mardi 26 fevrier 2019 par Minutes Eco

Transfert d'argent par téléphone mobile ? L'UNETEL accuse l'administration fiscale d'être à la base de la hausse des tarifs



La hausse des tarifs des transactions mobile money, désormais effective, suscite une vive polémique renforcée par les divergences entre l'administration fiscale et les entreprises concernées (Orange money, MTN money et Moov money), toutes filiales des sociétés de téléphonie mobile. Pour une meilleure compréhension, Minutes Eco a rencontré le directeur exécutif de l'Union des entreprises de téléphonie de Côte d'Ivoire (UNETEL), Gertrude Koné Kouassi, qui clarifie dans cet entretien les positions de la corporation. Elle dénonce la transposition des taxes du secteur de la téléphonie sur des Entreprises émettrices de monnaie électronique (EME), reversées dans le secteur financier par une disposition de la BCEAO. Exclusif.

La hausse de 7,2% des tarifs des transferts d'argent par mobile monnaie suscite de l'indignation. Comment êtes-vous arrivés à ce chiffre alors qu'il est évoqué dans l'annexe fiscale une taxe de 3% ?

Avant de répondre à cette question, il convient de faire quelques précisions. D'abord l'administration fiscale a annoncé par voie de presse que la taxe de 3% avait été supprimée. Ensuite, ce ne sont pas les entreprises émettrices de monnaie électronique qui ont décidé subitement d'une hausse des tarifs des services de mobile money. C'est bien l'administration, à travers l'annexe fiscale, qui fait une extension de taxes aux entreprises de mobile money. Il s'agit, en l'occurrence, d'un ensemble de taxes spécifiques aux entreprises de télécoms et dont le montant cumulé fait 7,2%. A savoir la taxe des télécommunications (5% du chiffre d'affaire hors taxe), la taxe sur le développement des NTIC (2%) et la taxe sur le soutien à la création artistique (0,2%). Ce sont, notons-le bien, des taxes propres, comme l'a dit le législateur, aux entreprises qui interviennent dans le secteur télécoms, notamment celui de la téléphonie. L'entreprise émettrice de monnaie électronique (EME) n'est pas une entreprise de télécoms et n'utilise simplement que pour support le téléphone mobile. Il paraît donc étonnant que les taxes du secteur de la téléphonie soient reversées sur ce secteur qui, par une disposition de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO), est dans le secteur financier.

Au début, c'est-à-dire avant 2015, l'activité de mobile monnaie a été développée avec le support technique des entreprises de téléphonie mobile. Elle était donc incluse dans le chiffre d'affaires des entreprises de télécoms et, de facto, subissait toutes ces taxes. Mais avec le développement du mobile money et son impact sur le secteur financier, la BCEAO a voulu mieux organiser ce secteur et a décidé que ces entreprises soient régies d'une manière particulière. Elles sont donc aujourd'hui dans le secteur financier, avec un statut juridique particulier, sous l'instruction BCEAO n°008-05-2015 du 21 mai 2015. C'est cette disposition qui régit les conditions et modalités d'exercice des activités des émetteurs de monnaie électronique dans tous les Etats membres de l'UMOA. Ce n'est donc pas une disposition propre à la Côte d'Ivoire. Alors, si l'activité de mobile money est passée dans le secteur financier, elle ne saurait continuer d'avoir la même taxation que les entreprises de télécoms. L'activité subissait cette taxation tout simplement parce qu'elle était amalgamée avec le chiffre d'affaires des opérateurs télécoms. Une fois que la BCEAO a pris cette disposition, il appartenait aux entreprises de téléphonie de s'y conformer en créant des EME. Il n'y a donc pas de confusion à faire entre les entreprises de télécoms et les EME.

L'Etat considère qu'il perd quelque chose avec la création des EME. Cela n'est-il pas vrai ?

Possible, mais si c'est le cas, ce n'est pas du fait des opérateurs de télécoms, qui ne font que se conformer à la réglementation. On ne peut pas dire que les opérateurs ont voulu aller d'une manière ou d'une autre en contradiction avec les dispositions fiscales, et donc faire de l'incivisme fiscal. Si la décision de la BCEAO a eu pour effet une perte de revenus pour l'administration fiscale, il lui revient de s'adresser au véritable responsable de cette situation et non de s'en prendre aux opérateurs. Enfin, il faut savoir que l'activité de mobile money n'est pas du tout exonérée de taxes comme on donne à le croire. Elle est soumise à diverses taxes dont la TVA par exemple. ... suite de l'article sur Minutes Eco