mardi 31 decembre 2019 par Abidjan.net

Jamais la Côte d'Ivoire n'a traversé une fin d'année dans une situation aussi incertaine qu'explosive. La fin de cette année 2019 est loin de distinguer de celle de 2010. Période au cours de laquelle les Ivoiriens, après le second tour de l'élection présidentielle opposant l'actuel président de la République, Alassane Ouattara, au président sortant d'alors, Laurent Gbagbo, étaient englués dans une crise post-électorale.

A quelque situation près, la Côte d'Ivoire est encore à la croisée des chemins. A 10 mois des prochaines élections présidentielles, ce pays a renoué avec les incertitudes. Depuis quelques jours, les diatribes des politiciens ont cédé à un climat devenu encore plus délétère cette affaire de tentative de déstabilisation dans laquelle l'ex-président de l'Assemblée nationale, Guillaume Soro, cité, fait l'objet d'un mandat d'arrêt international, et des proches mis sous mandat de dépôt à la Maison d'arrêt et de correction d'Abidjan (Maca). On savait le torchon brûlant entre l'ancien chef de la rébellion ivoirienne et son mentor politique, le président de la République, Alassane Ouattara. Mais, cette fois, c'est une véritable guerre ouverte entre les deux personnalités et leurs clans rangés qui ont franchi le rubicond.

Chassé-croisé Ouattara ? Soro

Acculé par le pouvoir lancé à ses trousses, Guillaume Soro n'entend faire aucune concession à ses adversaires. Le président de Générations et peuples solidaires (Gps), la première personnalité à avoir fait une annonce officielle de sa candidature pour les élections présidentielles de 2020, a décidé de donner la réplique aux accusations et procédures engagées contre lui. Lesquelles ont occasionné son retour manqué au pays, le lundi 23 décembre dernier alors qu'il était prêt d'atterrir à l'aéroport d'Abidjan. L'ancien dauphin constitutionnel du président Ouattara a promis le grand déballage. Contre toute attente, ce rendez-vous est fixé aujourd'hui. A savoir ce mardi 31 décembre 2019, veille du nouvel an où les Ivoiriens sont coutumièrement attentif à un seul discours, le message à la nation du chef de l'Etat.

C'est ce même jour que Guillaume Soro a choisi pour s'exprimer. Via les réseaux sociaux, dont il est coutumier, l'ex-chef du Parlement ivoirien a annoncé son adresse à la Nation. Comme par ironie, Guillaume Soro n'entend se soumettre à aucun protocole, car il a décidé de parler au même moment et à la même heure que le président de la République, Alassane Ouattara. C'est-à-dire à 20h Gmt. Question sans doute de ne pas livrer ses cartouches au chef de l'Exécutif ivoirien, mais aussi d'essayer de lui ravir la vedette. Stratégie de communication oblige.

Bédié aussi

Depuis son lieu d'exil non encore identifié, l'ancien chef de la rébellion, ex-Premier ministre et ex-tenant du perchoir à l'Hémicycle se sait très attendu sur ce qu'il aura à dire pour se défendre contre les charges graves portées contres ses proches et lui. Aussi, prévoit-il une sortie qui s'annonce d'office explosive.

De son côté, c'est la première fois, officiellement, que le président de la République, Alassane Ouattara, qui en a aussi sous la gorge, va se prononcer sur les faits graves qui perturbent le quotidien des Ivoiriens en ces fêtes de fin d'année. A moins de choisir d'ignorer Guillaume Soro et de le laisser se débattre avec la justice, Alassane Ouattara fera sa part de déballage sur ces faits imputés à son ex-poulain. Lequel dit de lui qu'il est au courant de tout ce qu'il lui est reproché. Va-t-on, donc, assister à un chassé-croisé entre ces deux ex-alliés devenus les plus farouches adversaires du moment ? Plus que quelques heures pour en juger.

Les religieux s'en mêlent

A leur côté, un autre adversaire et non des moindres. Henri Konan Bédié, un autre ex-allié en disgrâce avec le pouvoir, parle lui aussi ce jour. Le président du Pdci-Rda a, quant à lui, respecté sa tradition. Celle de parler toujours avant l'adresse à la nation du tenant du pouvoir. Son message est prévu sur la Web-télévision de son parti à 19h30. Très en verve contre ses ex-alliés, l'on imagine déjà ce que dira le ?'Sphinx'' de Daoukro, qui rêve de prendre sa revanche sur Alassane Ouattara et le Rassemblement des Houphouëtistes (Rhdp) à la présidentielle en 2020.

En clair, c'est une soirée très explosive qui s'annonce en ce réveillon de 2020. De quoi à interpeller des religieux qui s'en mêlent, à l'image de l'Archevêque d'Abidjan, le Cardinal Jean Pierre Kutwa, qui a devancé ces leaders. Au cours de la messe de la paix célébrée ce lundi 30 décembre 2019, à la cathédrale d'Abidjan, Mgr Kutwa s'est prononcé sans ambiguïté sur la situation qui prévaut en appelant les va-t'en guerre à désarmer leur c?ur . Le prélat se sera-t-il fait entendre ?

F.D.BONY