jeudi 23 novembre 2017 par Jeune Afrique

L'élimination des Éléphants de la Coupe du monde 2018 n'a pas vraiment étonné Martial Yéo. L'ancien sélectionneur des champions d'Afrique 1992, figure historique du football ivoirien, explique pourquoi cet échec était prévisible, tout en livrant quelques réflexions sur l'avenir.

Les supporters ivoiriens auront vu défiler l'année 2017 comme une mauvaise Série B. Une élimination au premier tour de la CAN gabonaise, la démission du sélectionneur Michel Dussuyer, l'intronisation pour le remplacer du Belge Marc Wilmots, reparti dans le Plat Pays après un bilan catastrophique, ponctué par une douloureuse sortie de route sur le chemin de la Russie.

Comme tous ses compatriotes, Martial Yéo se remet doucement de cette dernière avanie de l'année. L'ancien entraîneur de l'Africa Sports et ex-sélectionneur des Éléphants, à qui il a offert leur premier titre de champion d'Afrique en 1992, ne veut pas faire de Wilmots le seul responsable de cet échec. Yéo s'interroge notamment sur l'afflux massif de binationaux ces derniers mois dans l'effectif, et plaide pour la nomination d'un coach local, ou d'un étranger connaissant bien l'Afrique.

Jeune Afrique : La Côte d'Ivoire ne disputera pas une quatrième Coupe du monde consécutive. Est-ce une surprise pour vous ?

Martial Yéo: Non, ce n'est pas surprenant. Cela me fait mal de dire cela, mais il faut être réaliste : la Côte d'Ivoire ne méritait pas d'aller à la Coupe du monde. Ce qu'il s'est passé depuis le titre de champion d'Afrique obtenu en 2015 le laissait supposer. Certains joueurs cadres, comme Yaya Touré, Didier Zokora, Kolo Touré ou Copa Barry ont arrêté juste après. Déjà, en 2014, une fois la Coupe du monde au Brésil achevée, Didier Drogba avait pris sa retraite internationale. Et après un titre, il y a toujours un risque de décompression. On l'a vu au Gabon lors de la CAN 2017 : les résultats n'ont pas été à la hauteur, la sélection a été éliminée au premier tour et le coach, Michel Dussuyer, a démissionné.

Marc Wilmots, qui a quitté Abidjan après un accord à l'amiable avec la Fédération ivoirienne de Football (FIF) est évidemment désigné comme le premier responsable de ce fiasco

Wilmots était un bon choix, j'en suis convaincu. C'est un bon entraîneur, il a fait de bonnes choses avec la Belgique. Mais son gros problème, c'est qu'il ne connaissait pas l'Afrique : ni la culture, ni la mentalité, ni le football africain. Et le fait de sortir du staff technique Ibrahim Kamara, qui avait plutôt assuré l'intérim entre le départ de Dussuyer et son arrivée, était à mon avis une erreur. Kamara connaît bien le football et les joueurs ivoiriens. Je pense qu'il aurait pu apporter quelque chose à Wilmots.

L'équipe a vu arriver beaucoup de nouveaux joueurs depuis deux ans et demi. Or une phase de transition n'est jamais évidente à gérer

C'est exact. Mais je crois que ces derniers mois, il y a eu beaucoup de binationaux qui ont été appelés. Attention, je n'ai rien contre eux. Ce sont d'excellents joueurs, qui jouent dans de bons clubs en Europe. Mais leur rapport à la Côte d'Ivoire est plus distant. Quand vous êtes né en Côte d'Ivoire, que vous y avez joué avant de partir pour l'Europe, que vous avez encore beaucoup de famille qui y vit et que vous y revenez pour les vacances, vous connaissez parfaitement le lien qui vous unit aux supporters. Si vous gagnez, vous êtes adulé dans la rue. Si vous perdez, vous êtes pointé du doigt. Et votre entourage peut en subir les conséquences, bonnes ou mauvaises. Un local aura une perception différente des choses. ... suite de l'article sur Jeune Afrique