mardi 17 juillet 2012 par Slate Afrique

Nous en rêvons tous. Oui, nous rêvons tous de ce beau pays, riche, propre, développé, où tout le monde, ou, tout au moins, une grande majorité des personnes en âge de travailler, a un emploi, où toutes les routes sont bitumées, où il y a de l'électricité, de l'eau courante et internet dans les plus petits villages, où tout le monde sait lire et écrire, où l'on ne craint plus les sorciers, où l'on sait résister aux pasteurs escrocs, où l'on peut sortir tard le soir sans craindre d'être agressé.

Le vrai changement est d'abord intérieur

C'est cela, notre rêve. Et nous comptons sur Alassane Ouattara pour le réaliser. Certains d'entre nous sont même déçus qu'il ne se soit pas encore réalisé, depuis le temps que M. Ouattara a l'effectivité du pouvoir. Nous piaffons d'impatience, et au fond, nous n'avons pas totalement tort. Nous avons fondé tant d'espoir en lui!

Seulement, mes chers compatriotes, ce rêve restera vain, tant que nous attendrons qu'un seul homme vienne le réaliser pour nous, tant que nous ne comprendrons pas que chacun de nous est partie prenante dans sa matérialisation.

Non, ce rêve ne se réalisera jamais, tant que nous n'aurons pas tué le vieil homme en nous pour laisser la place à un Ivoirien nouveau.

Le vieil homme, c'est celui-là dont la seule ambition est de gagner de l'argent en vitesse, comme le dit le slogan d'une maison de loterie, et par tous les moyens.

Manger, manger à tout prix, quitte à en avoir une indigestion. Le vieil homme, c'est celui-là pour qui le plus important est de paraître, mais certainement pas d'être et encore moins de faire.

Ce rapport malsain à l'argent

Combien de crimes, économiques ou autres, n'avons-nous pas commis, juste pour avoir la plus grande, mais pas forcément la plus belle maison du coin, quitte à y accéder par une route totalement impraticable? Pour avoir la plus belle et la plus grosse voiture, ou le plus grand nombre de voitures?

Combien de crimes économiques ou autres ne commettons-nous pas, chaque jour, rien que pour accumuler des biens matériels? Quelle est, aujourd'hui, l'éthique de l'Ivoirien? L'argent en vitesse, par tous les moyens. Dont la mendicité.

Difficile, de nos jours, pour quiconque est soupçonné, de par sa fonction ou son titre, d'être bien payé, de ne pas être sollicité, voire harcelé à longueur de journée et partout où il met les pieds.

Et ces sollicitations ne viennent pas que de malheureux n'ayant rien pour vivre, mais le plus souvent de personnes ayant des emplois leur donnant des revenus très confortables. Mais comme la norme dans notre pays est de vivre toujours au-dessus de ses moyens, le surplus doit être payé, soit par quelqu'un d'autre que l'on estime suffisamment aisé pour être obligé de redistribuer, soit en puisant dans les caisses de l'Etat ou de son entreprise.
La prévarication est devenue la règle

De toute façon, l'idée générale qui a été entretenue par les générations passées, dans ce pays, est que tout dirigeant d'entreprise ou responsable politique a une caisse où il peut puiser à volonté pour arroser tous les parasites qui ne demandent qu'à vivre aux crochets des autres. Il est quasiment impossible à un dirigeant d'entreprise d'expliquer qu'une telle caisse n'existe pas et qu'il n'a aucune intention de puiser dans celles de l'entreprise.

Manger. Tel est le maître mot dans ce pays. Et gare à celui qui chercherait à empêcher les autres de manger. Il devient alors l'ennemi à abattre par tous les moyens. Ce que nous avons le mieux développé dans ce pays est la mentalité de la mendicité et de la prédation.

La Côte d'Ivoire ne pourra jamais réaliser ses rêves de grandeur avec de tels Ivoiriens. Le pays dont nous rêvons restera toujours une illusion, tant que nous n'aurons pas tué le vieil homme en nous.

Venance Konan (Fraternité Matin)

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