jeudi 4 octobre 2018 par Genre

Le genre est une priorité de la Côte d'Ivoire, affirmée par le Chef d'Etat qui, en novembre 2017, est devenu le premier Président d'Afrique francophone à adhérer au mouvement de solidarité HeForShe, initié le 23 janvier 2015 par les Nations Unies, piloté par ONU Femmes en vue de rassembler les hommes et les garçons dans la lutte en faveur de l'égalité des sexes et des droits des femmes.

La Côte d'Ivoire, qui depuis 2012, connaît des taux d'expansion du PIB remarquables, voisins de 10%, est le deuxième pays du continent Africain, après l'Ethiopie, où le taux de croissance de l'économie est le plus rapide. Cependant, malgré les progrès économiques enregistrés, les indicateurs de développement humain, en particulier concernant le genre constituent des préoccupations importantes.

Si des résultats ont été atteints notamment l'adoption d'un plan d'action de mise en ?uvre de la Résolution 1325 du Conseil de sécurité de l'ONU, d'une politique nationale genre, d'une stratégie nationale de lutte contre les VBG, la mise en place du programme national COMPENDIUM des compétences féminines et l'adoption de la nouvelle constitution de novembre 2016 qui consacre le principe de la parité (Cf art 35, 36 et 37) et diverses mesures spéciales, pour ne citer qu'eux, de nombreux défis subsistent.

En matière de participation aux sphères décisionnelles, la Côte d'Ivoire compte seulement 6 femmes sur 36 au gouvernement, 27 femmes sur 255 à l'Assemblée Nationale, 10 femmes maires sur 197 et seulement 1 femme préside l'un des 31 conseils régionaux ivoirien.

Comme on peut le voir, en dépit des différents textes existants visant à faciliter la promotion des droits politiques de la Femme et à accroitre la représentativité des femmes dans les instances de décision, le pourcentage de femmes dans les assemblées élues demeure faible.

Par conséquent, l'objectif établi dans le programme d'actions de Beijing en 1995 sur la représentation équilibrée des hommes et des femmes est encore loin d'être atteint.

En Côte d'Ivoire par exemple, pour les élections couplées régionales et municipales d'octobre 2018, seulement 520 femmes sont candidates au régional contre 3431 hommes, soit 13,16% de femmes et 4 185 femmes au municipal contre 18 507 hommes, soit 18,44% de femmes. Sur ces effectifs, le pourcentage de femmes tête-de-liste est de 7,95% pour les régionales et 5,70% pour les municipales. Ces chiffres de la Commission Electorale Indépendante (CEI) mettent en lumière le grand écart entre la participation des hommes et des femmes recommandées par Beijing (30%) et les ODD (un monde 50-50) adopté par la conférence des Chefs d'Etat Africains. Face à cet état de fait, iI faut donc redoubler d'efforts à l'effet de faire croitre le pourcentage de femmes dans les assemblées élues.

Plusieurs facteurs entravent la participation politique des femmes en Côte d'Ivoire :

- La sous-représentation des femmes au niveau des instances de décisions au sein des partis politiques, la violence à l'égard des femmes dans la vie politique (VFFE), notamment lors des élections. Les femmes sont victimes de harcèlement, d'agressions, d'intimidation, de violences sexuelles et physiques et bien d'autres, les poussant à se retirer des processus électoraux (étude sur les violences faites aux femmes au sein des partis politiques, NDI, 2017)

- Les pesanteurs socioculturelles qui construisent la politique comme un milieu dur où les femmes n'ont pas leur place. Cette compréhension du milieu politique conduit à des comportements tendant à écarter la femme du jeu politique

- Le faible niveau d'éducation de certaines femmes et le manque de formation constituent pour d'autres femmes des obstacles majeurs à leur promotion au sein des partis politiques. Bien que les femmes soient très mobilisées à la base, bon nombre d'entre elles n'accèdent pas à des postes de responsabilité et de prise de décision à cause de leur faible niveau d'étude. Par ailleurs, les rivalités liées au nombre réduits de postes donnés aux femmes les incitent parfois à la compétition facilitant ainsi leur instrumentalisation par les hommes. Ce manque de solidarité est souvent exploité par les hommes pour les diviser et les combattre.

- La faiblesse des ressources financières handicape également les femmes politiques dans la réalisation de leurs activités

- L'insuffisante volonté politique d'aller vers la parité entre Femme et Homme.

En somme, depuis 1990, année du multipartisme, le champ politique ivoirien est resté dominé par une forte présence des hommes malgré les contributions significatives des femmes dans l'animation des partis. Cette situation laisse entrevoir une faible participation des femmes et de leur représentation dans la gestion des affaires publiques en Côte d'Ivoire.

Pour une meilleure participation des femmes à la vie politique en Côte d'Ivoire, nous pensons qu'il faille mener les actions suivantes :

Au niveau de l'Etat

- Adopter une loi sur la parité pour la promotion et la représentation politique des femmes. Cette loi devra préciser la mise en ?uvre de l'article 36 de la Constitution du 08 novembre 2016

- Mettre en place un fond d'appui aux femmes candidates afin de leur permettre de supporter les charges des campagnes

Au niveau des partis politiques

- Favoriser la promotion de la femme à des postes stratégiques au sein des partis politiques

- Encourager les candidatures féminines pendant les échéances électorales

- Mettre en place des programmes de formation politique à l'endroit des femmes afin de les inciter à participer à la vie politique.




Au niveau des femmes

- Accepter et convaincre les autres femmes qu'à l'exception du triple rôle de la femme (reproduction, production et communautaire), les femmes et les hommes ont les même aptitudes donc sont capables des mêmes réussites
- Avoir de l'audace, oser et passer à l'action
- Aider d'autres quand on est en situation de leader.




GHISLAIN COULIBALY
SOCIOLOGUE
Expert en Genre et développement

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