vendredi 12 aout 2016 par CARF

Au nom du président et en mon nom propre, je vous remercie pour votre présence à ce point de presse relatif à la décision de licenciement collectif pour motif économique des employés de Pêche et Froid (PFCI).

Effet, depuis la semaine dernière des journaux se sont fait l'écho de la notification de licenciement collectif pour motif économique adressée le 27 juillet 2016 par la Direction de Pêche et Froid Côte d'Ivoire (PFCI) à l'Inspection du travail, au Conseil National du Dialogue social, aux délégués du personnel et secrétaires syndicaux. Pour justifier cette décision de licenciement, la Direction de PFCI évoque les difficultés financières auxquelles la société est confrontée depuis plusieurs années. Cette situation résulte des principaux facteurs qui sont :
l'application incomplète du régime d'entreprise franche de transformation des produits halieutiques ;
la destruction par un incendie du magasin principal de la conserverie de la société qui a occasionné un préjudice matériel et d'exploitation important ;
des mutations significatives liées aux méthodes de pêche.
Au regard de ce qui précède, le Comité d'Administration du Régime Franc (C.A.R.F) qui est une structure sous tutelle du Ministère des Ressources Animales et halieutiques voudrait ici apporter les éclaircissements nécessaires à une meilleure compréhension de la situation qui prévaut au sein de la société PFCI et des autres entreprises franches.

La filière thonière en Côte d'Ivoire et spécialement la conserve de thon, joue un rôle important dans l'économie ivoirienne. Avant la crise socio-politique de septembre 2002, la quantité annuelle de thon mise en transformation sous forme de conserves et longes, était estimée à 100 000 tonnes pour un chiffre d'affaires avoisinant 98 milliards de francs CFA.

Ce niveau de production plaçait la Côte d'Ivoire au premier rang des pays africains exportateurs de conserves de thon devant le Sénégal et le Ghana, au second rang mondial des pays exportateurs derrière la Thaïlande et au sixième rang mondial des pays producteurs. En termes d'emplois, la filière thonière représentait alors 4 000 emplois directs pour une masse salariale de 7 milliards et faisait vivre 40 000 personnes environ grâce aux activités qu'elle générait (emballage, consignation, logistique, manutention, fabrication de farine de poisson pour l'aviculture et la filière bovine). En matière de transformation des produits halieutiques, la Côte d'Ivoire compte plusieurs entreprises dont les plus importantes sont AIRONE (ex-CASTELLI), SCODI, PECHE ET FROID CI et BPE.

Malgré ces performances, la filière thonière était confrontée à de graves difficultés liées à sa baisse de productivité et de compétitivité. Ces difficultés qui ont été accentuées par la crise socio-politique qu'a connue la Côte d'Ivoire depuis septembre 2002 étaient de nature à entraîner à court ou moyen terme :

la mise au chômage de plusieurs milliers de travailleurs ;
la perte totale des marchés pour les conserveries ivoiriennes ;
la délocalisation des activités de la filière thonière au profit d'autres pays disposant d'un environnement propice ;

la disparition de la filière thonière ivoirienne.
Par ailleurs, au plan juridique, le régime fiscal d'admission temporaire auquel étaient assujetties les conserveries nationales constituait un lourd handicap face à la concurrence d'une part, des pays ACP producteurs de thon (Ghana, Sénégal, Madagascar, Iles Seychelles, Iles Maurice) dont les conserveries bénéficient du régime franc, d'autre part, des pays non ACP (Thaïlande, Philippines, Indonésie, Equateur, Colombie, Papouasie-Nouvelle-Guinée) à qui l'Union Européenne a accordé d'importants avantages fiscaux.

C'est donc pour remédier à cette situation préjudiciable à l'économie nationale que le législateur ivoirien a adopté la loi n° 2005-556 du 2 décembre 2005 instituant le régime d'entreprise franche de transformation des produits halieutiques. Cette loi qui a permis de sauvegarder les entreprises industrielles de la filière thonière a pour objectifs de:

promouvoir les exportations en accroissant la compétitivité desdites entreprises ;
favoriser la création d'emplois dans la filière thonière ;

promouvoir les investissements dans le secteur de la transformation des produits halieutiques ;
favoriser le transfert de technologie et de compétences au profit des travailleurs locaux.
Les impacts des mesures prises par le régime Franc ont permis de sauvegarder les emplois qui sont passés de 2 500 à 3 500. Les salaires de ces Entreprises Franches ont été payés régulièrement avec une masse salariale annuelle de plus de 7 milliards de Francs
CFA. Les entreprises franches ont contribué en termes de cotisations et prélèvements à hauteur de 6,5 milliards sur la période de 2006 à 2015 (SCODI et PFCI)

Le régime franc octroie aux entreprises un abattement de 50% sur les facteurs de production énergétique. L'Etat doit s'acquitter des 50% restants.

Mais depuis la mise en ?uvre du régime franc, les remboursements de la dette de l'Etat n'ont pu s'effectuer de façon régulière. Il en a résulté, pour la période allant de 2006 à fin 2015 un cumul de dettes de l'Etat à hauteur de 9 milliards de FCFA. De la période de 2006 à 2011, aucun remboursement n'a été effectué. Toutefois, depuis 2011 et grâce aux efforts du Gouvernement Daniel Kablan DUNCAN, 5,3 milliards de cette dette ont été reversés aux entreprises franches AIRONE (ex-CASTELLI), SCODI, PECHE ET FROID CI et BPE.

A fin décembre 2015, l'Etat restait donc devoir à PFCI la somme de 1,7 milliards de FCFA.
Certes le Gouvernement a consenti d'importants efforts financiers pour honorer les engagements de l'Etat vis-à-vis des entreprises franches, et s'est engagé à aménager le dispositif réglementaire en vigueur en vue de permettre une mise en ?uvre efficiente du régime franc de transformation des produits halieutiques mais ces efforts n'ont pu malheureusement empêcher l'accroissement régulier et continue de la dette.

Sur instruction du Ministre de tutelle et des démarches du Secrétariat exécutif, nous avons obtenu l'assurance qu'une partie du personnel de PFCI devrait graduellement être insérée en fonction de l'évolution des activités de SCODI.

Je tiens à remercier le Ministre de Tutelle, Monsieur Kobenan Kouassi ADJOUMANI pour l'effort inlassable qu'il mène pour une filière thonière plus dynamique et prospère.
L'évolution actuelle s'insère dans une reconfiguration structurelle, dynamique et concurrentielle pour contribuer à l'épanouissement de l'activité de la filière thonière ivoirienne, et la notoriété du Port de Pêche d'Abidjan.

Pr Jacques Datte, secrétaire exécutif du CARF

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