La pétition internationale est-elle une bouteille balancée à la mer par ses initiateurs ?
Voilà une action, politico-diplomatique de la part des pro-Gbagbo, qui pourrait bien embarrasser la Cour pénale internationale ( Cpi), si elle venait à être endossée par les avocats de l'ancien chef de l'État ivoirien et soumise aux juges.
Une pétition internationale pour la libération de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé circule depuis juin 2016. A-t-elle des chances d'être déclarée recevable devant la Cour pénale internationale (Cpi) ? Si oui, peut-elle aboutir au résultat escompté, c'est à dire, la libération immédiate de l'ancien chef de l'État, Laurent Gbagbo, avant la fin de son procès, qui dure déjà depuis 5 ans ?
Cette pétition en soutien à Laurent Gbagbo, premier ex-président jugé par la Cpi, vise à recueillir plus de 20 millions de signatures. Elle a été initiée par l'écrivain ivoirien Bernard B. Dadié et l'ancien Premier ministre togolais Joseph Kokou Koffigoh. Pour accompagner ce vaste mouvement de résistance face à l'imposture et comme un devoir de conscience devant l'histoire (), les signataires exigent la libération de Laurent Gbagbo , avait déclaré Bernard B. Dadié, l'auteur de Climbié et de Le pagne noir , lors de la cérémonie de lancement de cette pétition.
La campagne doit s'étendre sur trois mois. Les pétitionnaires visent à montrer au monde que la place de Laurent Gbagbo n'est pas à la Cpi mais bien auprès des siens dans son pays , a fait valoir ce pionnier et géant de la littérature africaine .
Les questions qui se bousculent dans les têtes et qui sont sur toutes les lèvres se déclinent comme suit : serions-nous en face d'un jeu de dés, politico-diplomatique que les aléas (positifs ou négatifs) laisseront aux concours de circonstances pour garantir à cette pétition un succès ou un échec ? Certains pro-Gbagbo se demandent, à juste raison peut-être, si cette pétition internationale est une bouteille jetée à la mer (message de naufragés espérant être entendus et secourus), par ses initiateurs. Ou si cette pétition repose sur des ressorts solides, pour obtenir la libération de celui que certains journaux, notamment bleus , présentent comme le plus célèbre des prisonniers de la Cpi .
Il est pour l'heure difficile de se prononcer, dans un sens comme dans l'autre, sur une espèce de suite qui sera donnée à cette démarche de personnes qui ne sont pas parties au procès . Toutefois, cette pétition pourrait embarrasser au plus haut point les juges de la Cpi si elle venait a être remise aux avocats de Laurent Gbagbo, qui eux, sont parties au procès. Ceux-ci pourraient, dans le respect du cadre de la procédure, la mettre en avant pour solliciter une mise en liberté provisoire de leur client.
Mais, déjà, la position de la Cour pénale internationale ( Cpi), donnée, en filigrane, jeudi 24 août 2016, dans nos colonnes, par Fadi El-Abdallah, son porte-parole, laisse entrevoir une idée de la sauce à laquelle cette pétition pourrait être mangée . Les juges de la Cpi ne peuvent décider que sur les demandes qui leur sont soumises en bonne et due forme par les parties et participants au procès, et respectant les règles de la procédure prévue devant la Cpi .
Il est constant que Bernard B. Dadié et Joseph Kofigoh sont loin d'être parties et participants au procès . Comment arriveront-ils donc à faire admettre à la Cour cette pétition internationale ? En plus, est-il possible, sur la base d'une pétition, fût-elle internationale, de libérer Gbagbo qui est poursuivi pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité ?
Au surplus, toutes les demandes de libération provisoire introduites par le conseil de Laurent Gbagbo ont été rejetées. La juge Argentine, Silvia Fernandez Gurmendi, dans un jugement rendu en 2012 arguait : Les considérations relatives au passé et au présent du suspect ( Gbagbo), sa position politique et professionnelle, ses contacts internationaux et ses liens, sa situation financière et ses ressources, et la disponibilité de ressources en termes de détermination de l'existence d'un fuite () de Gbagbo en cas de libération à titre provisoire (). Il existe en Côte d'Ivoire un réseau vaste et bien organisé de sympathisants politiques de M. Gabgbo. De plus, il a des contacts politiques à l'étranger avait-elle allégué, soulignant que le réseau de Gbagbo vise, comme objectif principal, sa libération. Cette pétition est la preuve matérielle de la volonté des partisans de Gbagbo de le voir libre... ... suite de l'article sur Soir Info