vendredi 13 novembre 2015 par La Tribune Ivoirienne

En 1990, au plus fort des revendications politiques et sociales en Côte d'Ivoire, des voix s'élèvent à la cité universitaire de la commune abidjanaise de Yopougon pour décrier les difficiles conditions de vie et de travail des étudiants sur les campus universitaires d'Abidjan. Les Parents du Campus Ambiance, groupe musical estudiantin mené par Didier Bilé, mettent sur le marché l'Album Gboklo Koffi.
Faisant allusion à l'hyène, un animal renommé dans les contes africains pour ses déboires, ils pointent du doigt la galère sur les campus. C'est le Zouglou, danse philosophique pour exprimer la misère et la galère des étudiants, selon le lead vocal. À travers des pas de danse, accompagnés de gestes, les Parents du Campus Ambiance miment une doléance adressée au Tout-Puissant qu'ils implorent, afin que le bon Dieu soulage la souffrance des étudiants.
L'?uvre connaît un succès fulgurant en Côte d'Ivoire et dans la sous-région ouest-africaine. Le Zouglou éclôt ainsi à la cité universitaire de Yopougon, une commune populaire d'Abidjan, qui sera le symbole de la contestation sociale et politique en Côte d'Ivoire. Le milieu du show-biz ivoirien enregistre dès lors de nouvelles sonorités musicales et des nouveaux pas de danse.
Cependant, si les Parents du Campus Ambiance sont les précurseurs de ce nouveau style musical, le groupe Zougloumania, composé de Poignon et Julien Bouabré, est le premier à mettre sur le marché une ?uvre. L'album Zomamazo, arrangé par Olivier Blé, qui contient la chanson d'anthologie Kappa, s'est arraché comme des petits pains, en Côte d'Ivoire.
À la suite des Parents du Campus Ambiance, plusieurs groupes issus des quartiers défavorisés de la capitale ivoirienne mettent sur le marché des compositions. Les textes des chansons sont souvent livrés dans un langage populaire et dénoncent, sans faux-fuyants, les tares de la société. À l'instar des musiques dites engagées, le Zouglou porte la plume dans la plaie.

Musique citadine, le Zouglou émane de l'Alloucou, un rythme de réjouissance joué avec le tam-tam, en pays bété, dans le centre-ouest de la Côte d'Ivoire. C'est au cours des rencontres sportives entre villages et autres manifestations organisées à l'occasion des grandes vacances scolaires ou vacances d'été, que l'Alloucou est pratiqué.

Ce rythme villageois se déporte dans le milieu urbain, notamment dans le milieu scolaire, grâce à certains élèves vacanciers qui, de retour en ville, perpétuent les animations de vacances dans leurs différents établissements.

Baptisée Woyo ou Ambiance facile, la version urbaine de l'Alloucou, qui donne plus tard naissance au Zouglou, est alors exécutée durant les randonnées de scouts et autres rencontres sportives inter-écoles, occasions au cours desquelles les groupes et les chanteurs rivalisent de talent, en vue d'encourager leurs équipes respectives.
Bien que tirant son origine de l'Alloucou, le Woyo est le fruit d'un brassage culturel dû à la multiethnicité et au fort taux d'immigration que connaît la Côte d'Ivoire.
Le journaliste ivoirien Axel Illary, résidant en France, par ailleurs propriétaire du site d'information www.ladepechedabidjan.info, promène sa caméra depuis des années dans l'univers du Zouglou.
À travers Zouglou Feeling, un documentaire de 90 mn, le troisième du genre qu'il signe après Côte d'Ivoire, la presse à l'épreuve de la liberté ( 52 mn - 2002) et Génération Couper, Décaler (60 MN - 2005), l'auteur retrace l'histoire de ce genre musical devenu culte en Côte d'Ivoire et qui s'est lancé à la conquête du monde avec la célèbre chanson Premier Gaou du groupe Magic System.

C. DASSE

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