vendredi 8 mars 2013 par L'expression

Le dimanche 17 mars, le Jeruci (Justice et renouveau dans un univers de coopération et d'intégration) et son président, Sylla Aboubakari, organisent une grande cérémonie d'hommage aux victimes de la crise postélectorale. Dans cette interview, il revient sur les crimes commis par les partisans de l'ancien président.

Quel regard portez-vous sur l'audience de confirmation des charges contre Laurent Gbagbo ?

Ce que je retiens, c'est que Laurent Gbagbo ne peut pas se repentir. Il nous donne l'impression d'être inscrit dans une dynamique de violence extrême. Il souhaite échapper à la justice, revenir faire la guerre, et endeuiller encore plus la Côte d'Ivoire. Car, en disant que son successeur n'a pas gagné les élections, Laurent Gbagbo s'inscrit dans une sorte de rébellion. Cela, Gbagbo et ses avocats l'ont dit. Mais ce sont des propos que nous entendons chaque jour, venant de ses partisans. C'est bien la preuve qu'ils ne reconnaissent pas le pouvoir en place et qu'ils ne sont pas disposés à aller à la réconciliation. Et là, j'ai de la peine pour la Commission Dialogue Vérité et Réconciliation (Cdvr) et son président, Charles Konan Banny. Car, chaque jour, il parle de repentance et de paix. Mais il a en face des êtres qui n'ont pas encore compris que la Côte d'Ivoire doit aller à la paix pour un développement harmonieux.

Que pouvez-vous dire alors aux victimes qui attendent la décision de la chambre préliminaire de la Cpi ?

Nous leur demandons de rester mobilisées. Nous n'allons jamais accepter qu'on se moque d'elles. Nous sommes à présents très actifs pour la recherche de la vérité et pour les réparations. Il est vrai que nous sommes engagés sur la voie du pardon, mais de l'attitude des partisans de Laurent Gbagbo dépendra l'issue de la réconciliation nationale.

Parlant de victimes, beaucoup de publicité est faite autour de la tuerie des sept femmes d'Abobo. Et pourtant, il y a eu beaucoup d'autres tueries dans la période postélectorale.
Oui, nous ne cesserons jamais de rendre hommage aux braves femmes tombées pour le respect de leur droit de vote. Effectivement, de nombreux innocents ont perdu la vie à Abobo où les tueries se sont poursuivies de janvier à fin mars 2011. Pratiquement tous les jours, il y avait des tueries, généralement provoquées par des obus, des chars, des balles et surtout au mois de février ou des incursions des ex-Fds dans les concessions, alors que les membres du commando invisible n'avaient pas la totalité de la commune en main. Pendant tout le mois de mars, plusieurs dizaines d'obus ont été lancés dans les concessions et les marchés. Des obus sont également tombés devant des mosquées, faisant des morts et des blessés graves. Le monde entier a en mémoire ces morts étalés dans une concession ce 17 mars 2011 après les jets d'obus au marché Siaka Koné et au quartier SOS. Mais sachez que la seule commune d'Abobo a enregistré plus de 700 morts et plus de 3.000 blessés dus essentiellement aux obus lancés ici et là. Mais il y a également eu des victimes de tortures, de balles, de hache, de machette, sans oublier le conteneur d'Anonkoua Kouté où des vivants étaient emmagasinés et tués par étouffement. Il y a eu aussi des marcheurs pacifiques d'Abobo qui n'étaient pas armés, contrairement à ce que voulaient faire croire les avocats de Gbagbo, qui sont des victimes à la grenade offensive.

Que comptez-vous faire pour toutes ces victimes ?

Il est vrai que le 3 mars est important pour nous, parce que des femmes ont été tuées. Mais le 17 mars, il y a eu aussi des femmes tuées. C'est pourquoi, le dimanche 17 mars, soit deux ans après ces malheureux événements, nous organiserons une grande cérémonie pour commémorer cette date, mais également pour répondre à Laurent Gbagbo, à sa défense et à ses partisans qui semblent déjà oublier ces massacres. Cette cérémonie concernera toutes les victimes, qu'elles soient d'Abobo, de Williamsville, d'Adjamé, de Treichville, de Yopougon, de Koumassi, de Port-Bouët et de l'intérieur du pays. Gbagbo est historien de formation. Nous en profiterons pour lui enseigner l'histoire récente de la Côte d'Ivoire, qu'il semble avoir déjà oubliée.

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