question des enlèvements et assassinats massifs qui ont eu cours sous la décennie Gbagbo. Et Dieu seul sait combien ils sont, ceux qui ont été enlevés au vu et au su de tous et dont on n'a plus eu de nouvelles et dont les plus ?'chanceux'' ont été retrouvés, mais déjà morts. C'est le cas par exemple du français Yves Lambelin, le président de Sifca, première entreprise privée de Côte d'Ivoire, du Directeur de l'Hôtel Novotel Stéphane Frantz Di Rippel, du Malaisien, Chelliah Pandian, Directeur général de Sania, filiale du groupe Sifca, et du Béninois, Raoul Adeossi, assistant de M. Lambelin. Tous les quatre ont été kidnappés le 4 avril 2011, par des hommes armés pro-Gbagbo, qui ont fait irruption dans l'hôtel. Abidjan était alors en proie à de violents combats et le Plateau, le centre des affaires, était sous le contrôle des milices et militaires pro-Gbagbo. Si le corps de l'ex-patron de Sifca a été retrouvé après son enlèvement au plus fort de la crise post-électorale, cela n'est pas le cas des trois autres. Dans les mêmes conditions, Coulibaly Abdoulaye et Hegel Ouattara, deux membres de l'Alliance pour le changement d'Alphonse Soro, actuel député de Karakoro, sont ?'kidnappés'' en plein jour, dans un restaurant situé à Cocody-Angré. Leurs parents sont toujours sans nouvelles d'eux. Bien avant eux et aux toutes premières heures de la crise de 2002, de nombreuses personnalités ont été enlevées par les fameux escadrons de la mort, ces tueurs sans visage. Pêle-mêle, on peut citer Téhé Emile, ex-président du Mouvement populaire ivoirien (MPI), le comédien Camarah Yêrêfê dit ?'H'' sans oublier l'assassinat le 8 novembre 2002, du Docteur Benoît Dakoury-Tabley, frère cadet de Louis-André Dakoury-Tabley. Pour la simple raison que ce dernier venait de faire savoir qu'il ralliait désormais l'ex-rébellion. A cette époque jusqu'à la crise post-électorale, la liste des personnes ?'kidnappées'' est longue, très longue même. Habib Dodo, alors jeune étudiant, fondateur d'un nouveau syndicat, notamment l'Association générale des élèves et étudiants de Côte d'Ivoire (AGEECI) est porté disparu. Sa disparition porte la griffe de certains membres connus de la FESCI. Il sera retrouvé plus tard, mort, assassiné par ses ?'kidnappeurs''. Diomandé Souleymane dit ?'Vieux Lion'' et Coulibaly Souleymane, tous deux membres de la jeunesse de l'UDPCI sont portés disparus. Des individus non encore identifiés les ont pris pour une destination inconnue. Tout comme Hervé Pama Coulibaly, enlevé au cimetière de Williamsville alors qu'il était à l'inhumation d'une autre victime des escadrons de la mort. Avec lui, C. Badolo, le jardinier de Ouattara, et le Capitaine Dosso, son aide de camp, sont passés de vie à trépas. Le second qui, après avoir été informé que la résidence de son patron était pillée et incendiée par des hommes en tenues, aux premières heures de l'éclatement de l'ex-rébellion le 19 septembre 2002, prend la décision d'aller raisonner ses ?'frères d'armes''. Il ne reviendra plus jamais, car il a été abattu sur-le-champ. En tout état de cause, la folie meurtrière qui s'était emparée de certains militaires, miliciens et mercenaires proches de l'ancien chef de l'Etat déchu était prévisible. C'est bien Gbagbo qui, au stade Houphouët-Boigny avait soutenu devant ses partisans, à l'occasion de la cérémonie d'hommage aux martyrs que mille morts à gauche, mile morts à droite, moi j'avance. Et les morts à gauche et à droite, il y en a eus. Bien évidemment, ses partisans soutiendront qu'il n'est ni responsable ni coupable de toutes ces tueries.
YMA