mercredi 2 juillet 2014 par L'intelligent d'Abidjan

Salif Bictogo, président de la Conférence des présidents de clubs de football, par ailleurs président du Stella Club d'Adjamé dit dans cet entretien sa part de vérités au président de la fédération ivoirienne de football (FIF), Sidy Diallo après que l'équipe nationale ait quitté le mondial 2014 sans avoir pu passer en quart de finale.

Les conditions étaient-elles réunies pour permettre aux Eléphants d'aller le plus loin possible dans cette Coupe du monde?
Au niveau technique, vous connaissez ma position. J'ai été constant depuis le départ pour dire qu'au niveau technique et tactique nous n'étions pas armés pour atteindre nos objectifs. Il ne faut pas se leurrer. Nous avions les moyens humains, les moyens financiers, mais nous n'avions pas l'encadrement technique qu'il nous fallait. Une équipe c'est un tout. Et chacun à une part de responsabilité. Malheureusement, celui qui avait la plus grosse responsabilité, c'est-à-dire technique et tactique représente 70% à 80% pour nous faire atteindre l'objectif : aller le plus loin dans cette compétition ; au regard de la poule dans laquelle nous étions. Nous avons crié depuis deux ans sur les faiblesses de l'encadrement technique, malheureusement, nous n'avons pas été suivis.

Le président de la Fif vous a-t-il donné particulièrement les raisons du choix de Lamouchi ? D'autant plus qu'en son temps aucune explication n'a été donnée.
Nous avons eu un échange. Mais il faut dire que nous avons été surpris de ce choix. Nous avons voulu savoir les raisons du choix, les critères pour prendre cet entraîneur. S'il s'agissait de critères pures, Lamouchi ne faisait pas le poids parce qu'on nous a dit qu'on recherchait un coach qui a l'expérience de l'Afrique et si possible qui a déjà remporté une CAN. Celui-ci était loin d'avoir remporté un match de CAN, parce qu'il sortait de l'école. Nous avons voulu savoir sa rémunération. Mais le président est resté muet sur la question. Il a dit qu'il faisait confiance à Sabri Lamouchi et qu'il pouvait faire quelque chose de bon et de bien pour la Côte d'Ivoire. Mais nous étions sceptiques. Et je me souviens que ce jour en parlant aux noms de mes pairs, nous lui avons dit que nous respections sa décision mais qu'il sera à la fin, le seul responsable en cas d'échec.

Aujourd'hui, les Eléphants ont été éliminés en phase de poule. Le président de la FIF a présenté ses regrets, il compte fait un bilan. Sidy Diallo ne doit-il pas démissionner après avoir échoué avec un entraîneur stagiaire ?
Il n'y a pas de bilan à faire, nous attendons l'AG qu'il nous a promise après la Coupe du monde. Nous avons reçu il y a de cela un an, plus précisément au mois de juin 2013, le report de l'Assemblée générale pour une date ultérieure. Il nous a promis de faire une AG au retour de la Coupe du monde. La Coupe du monde s'achève le 13 juillet 2014, logiquement donc, nous espérons avoir les documents quinze jours avant l'AG. Et je pense qu'au plus tard fin juillet cette AG pourra se tenir. C'est ce que nous souhaitons pour tirer déjà les conséquences de la gestion de notre football. Le plus important pour nous reste l'AG.

Que devons nous attendre de l'Assemblée générale ? Est-ce pour changer les choses ? Ou pour continuer à soutenir Sidy Diallo ?
(Rire). Une AG, c'est pour recadrer les choses. Il faut déjà recadrer les choses. Déjà sous l'ère Jacques Anouma, nous avions proposé qu'une commission soit créée pour le choix des coachs. Et connaissant les talents de recrutement de M. Sidy Diallo, je crois qu'à cette assemblée nous saurons ramener le sujet sur la table. Cette commission doit nous permettre de faire le bon choix. Le bon choix d'un entraineur qui peut faire ce qui est bon pour les Ivoiriens.

Vous êtes le président de la Conférence des présidents de clubs, qu'est ce qui a été décidé entre vous pour l'avenir du football ivoirien ?
Il y a un programme de campagne pour diriger la FIF. L'on nous a dit que ce programme était formaté pour remporter la CAN. Nous avons échoué. La première fois, nous étions au moins en finale. La seconde nous échouons au premier tour (Quart de finale) ; j'appelle cela premier tour. Et là encore, nous espérions mieux. Malheureusement, Nous sommes en deçà de ce que nous espérions. Je pense qu'il a lieu de s'interroger et d'aller le plus vite à l'AG.

