vendredi 20 septembre 2013 par AFP

ABIDJAN Les autorités ivoiriennes ont annoncé vendredi leur refus de transférer devant la Cour pénale internationale
(CPI) Simone Gbagbo, la compagne de l'ex-président Laurent Gbagbo, poursuivie
comme son mari pour crimes contre l'humanité après les violences
postélectorales de 2010-2011.
Le conseil des ministres, réuni en session extraordinaire, "a décidé de
présenter une requête en irrecevabilité et de sursoir à exécuter le mandat
d'arrêt émis par la CPI le 29 février 2012 (...) sur la demande du
transfèrement de Mme Simone Gbagbo à La Haye", selon un communiqué
gouvernemental.
Il aura fallu plus d'un an et demi aux autorités ivoiriennes pour prendre
cette décision, un délai anormalement long.
Après le Kenya, la Côte d'Ivoire est le deuxième pays africain refusant de
collaborer avec la CPI en à peine deux semaines.
Début septembre, les députés kényans ont approuvé une motion demandant que
le Kenya sorte du Statut de Rome, texte fondateur du tribunal international,
alors que leur président Uhuru Kenyatta et leur vice-président William Ruto
sont poursuivis par la CPI.
Le refus ivoirien d'extrader Mme Gbagbo vers la CPI "vise à la faire juger
en Côte d'Ivoire (...) par les juridictions ivoiriennes (...)", explique le
communiqué.
Le gouvernement, qui "déposera incessamment sa requête au greffe de la
CPI", a justifié sa décision par le fait que les juridictions nationales "sont
aujourd'hui réhabilitées et à même de lui (Mme Gbagbo) faire un procès juste
et équitable garantissant les droits de la défense", précise le texte.
"A l'époque du transfèrement du président Gbagbo (fin 2011), nous avions dû
prendre une décision dans l'urgence. Notre justice était pratiquement en
déshérence. Les tribunaux étaient détruits, les juges en cavale ou
introuvables. Il n'y avait pas de justice. Même la sécurité de M. Gbagbo
n'était pas assurée", a commenté à l'AFP Bruno Koné, le porte-parole du
gouvernement.
"Mais aujourd'hui, la justice est en marche. Rien ne justifie le
transfèrement à La Haye de Madame Gbagbo", a justifié M. Koné, par ailleurs
ministre de la Poste et des Technologies de l'information et de la
communication.
"Si nous avions le moindre doute quant à l'équité de la justice ivoirienne,
nous l'aurions quand même extradée aux Pays-Bas", a-t-il assuré.
Joint par l'AFP, un porte-parole du Front populaire ivoirien (FPI), parti
de Laurent Gbagbo, n'a pas souhaité réagir à chaud.
Simone Gbagbo avait été placée en détention à Odienné (nord-ouest) après la
crise postélectorale ayant duré de décembre 2010 à avril 2011, liée au refus
de l'ancien président Gbagbo de reconnaître sa défaite face à Alassane
Ouattara à l'élection de novembre 2010. Les troubles avaient fait quelque
3.000 morts.
Née en 1949 près de Grand-Bassam (est d'Abidjan) d'un père gendarme, dans
une famille de 18 enfants, Simone Ehivet est devenue Première dame le 26
octobre 2000 quand son mari est élu dans des conditions controversées.
Surnommée la "Dame de fer", elle a été autant respectée pour son parcours
dans l'opposition que crainte pour son rôle de "présidente" à poigne, souvent
accusée d'être liée aux "escadrons de la mort" contre les partisans d'Alassane
Ouattara, désormais au pouvoir, qu'elle a toujours honni.
Mme Gbagbo est également poursuivie par la justice ivoirienne pour génocide
et crimes de sang, atteinte à la sûreté de l'Etat et infractions économiques.
Début août, quatorze personnalités proches de l'ex-président Gbagbo, dont
son fils Michel, ont obtenu une mise en liberté provisoire.
Le régime d'Alassane Ouattara est régulièrement accusé de favoriser une
"justice des vainqueurs", aucune figure de son camp n'ayant été inquiétée pour
les graves crimes commis durant la dernière crise.
Outre la non-extradition de Simone Gbagbo, le conseil des ministres a
décidé vendredi d'accorder une grâce collective à environ 3.000 détenus de
droit commun.

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