Les présidents de clubs ne prennent pas leur responsabilité. Vous parlez d'AG, d'autres perdront leurs langues et ne poseront pas les vraies questions. En tant que président de la Conférence des présidents de clubs, quel sera votre mot d'ordre quand on sait qu'au sein de votre association des présidents de clubs ne sont pas responsables?
J'ai déjà répondu à cette question. L'on m'a demandé : que pensez-vous de vos pairs, présidents de clubs ? J'ai répondu que j'ai trouvé des hommes de conviction et d'autres qui n'avaient pas de conviction. Ça on y peut rien. Le monde est ainsi fait. Mais j'aurai ma langue pour parler. Parce qu'il faut être un peu fou dans ce monde pour dénoncer ce qui ne va pas. Nous ne sommes contre personne, nous essayons de corriger ce qui ne va pas. Moi-même je ne suis pas un saint. Nous essayons d'améliorer ce que nous avons. Nous vantions d'être la première nation africaine de football. Ce qui ne voulait rien dire. Je pense qu'aujourd'hui, nous avons déchanté et décrié certaines méthodes pour dire que l'encadrement technique n'était pas celui qu'il fallait pour l'équipe nationale. Je dis que, nous sommes un peu responsables de cette situation. Mais, il faut aussi que nos joueurs reconnaissent leurs responsabilités dans cet échec. Ils sont des vedettes. Je l'ai souvent dit, Sabri Lamouchi ne pouvait pas entrainer Liverpool, club de Kolo Touré. On ne le prendrait pas comme adjoint à Manchester City, même à Galactasaray ce ne serait pas possible. Et il se retrouve comme ça à entraîner toutes ses vedettes. Les athlètes n'ont pas eu le courage de dire à Sidy Diallo: président attention, nous n'avons pas d'entraîneur . Ils auraient du le faire dans l'intérêt de notre football. Chacun de nous a fui ses responsabilités.

Parlant de l'AG de recadrage, si Sidy Diallo conteste ou fait de la résistance dans l'application de certaines décisions. Allez-vous demander sa démission ?
S'il ne fait pas notre affaire, nous allons demander sa démission. Il ne faut pas cultiver la langue de bois. Parce que notre football est en danger. A l'époque quand notre football était en danger nous avions demandé à M Dieng Ousseynou de démissionner. Et M Sidy Diallo était un acteur très actif dans ce sens. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, si nous constatons que notre football est en danger, nous allons demander à ce qu'il donne sa démissionne. Parce qu'à la FIF, ils ont l'avantage d'avoir la communication, l'argent du contribuable tout le temps pour faire des dépenses. Mais nous présidents de clubs, nous dépensons une bonne partie de nos maigres moyens. Et nous ne pouvons pas continuer de souffrir de cette manière. C'est dans nos clubs que nous mettons plus de 50 à 60 % du contenu de nos poches dans notre budget. Je voudrais qu'on sache qu'il y a danger en la matière. J'ai vu sur certains réseaux sociaux que le président Bictogo veut faire un coup d'état. C'est faux et d'ailleurs. La FIFA ne l'accepterait pas. Je parle en tant que président du Stella club d'Adjamé, avant d'être président de la conférence, j'ai quatorze ans de présidence, je sais ce que j'ai mis dans le football au sein du Stella Club, j'ai le droit de dire que notre football est mal géré. Je pense qu'il a lieu de faire ce recadrage.

Sidy a-t-il des chances d'être réélu?
Nous n'en sommes pas encore là. Nous parlons pour l'instant de la gestion de son mandat. Nous espérons qu'on va le corriger ensemble. Il a été élu par les présidents de clubs et il est nécessaire que nous allions à l'AG qui est l'unique endroit où nous pouvons échanger. Là-bas, nous pouvons laver le linge sale en famille.

Elu en 2011, pensez vous qu'il gère bien la Fédération ?
Sa gestion sportive ne plait pas. La gestion financière, je ne m'étalerais pas là dessus. Les gens doivent comprendre que quand on parle de mauvaise gestion, ce n'est pas seulement l'aspect financier. C'est la gestion de l'environnement, la gestion du comité exécutif, la gestion des hommes. Les membres de son comité exécutif qui ont démissionné ont dénoncé un dysfonctionnement. C'est tout cela, qu'il faut rétablir.

Est-ce vous vous attendiez à la démission de Sabri Lamouchi ?
La démission de Sabri Lamouchi nous pose le problème de dysfonctionnement. Quelques heures après le match, il annonce son départ. Avait-il préparé le président de la fédération en lui disant : si je perds le match, je rends le tablier ? . Et comme la Côte d'Ivoire est un pays important, quand on a encaissé comme Lamouchi pendant deux ans, presque un milliards de FCFA de ce pays la moindre des courtoisies est de lui devoir du respect, la moindre des courtoisies est de respecter le monde sportif, de venir expliquer son échec aux Ivoiriens, parce que les échecs font partie de la vie. Et c'est à partir des échecs qu'on prépare la victoire. On ne fait pas comme si on était venu par erreur. C'est à ceux qui ne l'ont pas embauché comme entraîneur qu'il a fait, l'annonce d'une démission. Et l'on apprend comme tout le monde par les medias qu'il a démissionné. Si on lui lance un mandat d'arrêt on croira que nous sommes en dictature. Mais je crois que ce monsieur le mérite.

Propos retranscrits par Ange Kouadio

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